Chypre-Nord: victoire surprise du protégé d'Ankara face au "président" sortant

La participation s'est élevée à 67,29% (199.000 inscrits sur plus de 300.000 habitants (AFP)
La participation s'est élevée à 67,29% (199.000 inscrits sur plus de 300.000 habitants (AFP)
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Publié le Lundi 19 octobre 2020

Chypre-Nord: victoire surprise du protégé d'Ankara face au "président" sortant

  • Ersin Tatar élu dimanche "président" de l'autoproclamée République turque de Chypre-Nord (RTNC), un succès pour Ankara dans un contexte de vives tensions en Méditerranée orientale
  • Après sa victoire, M. Tatar, partisan d'une solution à deux Etats, s'est entretenu au téléphone avec M. Erdogan, selon la présidence turque

NICOSIE : Déjouant les pronostics, le candidat nationaliste Ersin Tatar, soutenu par la Turquie, a été élu dimanche "président" de l'autoproclamée République turque de Chypre-Nord (RTNC), un succès pour Ankara dans un contexte de vives tensions autour de ses projets en Méditerranée orientale.

Avec 51,69% des voix, M. Tatar supplante selon le Conseil électoral Mustafa Akinci, dirigeant sortant en froid avec le président turc Recep Tayyip Erdogan et partisan d'une réunification de l'île méditerranéenne sous la forme d'un Etat fédéral, augurant un changement radical des relations avec la partie sud de l'île.

Après sa victoire, M. Tatar, partisan d'une solution à deux Etats, s'est entretenu au téléphone avec M. Erdogan, selon la présidence turque.

Le président turc s'est dit convaincu que les deux hommes allaient "poursuivre avec la même détermination leur coopération harmonieuse (...) à commencer par les activités liées aux hydrocarbures en Méditerranée orientale et le développement de Chypre-Nord". 

M. Erdogan a en outre affirmé que "la Turquie et Chypre-Nord allaient poursuivre leurs efforts pour résoudre la question chypriote".

A Nicosie-Nord, des centaines de supporters de M. Tatar ont afflué, beaucoup sans masque, sur la place où étaient diffusés les résultats, à grand renfort de musique vantant les mérites de leur champion et brandissant des drapeaux turcs. M. Tatar, 60 ans, s'est accordé un bain de foule, serrant de nombreuses mains.

"Je remercie le peuple chypriote-turc qui m'a élu ce soir avec sa propre démocratie", a déclaré, triomphant, M. Tatar sur une scène, remerciant M. Erdogan tout en condamnant "ceux qui ont utilisé la Turquie comme argument électoral".

Il a appelé au rassemblement de la communauté chypriote-turque qui "mérite sa souveraineté".

M. Akinci a félicité son adversaire et "ceux qui ont contribué à ce résultat". "Vous savez ce qui est arrivé pendant cette élection", a-t-il déclaré en référence aux interventions turques, ajoutant ne pas vouloir "faire de politique là-dessus".

Ankara a rapidement salué la victoire de son protégé : "Nous allons travailler ensemble pour assurer la prospérité, le développement et la sécurité des Chypriotes-turcs", a tweeté le chef de la diplomatie turque Mevlüt Cavusoglu.

La participation s'est élevée à 67,29% (199.000 inscrits sur plus de 300.000 habitants), soit trois points de plus qu'en 2015, malgré la pandémie de Covid-19.

Interventions turques

L'élection s'est déroulée dans un contexte de vives tensions autour de l'exploitation d'hydrocarbures en Méditerranée orientale entre Ankara et Athènes, principale alliée de la République de Chypre -membre de l'Union européenne (UE) depuis 2004- qui exerce son autorité sur les deux tiers sud de l'île.

Après des forages réalisés au large de Chypre-Nord, le renvoi cette semaine d'un navire turc d'exploration dans des eaux revendiquées par la Grèce a réveillé la discorde et a entraîné une condamnation par les dirigeants de l'UE des "provocations" de la Turquie.

Considérant la RTCN comme une pièce majeure dans sa stratégie pour défendre ses intérêts en Méditerranée orientale, Ankara avait multiplié les coups de pouce à M. Tatar.

