L'Ukraine dit reprendre du terrain près de Kherson, Zelensky s'adresse aux Européens

Des piétons passent devant une installation sur laquelle on peut lire "J'aime Kharkiv" à côté d'un marché endommagé dans le district de Saltivka, au nord de Kharkiv, le 29 mai 2022, au milieu de l'invasion russe de l'Ukraine. (AFP).
Des piétons passent devant une installation sur laquelle on peut lire "J'aime Kharkiv" à côté d'un marché endommagé dans le district de Saltivka, au nord de Kharkiv, le 29 mai 2022, au milieu de l'invasion russe de l'Ukraine. (AFP).
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Publié le Lundi 30 mai 2022

L'Ukraine dit reprendre du terrain près de Kherson, Zelensky s'adresse aux Européens

  • Dans son point de situation publié dans la nuit de dimanche à lundi, l'armée ukrainienne affirme avancer dans la région de Kherson, du côté des villages de Andriyivka, Lozove et Bilohirka
  • Les forces russes, qui se sont repliées de la région de Kharkiv, ont continué leur progression ce week-end en direction des villes clefs de Severodonetsk

KHARKIV: L'Ukraine affirme reprendre du terrain dans la région de Kherson, aux mains des Russes depuis le début de l'invasion, au moment où le président Volodymyr Zelensky doit s'adresser lundi aux dirigeants européens réunis à Bruxelles pour un sommet extraordinaire consacré à son pays.

"Kherson, tiens bon, nous sommes proches!", affirme l'état-major ukrainien sur sa page Facebook.

Dans son point de situation publié dans la nuit de dimanche à lundi, l'armée ukrainienne affirme avancer dans la région de Kherson, du côté des villages de Andriyivka, Lozove et Bilohirka.

Le bulletin de lundi matin ne donne pas de précision quant à Kherson, mais indique que les forces russes ont fait venir des forces spéciales à Mykolayiv, la ville voisine, "dans le dessein de mener des actions offensives pour récupérer des positions perdues".

Aucun commentaire côté russe n'a été fait dans un premier temps concernant les affirmations de Kiev faisant état de "la construction de lignes défensives" par les troupes russes autour de Kherson.

Cette contre-offensive ukrainienne sur Kherson intervient alors que les nouvelles autorités de la ville, désignées par le Kremlin, ont d'ores et déjà exprimé le souhait d'être rattachées à la Russie, laquelle a annoncé qu'elle allait permettre aux habitants de demander un passeport russe via "une procédure simplifiée".

Si Kherson retombait aux mains de Kiev, ce serait une avancée symbolique forte, cette région ayant été entièrement conquise par l'armée russe depuis son offensive lancée le 24 février.

A cela s'ajoute le fait que Kherson est stratégiquement située dans le sud de l'Ukraine, près de l'embouchure du Dniepr sur la mer Noire.

Visite à Kiev de la nouvelle ministre française des Affaires étrangères

La nouvelle cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, effectuait lundi son premier voyage en Ukraine pour "témoigner de la solidarité de la France à l'égard du peuple ukrainien (...) face à l'agression russe", a indiqué lundi le Quai d'Orsay.

C'est la responsable française de plus haut rang à visiter l'Ukraine depuis le début de l'attaque russe le 24 février.

La ministre s'entretiendra avec le président Volodymyr Zelensky et son homologue ukrainien, Dmytro Kuleba, "pour évoquer en particulier le blocage des exportations de céréales et d'oléagineux d'Ukraine qui soulève des risques réels d'insécurité alimentaire", a précisé le communiqué. 

La ministre se rendra aussi à Boutcha, ville de la banlieue de Kiev où ont eu lieu des massacres de civils imputés aux troupes russes. Elle y "remettra du matériel de sécurité civile (camions de pompiers et ambulances)" aux autorités.

Mme Colonna avait réservé mardi dernier à l'Allemagne sa première visite à l'étranger. Elle avait souligné qu'"aucun des pays du G7 (n'était) en guerre contre la Russie" mais appelé à "encore renforcer notre soutien à l'Ukraine dans la durée, sur tous les plans".

Elle avait aussi évoqué l'idée d'Emmanuel Macron d'une "communauté politique européenne", susceptible d'accueillir l'Ukraine ou la Grande-Bretagne.

Le président Zelensky doit s'adresser lundi aux dirigeants européens réunis à Bruxelles pour un sommet extraordinaire consacré à son pays.

