Les forces russes ont pris le contrôle de la majeure partie de Severodonetsk

De la fumée est aperçue dans la ville de Severodonetsk lors de violents combats entre les troupes ukrainiennes et russes dans la région orientale du Donbass, le 30 mai 2022 (Photo, AFP).
De la fumée est aperçue dans la ville de Severodonetsk lors de violents combats entre les troupes ukrainiennes et russes dans la région orientale du Donbass, le 30 mai 2022 (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Mercredi 01 juin 2022

Les forces russes ont pris le contrôle de la majeure partie de Severodonetsk

  • Les forces russes ont pour objectif affiché de contrôler l'intégralité du grand bassin minier du Donbass
  • C'est dans cette zone qu'a été tué lundi un journaliste français de la chaîne BFMTV, Frédéric Leclerc-Imhoff

KIEV: Les forces russes se sont emparées mardi d'une grande partie de la ville-clef de Severodonetsk, poursuivant leur progression dans l'Est de l'Ukraine, alors que Kiev a remporté une bataille diplomatique avec un accord européen d'embargo progressif sur le pétrole russe. 

"Malheureusement, aujourd'hui, les soldats russes contrôlent la majeure partie de la ville", a indiqué le gouverneur de la région de Lougansk, Serguiï Gaïdaï, à la télévision ukrainienne, estimant la cité "détruite à 90%".

"Les combats se déroulent au cœur de la ville", a-t-il précisé. Mais "nos militaires ne seront pas encerclés", a-t-il assuré dans son intervention. "Nos soldats sont sur la défensive mais tiennent leurs positions". 

Le gouverneur régional a précisé qu'il n'y avait "désormais aucune possibilité de quitter Severodonetsk", les combats étant trop dangereux pour permettre une quelconque évacuation de civils.

Le gouverneur Gaïdaï a, quelques heures plus tard, indiqué qu'un "réservoir d'acide nitrique" d'une usine chimique de Severodonetsk avait été "touché" par une frappe russe. "Ne quittez pas les abris" et "préparez des masques pour le visage trempés dans une solution de soude", a écrit le gouverneur sur Telegram, à l'adresse des civils encore terrés dans les abris. 

Les forces russes ont pour objectif affiché de contrôler l'intégralité du grand bassin minier du Donbass, dont des forces séparatistes prorusses appuyées par Moscou ont pris le contrôle partiel en 2014. 

La ville de Severodonetsk, avec celle voisine de Lyssytchansk, situées à quelque 80 km de la capitale administrative régionale de Kramatorsk, est une agglomération-clef pour y parvenir.

C'est dans cette zone qu'a été tué lundi un journaliste français de la chaîne BFMTV, Frédéric Leclerc-Imhoff, qui accompagnait un véhicule humanitaire qui évacuait des civils.

Il pourrait rester quelque 12.000 civils pris au piège des combats et des bombardements dans cette ville qui comptait 100.000 habitants avant la guerre, a indiqué mardi le Norwegian Refugee Council (NRC), une ONG dont l'essentiel du personnel en Ukraine y était basé jusqu'à l'invasion russe de l'Ukraine le 24 février.

Alors qu'elle avait distribué jusqu'à la semaine dernière de la nourriture et des biens de première nécessité aux habitants de Severodonetsk et de la région alentour, "l'intensification des combats rend maintenant les distributions impossible", a indiqué son secrétaire général Jan Egeland dans un communiqué. 

Par ailleurs Pavlo Kyrylenko, gouverneur de la région de Donetsk, a indiqué sur Telegram que quatre civils avaient été tués et sept blessés par des tirs des forces russes dans sa région. 

Débloquer les ports ukrainiens 

Actuellement, un cessez-le-feu même ponctuel paraît improbable, en l'absence de tout pourparler de paix. 

L'une des prochaines priorités des Occidentaux semble être le déblocage des ports ukrainiens de la mer Noire. Un blocus russe paralyse l'exportation de centaines de tonnes de céréales ukrainiennes, faisant craindre le risque d'une crise alimentaire mondiale.

Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov se rendra le 8 juin en Turquie pour discuter de la mise en place de "corridors sécurisés" pour le transport des céréales ukrainiennes, a annoncé mardi son homologue turc Mevlüt Cavusoglu.

Lundi, le président russe Vladimir Poutine avait déclaré au téléphone au président turc Recep Tayyip Erdogan que la Russie était prête à travailler avec la Turquie à la libre circulation des marchandises en mer Noire, dont "l'exportation des céréales provenant des ports ukrainiens", selon un communiqué du Kremlin.

L'Union européenne (UE) cherche elle aussi une solution pour les céréales ukrainiennes. Le président français Emmanuel Macron, qui assume la présidence tournante de l'UE, a indiqué mardi avoir proposé samedi à Vladimir Poutine l'adoption d'une résolution de l'ONU qui "donnerait un cadre très clair" à la levée du blocus du port d'Odessa, premier port ukrainien.

