KABOUL: Zalmay Khalilzad, le représentant spécial des États-Unis pour la réconciliation en Afghanistan a averti lundi que l'augmentation des attaques des Talibans pourrait compromettre l'accord de paix historique signé entre Washington et le groupe militant en février.
Il a ajouté que les frappes pourraient faire dérailler les pourparlers en cours à Doha, au Qatar, entre les Afghans dont l’objectif est de mettre fin au conflit prolongé dans le pays.
«Les taux élevés de violence peuvent menacer le processus de paix et l’accord ainsi que l’idée fondamentale qu’il n’existe pas de solution militaire. La violence aujourd'hui demeure terriblement élevée malgré la récente réaffirmation de la nécessité d'une réduction substantielle», expliquait-il lundi dans des tweets.
Depuis la semaine dernière, les talibans ont déclenché une série d'attaques dans certaines parties de l'Afghanistan, en particulier dans le sud de la province de Helmand où plus de 35 000 personnes ont été déplacées ces derniers jours, ont déclaré des responsables afghans à Arab News.
En réponse, les forces américaines dans le pays ont lancé plusieurs frappes aériennes sur les positions des Talibans, ce que le groupe d'insurgés a décrit dimanche comme une violation de l'accord de février.
Répondant aux accusations des Talibans, Zalmay Khalilzad a déclaré qu'il s'agissait «d'accusations non fondées de violations et de rhétorique incendiaire» qui «ne font pas avancer la paix».
Washington accuse également les Talibans d'avoir rompu l'accord historique qui, entre autres, a pour objectif de finaliser un retrait complet du pays des troupes dirigées par les États-Unis.
Zalmay Khalilzad rappelle que les frappes aériennes ont été menées pour soutenir les troupes afghanes dans le cadre de l’engagement de Washington à les défendre, si nécessaire.
Il ajoute que les attaques des Talibans à Helmand, dont certaines dans la capitale provinciale qui visaient les forces de sécurité afghanes, ont conduit récemment à la tenue d’une réunion à Doha où les deux parties sont convenues de «réduire les attaques et les frappes». Et si les niveaux de violence à Helmand ont baissé, ils «restent élevés» dans tout le pays, poursuit le diplomate d'origine afghane.
Selon certains observateurs afghans, le motif des attaques des Talibans est de «prendre le contrôle» dans les négociations.
Cependant, Khalilzad met en garde contre les risques liés à l'utilisation de cette stratégie.
«La croyance selon laquelle la violence doit s'intensifier pour gagner des concessions à la table des négociations est risquée. Une telle approche peut saper le processus de paix et répéter les mauvais calculs passés des dirigeants afghans», explique-t-il, exhortant toutes les parties à honorer «l'opportunité historique de paix, qu'il ne faut pas manquer».
Zabihullah Mujahid, un porte-parole des Talibans, a déclaré lundi à Arab News que le groupe n'avait «aucun commentaire» sur les déclarations de Khalilzad et que les forces américaines ont «violé l'accord de Doha sous diverses formes en menant des frappes aériennes excessives».
Mujahid ajoute qu'il n’a «aucune information» sur l'état des attaques dans la province de Helmand.
Cependant, selon Omar Zwak, porte-parole du gouverneur d’Helmand, contacté par Arab News «les combats se sont calmés dans diverses parties de l’Helmand» au cours des deux derniers jours.
Pendant ce temps, un haut fonctionnaire anonyme du gouvernement du président afghan, Ashraf Ghani, a félicité M. Khalilzad «de commencer à devenir réaliste» et d’avoir «rompu le silence sur les attaques répétées des Talibans».
Pour une autre personnalité, la députée basée à Kaboul Fawzia Zaki: «Le gouvernement et le peuple afghan en général insistent sur l'application d'un cessez-le-feu ou une réduction drastique de la violence avant le début du dialogue entre les Afghans.»
Pour que cela soit efficace, Zalmay Khalilzad et Washington «doivent exercer une pression croissante pour qu'ils écoutent nos justes revendications», ajoute Zaki.
Cependant, les experts mettent en garde contre «l'impatience croissante» des deux côtés.
Shafiq Haqpal, un analyste, explique à Arab News : «Les commentaires de Zalmay Khalilzad montrent clairement que Washington s’impatiente face aux attaques des Talibans et au manque de progrès dans les pourparlers.»
Il déclare que le président américain, Donald Trump, «espère voir une percée bientôt», afin qu'il puisse «la présenter comme un succès de son administration pour sa campagne de réélection».
«Mais cela ne se produit pas. Peut-être que les États-Unis ont compris que cela n'arriverait pas, alors ils commencent à sortir et à mettre en garde les Talibans contre les conséquences de leurs attaques», conclut M. Haqpal.
Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com