Nouvelles sanctions au menu 

Le président ukrainien doit parler lundi au début du sommet européen, par visioconférence depuis Kiev. De nouvelles sanctions contre Moscou sont au menu de cette réunion des Vingt-Sept.

Outre l'embargo pétrolier, le paquet de sanctions vise l'exclusion de banques russes du système financier international Swift, une aide à l'Ukraine allant jusqu'à neuf milliards d'euros en 2022.

Cette adresse du président Zelensky intervient au lendemain de sa visite très médiatisée dimanche à Kharkiv, la deuxième ville d'Ukraine, dans le nord-est du pays. Une sortie inédite depuis l'invasion russe de fin février.

"Nous défendrons notre terre jusqu'au bout. Ils n'ont aucune chance", a déclaré M. Zelensky dimanche, allant à la rencontre de militaires sur le terrain, en gilet pare-balles et treillis, et visitant les décombres de bâtiments détruits à Kharkiv.

Médiation au point mort

Les tentatives de médiation entre Moscou et Kiev sont au point mort.

Ce week-end encore le président français Emmanuel Macron et le chancelier allemand Olaf Scholz ont eu un entretien téléphonique avec le président russe Vladimir Poutine, l'enjoignant d'entamer des "négociations directes sérieuses" avec Kiev.

Les forces russes, qui se sont repliées de la région de Kharkiv, ont continué leur progression ce week-end en direction des villes clefs de Severodonetsk, pilonnée sans relâche, et Lyssytchansk, sa ville jumelle, dans le Donbass.

Situées de part et d'autre de la rivière Siversky Donets, elles sont menacées d'encerclement par les forces russes et les séparatistes prorusses, qui cherchent à établir un contrôle complet sur le bassin minier du Donbass.

"Du côté de Donetsk, l'agresseur se concentre sur des opérations offensives pour encercler nos troupes à Lyssytchantsk et Severodonetsk", précise le bulletin de l'armée ukrainienne de lundi matin.

Le dirigeant de la république russe de Tchétchénie, Ramzan Kadyrov, avait revendiqué quant à lui samedi soir avoir pris le contrôle de Severodonetsk, ville qui comptait 100.000 habitants avant la guerre.

Le maire de Severodonetsk, Olexander Stryuk, a alerté sur l'aggravation de la situation sanitaire dans sa ville privée d'électricité depuis plus de deux semaines et vidée de ses habitants. Les "bombardements constants" compliquent beaucoup l'approvisionnement, notamment en eau potable, des milliers d'habitants encore sur place.

Alors que l'Ukraine, grande puissance agricole, ne peut plus exporter ses céréales en raison du blocage de ses ports, Vladimir Poutine a assuré, lors de sa conversation avec ses pairs français et allemands, que son pays était "prêt" à aider une exportation "sans entraves" des céréales de l'Ukraine.

les Russes avancent vers le centre de Severodonetsk, situation «très difficile»

Les forces russes ont progressé vers le centre de Severodonetsk, ville dans l'Est de l'Ukraine, pilonnée depuis des semaines et où se déroulent désormais des combats de rue, a annoncé lundi le gouverneur de la région.
"Les Russes avancent vers le milieu de Severodonetsk. Les combats se poursuivent, la situation est très difficile", a indiqué sur Telegram Serguiï Gaïdaï, à la tête de la région de Lougansk.
Selon lui, deux personnes ont été blessées lundi lorsque leur voiture a été prise pour cible, et se trouvent désormais "en sécurité". Trois médecins sont portés disparus, selon la même source.
"L'infrastructure critique de Severodonetsk est détruite, 60% du parc de logements ne peut pas être restauré", a poursuivi M. Gaïdaï.
Il a ajouté que la route reliant Severodonetsk à la ville jumelle de Lyssychansk puis à celle de Bakhmout plus au sud était trop "dangereuse" pour permettre l'évacuation des civils et le transport d'aide humanitaire.
Dimanche, M. Gaïdaï avait signalé qu'un assaut russe sur Severodonetsk était en cours avec des combats de rue. Il avait également indiqué que la situation à Lyssychansk s'était "largement aggravée".
Severodonetsk, ville de 100.000 habitants avant la guerre, est pilonnée à l'artillerie depuis des semaines par l'armée russe et les séparatistes prorusses qui combattent à ses côtés. Des dizaines de civils y ont tués.
Severodonetsk et Lyssytchank sont situées à plus de 80 km à l'est de Kramatorsk, devenu le centre administratif du Donbass ukrainien depuis que les séparatistes soutenus par Moscou se sont emparés de la partie orientale de ce grand bassin houiller en 2014.