Embargo pétrolier, mais pas gazier 

En attendant une percée sur ce dossier, l'UE a décroché dans la nuit de lundi à mardi un accord de ses 27 Etats membres sur un embargo sur le pétrole russe, longtemps bloqué par la Hongrie.

L'accord, trouvé lors d'un sommet européen à Bruxelles, prévoit que l'embargo frappera dans un premier temps uniquement le pétrole transporté par bateau, soit les deux tiers des achats européens d'or noir russe, et pas celui acheminé par oléoduc, ce qui a permis de lever le veto de Budapest.

"Cela va couper une énorme source de financement de la machine de guerre de la Russie", s'est félicité dans un tweet le président du Conseil européen Charles Michel.

L'extension de l'embargo aux livraisons par oléoduc sera discutée "dès que possible" et, au total, ce sont 90% des exportations de pétrole russe vers l'UE qui seront arrêtées d'ici la fin de l'année, selon les dirigeants européens.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait interpellé par visioconférence, au début du sommet, les Européens sur leur nécessité de faire front face à la Russie et d'assécher ses ressources financières, dont les hydrocarbures représentent une part essentielle.

L'embargo pétrolier s'inscrit dans le cadre d'un sixième paquet de sanctions européennes contre Moscou, qui comprend aussi l'exclusion de trois banques russes du système financier international Swift, dont la Sberbank, principal établissement du pays.

Les Ukrainiens réclament aussi un embargo sur le gaz russe, qui s'annonce beaucoup plus difficile à obtenir car les sources alternatives d'approvisionnement sont plus compliquées à trouver. Plusieurs dirigeants européens ont plaidé mardi à Bruxelles pour une "pause" dans les sanctions, et certains ont même carrément exclu l'adoption d'une telle mesure.

"Le gaz, c'est beaucoup plus compliqué", a estimé mardi le Premier ministre belge Alexander De Croo. 

"Le gaz devrait faire partie du septième paquet (de sanctions), mais je suis également réaliste, je ne pense pas qu'il y sera", a estimé la Première ministre estonienne Kaja Kallas.

La Russie a cependant déjà coupé le robinet du gaz à certains pays européens qui refusaient de la payer en roubles: le géant gazier russe Gazprom a annoncé suspendre immédiatement ses livraisons au néerlandais GasTerra, appartenant en partie à l'Etat néerlandais, tandis que le groupe énergétique danois Orsted a indiqué que ses livraisons seraient coupées ce mercredi. 

Nouvelle condamnation de soldats russes 

Sur le front judiciaire, la justice ukrainienne continue à avancer tambour battant dans le jugement des "crimes de guerre" commis selon elle par les troupes russes.

Après la condamnation à la perpétuité le 23 mai d'un soldat russe pour le meurtre d'un civil, un tribunal ukrainien a condamné mardi à 11 ans et demi de prison deux soldats russes accusés d'avoir bombardé au lance-missile multiple deux villages de la région de Kharkiv, au premier jour de l'invasion russe.

Alexandre Bobykine et Alexandre Ivanov ont été reconnus coupables de "violation des lois et coutumes de la guerre", a annoncé le parquet général d'Ukraine sur Telegram.


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Short Url

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.


Les États-Unis proposent à l'ONU une résolution pour « une fin rapide » du conflit en Ukraine

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine.  (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
Short Url
  • Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
  • Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE.

NATIONS-UNIES : Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale du pays, après une nouvelle attaque du président américain Donald Trump contre son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Dans un communiqué, le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a exhorté les pays membres de l'ONU à approuver cette nouvelle résolution « simple » et « historique », et « tous les États membres à la soutenir, afin de tracer un chemin vers la paix ».

« Cette résolution est une bonne idée », a rapidement commenté l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassili Nebenzia, déplorant toutefois l'absence de référence « aux racines » du conflit.

Les Européens, désarçonnés par l'ouverture du dialogue américano-russe sur l'Ukraine, n'avaient pas réagi samedi matin à la proposition américaine.

« Nous n'avons pas de commentaire pour l'instant », a simplement indiqué l'ambassadeur français à l'ONU Nicolas de Rivière, alors que l'Assemblée générale doit se réunir lundi.

Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE, mais aussi à un mépris pour les principes fondamentaux du droit international », a déclaré à l'AFP Richard Gowan, de l'International Crisis Group.

L'Assemblée générale de l'ONU se réunit lundi pour marquer le troisième anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine.

À cette occasion, l'Ukraine et les Européens ont préparé un projet de résolution qui souligne la nécessité de « redoubler » d'efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre « cette année », et prend note des initiatives de plusieurs États membres ayant présenté « leur vision pour un accord de paix complet et durable ».

Le texte réitère également les précédentes demandes de l'Assemblée générale, appelant à un retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes d'Ukraine ainsi qu'à la cessation des attaques de la Russie contre l'Ukraine.

Ces précédents votes avaient rassemblé plus de 140 voix sur les 193 États membres.