L'inauguration en grande pompe d'un aqueduc sous-marin entre Chypre-Nord et la Turquie et la réouverture partielle d'une ancienne station balnéaire abandonnée et bouclée par l'armée turque après la partition de l'île, avaient suscité des accusations d'ingérence de la Turquie et irrité de nombreux Chypriotes-turcs, M. Akinci en tête.

Jamais "égaux"

Mais afficher une position indépendante d'Ankara est difficile tant la RTCN est sous emprise économique turque depuis sa création en 1983, d'autant plus dans un contexte de crise.

Chypre a obtenu son indépendance du Royaume-Uni en 1960 mais les troupes turques ont envahi le nord de l'île en 1974 en réaction à un coup d'Etat visant à rattacher l'île à la Grèce.

Dans la partie sud de l'île, le parti communiste Akel a qualifié l'élection de M. Tatar de "développement négatif", appelant toutefois les Chypriotes-grecs à rester engagés à reprendre les négociations. De son côté, le parti socialiste a jugé que ce résultat "prouvait le rôle décisif d'Ankara dans les décisions des territoires occupés".

Les dernières négociations officielles ont échoué en 2017.

"Nous ne pouvons rien faire sans la Turquie, l'histoire a montré que les Chypriotes-grecs n'accepteront jamais que nous soyons égaux dans la République", relevait Dilek Ertug, agente immobilière de 60 ans, avant les résultats.

Signe des divisions au sein même des familles chypriotes-turques, son frère, Asaf Senol a lui condamné les "interventions de la Turquie" et soutient le fédéralisme. (AFP)


Canada: le suspect de l'attaque à la voiture-bélier qui a fait 11 morts inculpé

Le Premier ministre canadien Mark Carney s'est rendu dimanche à Vancouver, où il a assisté dimanche, des fleurs à la main, à une veillée religieuse organisée pour les victimes, selon le média CPAC. (AFP)
Le Premier ministre canadien Mark Carney s'est rendu dimanche à Vancouver, où il a assisté dimanche, des fleurs à la main, à une veillée religieuse organisée pour les victimes, selon le média CPAC. (AFP)
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  • L'homme présenté comme un habitant de Vancouver, qui a comparu devant un tribunal avant d'être remis en garde à vue, a agi délibérément et a des antécédents de troubles mentaux, selon la police
  • "Le parquet de Colombie-Britannique a inculpé Kai-Ji Adam Lo", le suspect âgé de 30 ans, "de huit chefs de meurtre", a déclaré la police dans un communiqué, ajoutant que d'autres inculpations étaient attendues

VANCOUVER: Le suspect d'une attaque à la voiture-bélier qui a tué 11 personnes et fait des dizaines de blessés lors d'un festival de la communauté philippine de Vancouver a été inculpé de meurtre, a annoncé dimanche la police.

"Le parquet de Colombie-Britannique a inculpé Kai-Ji Adam Lo", le suspect âgé de 30 ans, "de huit chefs de meurtre", a déclaré la police dans un communiqué, ajoutant que d'autres inculpations étaient attendues.

L'homme présenté comme un habitant de Vancouver, qui a comparu devant un tribunal avant d'être remis en garde à vue, a agi délibérément et a des antécédents de troubles mentaux, selon la police.

Aucun motif n'a été confirmé pour cette attaque survenue samedi soir dans la ville de Vancouver, dans l'ouest du pays, en pleine campagne électorale alors que les Canadiens sont appelés aux urnes lundi pour des élections législatives. La police a exclu cependant la piste terroriste.

Le Premier ministre canadien Mark Carney s'est rendu dimanche à Vancouver, où il a assisté dimanche, des fleurs à la main, à une veillée religieuse organisée pour les victimes, selon le média CPAC.

"La nuit dernière, des familles ont perdu une sœur, un frère, une mère, un père, un fils ou une fille", a-t-il déclaré. "Ces familles vivent le cauchemar de toutes les familles.

Le suspect a "un lourd passé d'interactions, avec la police et des soignants, liées à la santé mentale", a déclaré Steve Rai, un haut responsable de la police de Vancouver, lors d'une conférence de presse dimanche.