Blocage hongrois

A Bruxelles, à la veille du sommet de l'UE, les représentants des Vingt-Sept ont examiné dimanche une nouvelle proposition qui exempterait temporairement un oléoduc clé pour la Hongrie d'un embargo progressif de l'UE sur le pétrole russe, afin de tenter de lever le blocage sur leur 6e paquet de sanctions contre Moscou.

Ces nouvelles sanctions sont pour l'instant bloquées par la Hongrie, pays enclavé sans accès à la mer et dépendant du pétrole acheminé de Russie par l'oléoduc Droujba, qui lui fournit 65% de sa consommation.

Parallèlement, les Occidentaux continuent à revoir leurs politiques de défense face à la menace russe.

Le chef adjoint de l'Otan, Mircea Geoana, a estimé dimanche que l'Alliance n'était plus tenue par ses anciens engagements envers Moscou de ne pas déployer ses forces en Europe orientale.

Dans l'Acte fondateur sur les relations entre l'Otan et la Russie, signé il y a 25 ans, les Russes s'étaient "engagés à ne pas agresser les voisins, c'est ce qu'ils sont en train de faire, et à tenir des consultations régulières avec l'Otan, ce qu'ils ne font pas", déclaré M. Geoana.

Selon lui, l'Acte fondateur "ne fonctionne simplement pas, à cause de la Russie", et l'Otan n'a désormais plus "aucune restriction" pour se doter d'une "posture robuste sur le flanc est".

Et en Allemagne, gouvernement et opposition conservatrice ont trouvé dimanche soir un accord pour faire une entorse aux règles budgétaires imposées par la constitution, afin de débloquer 100 milliards d'euros pour moderniser l'armée.

Une voiture piégée explose à Melitopol, les autorités prorusses accusent Kiev

Une voiture piégée a explosé lundi matin à Melitopol, faisant deux blessés, a indiqué l'administration prorusse de cette ville du sud de l'Ukraine occupée par les forces russes, qui accuse Kiev d'être derrière cet "attentat".
"Vers 08H00 du matin une voiture piégée a explosé dans le centre de la ville", a écrit l'administration de la cité située près de la mer d'Azov, faisant état de deux blessés, des "bénévoles qui apportaient de l'aide humanitaire" âgés de 25 et 28 ans.
Une enquête est en cours, selon cette source.
"C'est un acte terroriste cynique du régime de Kiev, un acte destiné à effrayer les habitants de notre ville, un acte dirigé contre les civils", a accusé Galina Daniltchenko, la nouvelle maire de la cité installée par les forces russes, citée par l'agence russe Ria Novosti.
"C'est une situation horrible, et le régime de Kiev ne peut se faire à l'idée que les habitants de Melitopol ne veulent plus avoir à faire avec ce pouvoir de Kiev, nous voulons vivre une nouvelle vie, une autre vie, une vie pacifique", a-t-elle ajouté.
Melitopol a été conquise par les forces russes dans les premiers jours de l'offensive de Moscou en Ukraine. Le 11 mars, son maire, Ivan Fedorov, avait été enlevé par les Russes, avant d'être libéré quelques jours plus tard. Une administration prorusse a ensuite été installée dans la cité.
Le 23 mai, Andreï Chevtchik, le maire installé par Moscou d'Energodar, autre ville du sud de l'Ukraine accueillant la plus grande centrale nucléaire d'Europe, avait été blessé dans une explosion avec deux de ses gardes du corps.
Selon le Comité d'enquête russe, une "bombe artisanale" avait été placée dans une armoire électrique dans l'entrée d'un immeuble résidentiel.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, avait estimé qu'il s'agissait d'un "attentat" commis par des "nationalistes" ukrainiens.
Les villes de Melitopol et d'Energodar appartiennent à la région ukrainienne de Zaporijjia, en grande partie occupée par Moscou. Elle est voisine de celle de Kherson, entièrement sous contrôle russe, dont l'annexion par la Russie semble se dessiner.
Le contrôle par la Russie du littoral de la mer d'Azov (Kherson, Zaporijjia et Donetsk), y compris le port de Marioupol, permet de constituer un pont terrestre pour relier le territoire russe à la péninsule de Crimée, qu'elle a annexée en 2014.