Les nouvelles salves de M. Trump contre M. Zelensky interviennent alors que la visite de l'émissaire du président américain, Keith Kellogg, semblait avoir apaisé la situation. Ces nouvelles attaques de M. Trump contre M. Zelensky font suite à des premières invectives virulentes plus tôt dans la semaine, qui avaient suscité une vive réaction de la part de Kiev et la stupéfaction de ses alliés européens.

M. Zelensky avait déclaré avoir eu des échanges « productifs » avec M. Kellogg, et ce dernier l'avait qualifié de « dirigeant courageux et assiégé d'une nation en guerre ».

Vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réaffirmé que le président Vladimir Poutine était « ouvert » à des pourparlers de paix.

La Russie exige notamment que l'Ukraine lui cède quatre régions ukrainiennes, en plus de la Crimée qu'elle a annexée en 2014, et qu'elle n'adhère jamais à l'Otan. Des conditions jugées inacceptables par les autorités ukrainiennes qui demandent à leurs alliés des garanties de sécurité solides.

M. Trump et ses collaborateurs ont jugé « irréaliste » l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan et son ambition de reprendre ses territoires perdus à la Russie.

Sur le terrain, la situation reste difficile pour les troupes ukrainiennes. L'armée russe a revendiqué vendredi la prise de deux localités dans l'est de l'Ukraine.


60 ans après, l'assassinat de Malcolm X continue de secouer l'Amérique

L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
Short Url
  • Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ».
  • « Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

NEW-YORK : Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ». C'est ce que rappelle le Shabazz Center, le mémorial et centre éducatif installé dans l'ancienne salle de bal de Harlem où il a été abattu à 39 ans, au faîte de son influence, et ce quelques mois seulement après l'abolition de la ségrégation raciale.

Qui a commandité le meurtre ? Comment le drame a-t-il pu survenir en pleine réunion publique, alors que les menaces pesant sur le militant, porte-voix de la « Nation of Islam » puis de l'abolition des discriminations, étaient connues des autorités ?

Pour obtenir des réponses, sa famille a engagé en novembre 2024 des poursuites au civil spectaculaires, réclamant 100 millions de dollars aux forces de l'ordre et aux agences fédérales qu'elle accuse, selon elle, d'avoir joué un rôle à divers degrés dans son assassinat.

Dans ce dossier qui doit entrer dans le vif du sujet début mars devant un tribunal de Manhattan, la famille assure disposer d'éléments nouveaux lui permettant d'assigner en justice la police de New York (NYPD), le FBI ou encore la CIA.

« Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

- « Qui a donné l'ordre ? » -

Selon l'assignation en justice, la famille du leader afro-américain, également connu sous le nom d'El-Hajj Malik El-Shabazz, estime que les forces de l'ordre et les services de renseignement américains ont sciemment désengagé les policiers dont la mission était de le protéger la nuit du drame.

Des agents en civil ne sont pas non plus intervenus au moment des faits et, depuis sa mort, les agences de renseignement s'emploieraient à dissimuler leurs agissements, selon la plainte.

Contactée par l'AFP, la police de New York n'a pas souhaité s'exprimer pour l'instant.

« Cette dissimulation a duré des décennies, privant la famille Shabazz de la vérité et de leur droit à obtenir justice », estime auprès de l'AFP Me Ben Crump, qui défend le dossier pour les filles de Malcolm X.

« Nous écrivons l'histoire en nous dressant ici face à ces torts et en demandant des comptes devant les tribunaux », se félicite le conseil, qui a demandé vendredi la « déclassification de documents » liés à ce dossier.

L'affaire avait déjà rebondi en 2021, lorsque deux des trois anciens hommes reconnus coupables de l'assassinat et ayant passé plus de vingt ans derrière les barreaux ont finalement été innocentés, ce qui constitue l'une des plus grandes erreurs judiciaires des États-Unis. En réparation, les deux Afro-Américains ont touché 36 millions de dollars de la part de la ville et de l'État de New York.

« On sait déjà assez précisément comment l'assassinat de Malcolm X s'est déroulé. On sait qui en est responsable : cinq membres de la Nation of Islam. La seule chose qu'on ignore, c'est qui a donné l'ordre », observe Abdur-Rahman Muhammad, historien et spécialiste reconnu du dossier, dont les travaux pendant des décennies ont contribué à disculper les deux accusés à tort.

Selon lui, les éléments mis en avant aujourd'hui par la famille de Malcolm X sont « peu crédibles ».

Il concède toutefois que « si la plainte permet de déterminer qui a donné l'ordre final, alors elle aura de la valeur ».

Cet énième rebondissement aura au moins permis de remettre en avant « l'héritage » de Malcolm X, plus important que jamais sous le second mandat de Donald Trump, « ennemi implacable » de la communauté noire, affirme l'historien.

« Cela va inciter les Afro-Américains à se serrer les coudes », anticipe Abdur-Rahman Muhammad. « En résumé, la communauté noire doit revenir au message de Malcolm : lutter. »