"Même si je ne peux pas m'exprimer à ce stade sur un possible mobile, je peux désormais dire, confiant, que les éléments de ce dossier ne nous mènent pas à penser qu'il s'agit d'un acte terroriste", a-t-il ajouté.

"Il y a désormais 11 décès confirmés, et nous pensons que des dizaines d'autres sont blessés, dont certains gravement", a poursuivi Steve Rai, prévenant que le nombre de morts pourrait augmenter.

"Il s'agit du jour le plus sombre de l'histoire de Vancouver", a-t-il estimé.

Des corps "écrasés" 

Peu après 20H00 locales samedi (03h00 GMT dimanche) selon la police, "un homme au volant d'un SUV Audi noir" a foncé à travers la foule dans le quartier Sunset on Fraser de la ville de la côte pacifique où des membres de la communauté philippine s'étaient rassemblés pour célébrer la journée Lapu-Lapu, qui commémore une victoire du XVIe siècle contre les explorateurs européens.

Abigail Andiso a raconté au Vancouver Sun qu'elle a entendu de grands bruits, puis des hurlements: "Il y avait des corps. Ils ont été écrasés. Certains étaient déjà morts sur place".

Des images partagées sur les réseaux sociaux et vérifiées par l'AFP montrent un véhicule, un SUV noir dont l'avant est très endommagé, arrêté dans une rue jonchée de débris avec des camions de restauration rapide tout autour.

Sheila Nocasa était sur place peu avant l'incident. Elle a dit à l'AFP être "sous le choc", "anéantie".

Des personnes sont venues dimanche déposer des fleurs pour rendre hommage aux victimes sur le site de l'attaque.

"C'est très traumatisant", a indiqué à l'AFP Mohamad Sariman, qui travaillait dans un food truck au festival Lapu Lapu et qui dit avoir entendu une "grosse détonation".

De nombreuses communautés asiatiques, notamment chinoise, indienne et philippine, vivent dans l'ouest du Canada, pour beaucoup autour de Vancouver, troisième agglomération du pays.

Dimanche, le roi Charles III, chef d'Etat du Canada, s'est dit "profondément attristé" par cette "terrible tragédie". Le président français Emmanuel Macron a dit sa "solidarité aux Canadiens et à la communauté philippine".

De son côté, le président des Philippines Ferdinand Marcos a déclaré dans un communiqué qu'il était "complètement bouleversé d'apprendre ce terrible incident".

"J'ai peur" 

"J'étais choqué" en apprenant la nouvelle, a déclaré dimanche matin à l'AFP Julie Dunbar, une retraitée de la capitale Ottawa. Elle rappelle tristement qu'il "est arrivé la même chose à Toronto" en 2018, quand un homme avait tué 11 personnes avec un van. "J'ai peur de la société dans laquelle on vit".

Ce drame fait monter la tension à quelques heures du scrutin, lundi. La campagne électorale a été dominée par la question de la guerre économique avec les Etats-Unis de Donald Trump et ses menaces d'annexion.

Le nouveau Premier ministre Mark Carney, qui se présente comme un rempart face au président américain, est donné favori par les sondages. Il a modifié le programme de son dernier jour de campagne en raison de l'attaque à Vancouver.


La Chine contredit Trump et dément tout appel récent avec Xi Jinping

Donald Trump a imposé des droits de douane de 145% sur la majorité des produits chinois entrant sur le territoire américain. Pékin a riposté en mettant en place ses propres surtaxes douanières de 125% sur les produits américains. (AFP)
Donald Trump a imposé des droits de douane de 145% sur la majorité des produits chinois entrant sur le territoire américain. Pékin a riposté en mettant en place ses propres surtaxes douanières de 125% sur les produits américains. (AFP)
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  • Dans un entretien publié vendredi par Time Magazine, le président américain a dit avoir parlé au téléphone avec Xi Jinping, sans toutefois préciser à quelle date, ni le contenu de la conversation
  • Donald Trump avait également affirmé au Time Magazine que des discussions étaient en cours avec la Chine pour tenter de parvenir à un accord, et laissé entendre que le processus pourrait aboutir dans les prochaines semaines

PEKIN: La Chine a assuré lundi qu'aucun appel téléphonique n'avait eu lieu dernièrement entre le président Xi Jinping et son homologue américain, contredisant les affirmations de Donald Trump qui dit avoir parlé avec le dirigeant chinois.