L'aide américaine n'est pas une «baguette magique» pour l'Ukraine

Des militants brandissent des drapeaux ukrainiens devant le Capitole américain à Washington, DC, le 23 avril 2024. (AFP)
Des militants brandissent des drapeaux ukrainiens devant le Capitole américain à Washington, DC, le 23 avril 2024. (AFP)
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  • «Cela a été un parcours difficile. Cela aurait dû être plus facile. Cela aurait dû arriver plus vite», a reconnu Joe Biden mercredi
  • Jake Sullivan a averti qu'il était "possible que la Russie réalise des avancées tactiques supplémentaires dans les semaines à venir", alors que Kiev s'attend à une nouvelle offensive russe prochaine

WASHINGTON: Un soutien massif, pas une "baguette magique": l'aide américaine à l'Ukraine ne résoudra pas tous les problèmes sur les fronts, et les Etats-Unis sont les premiers à le reconnaître.

"Cela a été un parcours difficile. Cela aurait dû être plus facile. Cela aurait dû arriver plus vite", a reconnu Joe Biden mercredi.

Il venait de promulguer une loi, âprement débattue pendant des mois au Congrès américain, qui prévoit 61 milliards de dollars d'aide militaire et économique pour Kiev.

"C'est un montant important", mais "ce délai a coûté cher", souligne Garret Martin, chercheur à l'American University de Washington.

Le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Jake Sullivan, en a convenu lui-même.

"Il va falloir du temps pour sortir du fossé creusé par les six mois d'attente" au Congrès, a-t-il dit lors d'une conférence de presse.

Il a averti qu'il était "possible que la Russie réalise des avancées tactiques supplémentaires dans les semaines à venir", alors que Kiev s'attend à une nouvelle offensive russe prochaine.

"Le chemin qui est devant nous n'est pas facile", mais "nous pensons que l'Ukraine peut, et va, gagner", a encore indiqué" Jake Sullivan, en se gardant bien toutefois de définir ce que serait une "victoire" ukrainienne.

Au-delà du montant très conséquent voté par le Congrès, les Etats-Unis ont aussi décidé d'aller plus loin dans la nature des armes fournies.

Ils ont ainsi commencé, discrètement, à livrer aux Ukrainiens des missiles longue portée de type "ATACMS", et vont continuer à le faire.

Mobilisation

L'Ukraine avait utilisé pour la première fois en octobre contre la Russie des missiles américains ATACMS, mais ceux dont il est question désormais peuvent frapper plus loin, jusqu'à 300 km de distance.

"Cela aura un impact", mais "ce n'est pas un seul équipement qui résoudra tout", a dit le conseiller à la sécurité nationale.

Par ailleurs, "il y a une chose que cette aide ne peut pas faire, à savoir résoudre le problème du manque de combattants" de Kiev, souligne Garret Martin, même s'il estime que le vote du Congrès américain pourrait doper le moral des troupes ukrainiennes.

Ce sujet de la mobilisation a fait l'objet de discussions entre Joe Biden et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, selon la Maison Blanche.

L'Ukraine est confrontée à une pénurie de soldats volontaires, après plus de deux ans de guerre contre l'envahisseur russe, qui ont fait des dizaines de milliers de morts.

Kiev vient d'élargir la mobilisation, abaissant l'âge des Ukrainiens pouvant être appelés de 27 à 25 ans.

Le pays, qui cherche à faire revenir sur son territoire ses citoyens en âge de combattre, ne délivrera par ailleurs plus de passeports à l'étranger aux hommes âgés de 18 à 60 ans, selon un texte publié par le gouvernement mercredi.

Max Bergmann, Directeur au Centre des études stratégiques et internationales (CSIS), souligne lui que l'impact de l'aide américaine dépendra aussi, en partie, de l'attitude des Européens.

Ces derniers "doivent doper dès maintenant la production" d'armement, écrit-il dans une note récente, avec pour "objectif de pouvoir combler la lacune que laisseraient les Etats-Unis" si le financement américain devait s'arrêter pour de bon, par exemple en cas de victoire du républicain Donald Trump à la présidentielle de novembre.

Pour l'expert, l'Ukraine devra s'attacher en 2024 à "tenir ses positions, fatiguer les forces russes, reconstruire et restaurer ses propres forces et ses capacités de défense civile", avant, éventuellement, de repartir "à l'offensive" l'an prochain.


