Tout nouvel accord sur le nucléaire iranien devrait imposer plus de restrictions à Téhéran

Le négociateur en chef iranien sur le dossier nucléaire, Ali Bagheri Kani, quitte le Palais Coburg à Vienne, en Autriche, le 11 mars 2022. (AFP)
Le négociateur en chef iranien sur le dossier nucléaire, Ali Bagheri Kani, quitte le Palais Coburg à Vienne, en Autriche, le 11 mars 2022. (AFP)
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Publié le Dimanche 15 mai 2022

Tout nouvel accord sur le nucléaire iranien devrait imposer plus de restrictions à Téhéran

Tout nouvel accord sur le nucléaire iranien devrait imposer plus de restrictions à Téhéran
  • Les futures administrations américaines ne doivent pas avoir de prétextes facilement accessibles pour annuler les accords et relancer les hostilités
  • L’Iran devrait également faire preuve de bonne volonté et cesser de financer tous les mandataires et groupes terroristes qui combattent les États-Unis au Moyen-Orient

Le Sénat américain a adopté la semaine dernière une résolution symbolique exigeant que la version précédente du plan d’action global commun, mieux connu sous le nom d’accord de Vienne sur le nucléaire iranien, ne soit pas rétablie sans changements fondamentaux – y compris l’endiguement des mandataires terroristes de Téhéran qui opèrent librement dans tout le Moyen-Orient et la lutte contre son programme croissant de missiles balistiques.

La résolution non contraignante a été adoptée par 62 voix contre 33. Seize démocrates ont voté en faveur de la résolution. En outre, l’accord sur le nucléaire iranien a été reconnu comme gravement défectueux de manière à le rendre dès le début non viable. Il a peut-être réussi à contenir la capacité nucléaire de l’Iran, mais a permis à Téhéran de s’attaquer librement aux autres intérêts et alliés américains au Moyen-Orient. Notons que l’Iran a, depuis longtemps, un vaste réseau de mandataires à travers le Moyen-Orient pour servir cet objectif en particulier et qui continuent par ailleurs de faire ce qu’ils ont toujours  fait.

L’Iran finance, fournit des armes, assure les entraînements et coordonne même souvent directement la stratégie et les tactiques de groupes comme le gouvernement antiaméricain et anti-Otan de Bachar al-Assad en Syrie, le Hezbollah au Liban, le Hamas dans les territoires palestiniens occupés et les Houthis au Yémen. Ces dernières années, le pays a même commencé à aider les talibans, auxquels il était auparavant opposé, dans leurs efforts pour expulser les États-Unis d’Afghanistan. En plus de cela, l’Iran a soutenu une série de cellules et de groupes terroristes plus petits qui ont mené des attaques contre les ressources diplomatiques et militaires américaines pendant des décennies.

Un Washington dirigé par les démocrates pourrait mettre fin à ces excès et mener ce combat indépendamment de l’accord sur le nucléaire. Mais n’importe quel parti anti-iranien pourrait plus tard utiliser les activités de ces mandataires contre les intérêts américains dans la région comme prétexte pour faire échouer le plan d’action global commun et impliquer les États-Unis dans une confrontation militaire directe avec Téhéran. Washington ne manque certainement pas de partis anti-iraniens prêts à faire exactement cela.

Il est donc impératif que Joe Biden ressuscite l’accord avec l’Iran pour que Téhéran ne puisse pas acquérir d’armes nucléaires. Le seul autre moyen de potentiellement empêcher Téhéran d’atteindre cet objectif est une guerre totale qui, à la suite de l’expérience irakienne, devrait évidemment être évitée. L’Iran est un pays beaucoup plus grand et plus puissant que ne l’était l’Irak. Et les Iraniens, même ceux qui détestent le régime, détesteraient encore plus l’intervention occidentale et s’uniraient contre les forces d’invasion – sans parler du fait que l’Iran a des liens économiques et stratégiques étroits avec la Russie et la Chine et que les deux soutiendraient l’effort de guerre de Téhéran. La guerre n’est pas seulement une ligne de conduite moralement répréhensible mais serait également désastreuse pour les intérêts américains. Washington ne perdra peut-être pas cette guerre, mais perdrait probablement la paix.

Cependant, si la guerre doit être évitée pendant ce mandat et les suivants, les traités entre Washington et Téhéran qui garantiraient la paix doivent être politiquement durables sur le long terme. Les futures administrations américaines ne doivent pas avoir de prétextes facilement accessibles pour annuler les accords et relancer les hostilités. Cela signifie principalement qu’il faudrait empêcher l’Iran de poursuivre ses guerres par procuration contre les intérêts et les alliés américains dans la région.

«L’Iran devrait cesser de financer tous les mandataires et groupes terroristes qui combattent les États-Unis au Moyen-Orient.»- Dr Azeem Ibrahim

Tout cela est vrai et le reconnaître doit être le fondement de tout effort de bonne foi pour reconstruire l’accord nucléaire. Mais l’Iran devrait également faire preuve de bonne  volonté et cesser de financer tous les mandataires et groupes terroristes qui combattent les États-Unis au Moyen-Orient. Si un accord doit être trouvé, il devra être engagé de bonne foi par les deux parties.

Un accord doit absolument être trouvé, puisque si tel n’est pas le cas, cela conduirait presque certainement à la guerre. Dans cette guerre, il n’y aura pas de vainqueurs – les États-Unis perdront leur statut, leur argent, leur pouvoir et la vie de soldats américains. Le régime iranien perdra des vies et des millions d’innocents pris au piège dans ce conflit souffriront et mourront inutilement. Nul ne peut se permettre de vivre ce scénario.

Le Dr Azeem Ibrahim est directeur du Center for Global Policy. Il est l’auteur de The Rohingyas: Inside Myanmar’s Genocide («Les Rohingyas: à l’intérieur du génocide de Birmanie»), publié aux éditions Hurst en 2017.

Twitter: @AzeemIbrahim 

 

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com