Les deux premières puissances économiques mondiales sont engagées dans une guerre commerciale, déclenchée par le locataire de la Maison Blanche.

Donald Trump a imposé des droits de douane de 145% sur la majorité des produits chinois entrant sur le territoire américain. Pékin a riposté en mettant en place ses propres surtaxes douanières de 125% sur les produits américains.

Dans un entretien publié vendredi par Time Magazine, le président américain a dit avoir parlé au téléphone avec Xi Jinping, sans toutefois préciser à quelle date, ni le contenu de la conversation.

"À ma connaissance, les deux chefs d'État n'ont pas eu de conversation téléphonique récemment", a indiqué lundi lors d'un point de presse régulier Guo Jiakun, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Donald Trump avait également affirmé au Time Magazine que des discussions étaient en cours avec la Chine pour tenter de parvenir à un accord, et laissé entendre que le processus pourrait aboutir dans les prochaines semaines.

"Je tiens à rappeler que la Chine et les États-Unis n'ont pas engagé de consultations ni de négociations concernant les droits de douane", lui a répondu lundi Guo Jiakun.

 


Trump demande la gratuité des canaux de Panama et de Suez pour les navires américains

Cette photo diffusée par l'autorité du canal de Panama le 30 août 2024, montre le porte-conteneurs MSC Marie, de 366 mètres de long et 51 mètres de large, transitant dans le canal de Panama à Panama. (AFP)
Cette photo diffusée par l'autorité du canal de Panama le 30 août 2024, montre le porte-conteneurs MSC Marie, de 366 mètres de long et 51 mètres de large, transitant dans le canal de Panama à Panama. (AFP)
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  • Après avoir répété, depuis des mois, sa volonté de prendre le contrôle du canal de Panama, le président américain vise désormais le canal de Suez, un autre axe de transport stratégique pour le commerce mondial.
  • « J'ai demandé au secrétaire d'État Marco Rubio de se saisir » de ce dossier, a-t-il ajouté. 

WASHINGTON : Donald Trump a demandé samedi que le passage des navires américains soit rendu gratuit sur les canaux de Panama et de Suez, et a chargé son chef de la diplomatie, Marco Rubio, de se saisir immédiatement de ce dossier.

Après avoir répété, depuis des mois, sa volonté de prendre le contrôle du canal de Panama, le président américain vise désormais le canal de Suez, un autre axe de transport stratégique pour le commerce mondial.

« Les navires américains, à la fois militaires et commerciaux, devraient être autorisés à transiter gratuitement via les canaux de Panama et de Suez. Ces canaux n'existeraient pas sans les États-Unis d'Amérique », a écrit Donald Trump sur son réseau Truth Social.

« J'ai demandé au secrétaire d'État Marco Rubio de se saisir » de ce dossier, a-t-il ajouté. 

Avant même de prendre ses fonctions le 20 janvier, Donald Trump avait fait monter la pression sur le Panama, menaçant de « reprendre » le canal construit par les États-Unis et inauguré en 1914, et resté sous souveraineté américaine jusqu'en 1999.

Le Panama avait récupéré le canal cette année-là, en vertu d'un accord conclu en 1977 avec le président Jimmy Carter. Les États-Unis et la Chine sont les deux principaux utilisateurs de ce lien stratégique, par lequel transite 5 % du commerce maritime mondial.

Début avril, Washington a obtenu l'autorisation du Panama de déployer des militaires américains autour de cette voie d'eau stratégique.

Le canal de Suez, contrôlé par l'Égypte depuis 1956, concentrait lui environ 10 % du commerce maritime mondial, jusqu'à ce que les rebelles houthis du Yémen commencent à lancer des attaques contre des navires, disant agir en « solidarité » avec les Palestiniens de la bande de Gaza.

Les États-Unis sont intervenus, avec d'autres pays, pour tenter de sécuriser cette route maritime.

Mais le trafic a chuté, réduisant drastiquement une source essentielle de devises étrangères pour Le Caire, plongé dans la pire crise économique de son histoire.