Pakistan: Malala critiquée pour une comédie musicale produite avec Hillary Clinton

La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu'elle produit avec Hillary Clinton. (AFP).
La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu'elle produit avec Hillary Clinton. (AFP).
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  • Sur X, anonymes et commentateurs lui reprochent d'être apparue à Broadway aux côtés de l'ex-secrétaire d'Etat américaine -sous le mandat de laquelle des frappes de drones ont tué des civils au Pakistan- et de ne pas se prononcer sur la guerre à Gaza
  • Si Malala Yousafzai, 26 ans, est une militante obstinée des droits des femmes louée à travers le monde, les cercles islamistes et une partie importante de l'opinion publique pakistanaise voient en elle un "agent des Etats-Unis"

LAHORE: La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu'elle produit avec Hillary Clinton.

Sur X, anonymes et commentateurs lui reprochent d'être apparue à Broadway aux côtés de l'ex-secrétaire d'Etat américaine -sous le mandat de laquelle des frappes de drones ont tué des civils au Pakistan- et de ne pas se prononcer sur la guerre à Gaza, y voyant un "deux poids, deux mesures".

Si Malala Yousafzai, 26 ans, est une militante obstinée des droits des femmes louée à travers le monde, les cercles islamistes et une partie importante de l'opinion publique pakistanaise voient en elle un "agent des Etats-Unis" créé pour corrompre la jeunesse.

Après la première représentation de "Suffs", le cercle des critiques semble s'être élargi à des figures du féminisme au Pakistan.

"J'ai défendu bec et ongle Malala toutes ces années mais, là, je ne la suis pas. C'est vraiment difficile de la défendre depuis six mois", écrit ainsi la militante Leena Ghani, en référence à la guerre lancée par Israël à Gaza en réponse à l'attaque meurtrière du Hamas sur son sol le 7 octobre.

"J'admire Malala depuis 2011", affirme l'éditorialiste Mehr Tarar sur X, mais "sa collaboration théâtrale avec Hillary Clinton -qui défend le soutien infaillible de l'Amérique au génocide des Palestiniens- est un vrai coup à sa crédibilité comme défenseuse des droits humains".

« Tu nous as laissés tomber »

Mme Clinton a dit soutenir la guerre contre le Hamas et rejeté des appels au cessez-le-feu à Gaza. Elle a aussi réclamé la protection des civils dans le petit territoire contrôlé par le mouvement islamiste depuis 2007.

"Quelle déception Malala, tu nous as laissés tomber", écrit de son côté la professeure et militante féministe Nida Kirmani.

De nombreuses voix au Pakistan ont accusé Malala Yousafzai de ne pas avoir exprimé sa solidarité avec les Palestiniens. La jeune femme avait pourtant précédemment publiquement condamné la mort de civils à Gaza et réclamé un cessez-le-feu.

Le New York Times rapporte qu'elle portait un pin's rouge et noir pour la première représentation de "Suffs", un signe de soutien au cessez-le-feu.

Après ces critiques, la jeune femme a affirmé mardi sur le réseau social X son soutien aux habitants de Gaza et condamné la guerre menée par Israël.

"Je veux qu'il n'y ait aucune confusion quant à mon soutien à la population de Gaza", a écrit Malala Yousafzai.

"Nous n'avons pas besoin de voir davantage de cadavres, d'écoles bombardées et d'enfants affamés pour comprendre qu'un cessez-le-feu est urgent et nécessaire".

"J'ai condamné et je continuerai à condamner le gouvernement israélien pour ses violations du droit international et ses crimes de guerre", a-t-elle ajouté.

La jeune fille originaire de la verdoyante vallée de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan, avait été blessée par balle au visage en 2012 par des islamistes.

Soignée en urgence en Grande-Bretagne, elle est ensuite devenue un symbole mondial de résistance à l'extrémisme religieux et la porte-voix des filles privées d'instruction, puis en 2014 la plus jeune prix Nobel de la Paix de l'histoire.

Depuis qu'elle a été attaquée, elle n'est revenue que deux fois dans son pays.


Gaza: montée des tensions entre étudiants et la police sur les campus américains

La colère d'étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux Etats-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie. (AFP).
La colère d'étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux Etats-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie. (AFP).
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  • "Si la situation n'est pas maîtrisée rapidement et si les menaces et intimidations ne cessent pas, il sera alors temps de faire appel à la Garde nationale"
  • Depuis le regain de tensions la semaine dernière à Columbia, le mouvement s'est étendu à d'autres campus

AUSTIN: La colère d'étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux Etats-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie.

En visite à l'université Columbia à Manhattan -- d'où est parti cette dernière vague de manifestations étudiantes commencées en octobre -- le président républicain de la Chambre des représentants du Congrès, Mike Johnson, a menacé: "si la situation n'est pas maîtrisée rapidement et si les menaces et intimidations ne cessent pas, il sera alors temps de faire appel à la Garde nationale".

Pour "rétablir l'ordre sur ces campus", a martelé le dirigeant conservateur.

Un avertissement qui résonne douloureusement aux Etats-Unis: le 4 mai 1970, la Garde nationale de l'Ohio avait ouvert le feu à l'université d'Etat de Kent sur des manifestants étudiants pacifiques, dont quatre avaient été tués.

M. Johnson, proche de l'ex-président républicain Donald Trump candidat à sa réélection, a averti qu'il exigerait du président démocrate Joe Biden d'"agir" et jugé que les manifestations pro-palestiniennes "mettaient une cible sur le dos d'étudiants juifs aux Etats-Unis", qui comptent le plus de juifs au monde (quelque six millions) après Israël.

« Liberté d'expression »

Depuis le début du conflit à Gaza en octobre, les universités américaines sont secouées par des débats parfois violents sur la liberté d'expression et des accusations d'antisémitisme et d'antisionisme qui ont coûté leurs postes cet hiver aux présidentes de Harvard et de l'université de Pennsylvanie.

"Profitez de votre liberté d'expression", a lancé, provocateur, M. Johnson, hué par des centaines d'étudiants de Columbia vent debout contre la guerre d'Israël contre le Hamas qui a tué quelque 34.200 personnes, la plupart des civils, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste palestinien.

L'attaque sans précédent du 7 octobre 2023 menée par le Hamas a fait 1.170 morts, essentiellement civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles.

Mercredi, la Maison Blanche a réaffirmé que le président Biden, qui espère être réélu en novembre, "soutenait la liberté d'expression, le débat et la non discrimination" dans les universités.

Depuis le regain de tensions la semaine dernière à Columbia, le mouvement s'est étendu à d'autres campus.

Alliance Etats-Unis-Israël 

Notamment dans les Etats de la Nouvelle-Angleterre, dans le nord-est, où des prestigieuses universités ont demandé à la police d'interpeller des manifestants étudiants qui dénoncent l'alliance militaire, diplomatique et économique des Etats-Unis avec Israël et critiquent les conditions actuelles des Palestiniens.

"En tant que Palestinien, est-ce de ma responsabilité d'être là et de montrer ma solidarité avec la population de Gaza? Absolument!", a répondu à l'AFP Yazen, un Américain de 23 ans d'origine palestinienne qui campe depuis quelques jours dans des tentes montées sur le campus de Columbia.

La présidence de l'université a salué "des progrès importants" dans les discussions avec des étudiants pour évacuer ce campement d'ici vendredi.

Dans la nuit de lundi à mardi, 120 personnes avaient été brièvement interpellées devant l'université de New York (NYU), au coeur de Manhattan. A Yale, dans le Connecticut, une cinquantaine de manifestants ont aussi été interpellés.

Sa concurrente Harvard, la plus ancienne des Etats-Unis, en banlieue de la cité historique de Boston, a vu aussi mercredi se monter sur son campus arboré un campement.

Police anti-émeute 

A l'autre bout du pays, l'université du Texas à Austin a été le théâtre d'un face-à-face, finalement bon enfant, entre des centaines d'étudiants pro-palestiniens et la police, dont nombre d'officiers à cheval et en tenue anti-émeute.

Certains brandissaient des drapeaux palestiniens et portaient le keffieh, d'autres, encadrés par des policiers, s'étaient enveloppés dans des drapeaux d'Israël.

Et à l’université de Californie du sud (USC), plusieurs centaines d’étudiants ont manifesté aux cris de "libérez la Palestine", "révolution par l'intifada".

Dans la foule très diverse, certains agitaient des drapeaux palestiniens, d'autres portaient des keffiehs et des pancartes appelant à "arrêter le génocide" et à un  "cessez-le-feu".

Des centaines de manifestants s'étaient rassemblés mardi soir à Brooklyn, le plus grand arrondissement de New York, à l'appel de Jewish Voice for Peace, un groupe d'Américains juifs de gauche pro-palestiniens, à l'occasion du séder, le rituel de la Pâque juive. Nombre d'entre eux ont été interpellés.

"Nous sommes (les Américains) les instigateurs d'une telle violence, d'une telle haine, c'est terrible", a tonné sur place Rebecca Lurie.