BEYROUTH: Des crépuscules envoûtants de l’Afrique aux tigres de l'Inde, des ours polaires de l'Arctique aux requins blancs de l’océan Austral, rares sont les animaux qui ont échappé à son œil de lynx. Michel Zoghzoghi parcourt le monde depuis plus de quinze ans afin d’immortaliser ce que la planète a (encore) de merveilleux à offrir. Il attire notre attention sur la beauté des espèces menacées. Dès l’annonce de ses expositions – qui ont lieu au Liban, en France, au Royaume-Uni et aux Émirats arabes unis –, les visiteurs se précipitent, enthousiastes, avides de découvrir d’autres «nations» que celles qu’ils connaissent.
Le photographe les invite à effectuer «un voyage à travers des royaumes menacés», comme l’indique le titre (Other nations: A Journey Through Threatened Kingdoms) de sa dernière exposition, qui a lieu à la galerie Dar el-Nimr, à Beyrouth, jusqu’au 16 avril 2022. L’événement porte un double message, car il a également pour but de collecter des fonds au profit du Cancer Support Fund de l'hôpital américain de Beyrouth pour aider les malades du cancer au Liban.
D’emblée, le visiteur est projeté dans la nature dans son état le plus brut; visuellement, tout n’est que beauté et harmonie. Le but de ce photographe animalier est clair: nous montrer l'équilibre parfait de la nature pour nous faire comprendre ce que nous sommes en train de perdre. Magnificence et vulnérabilité semblent être les clés de cette exposition.
«Je veux montrer combien les animaux prédateurs sont beaux et combien la nature dans laquelle ils vivent est extraordinaire. Mais mon but est aussi d’alerter sur le fait que toutes les espèces représentées ici sont en voie de disparition et que beaucoup sont au bord de l'extinction. J’aimerais que tous ceux qui regardent ces images ressentent le besoin de faire quelque chose à ce sujet», confie Michel Zoghzoghi à Arab News en français. «Aujourd’hui le développement incontrôlé des civilisations modernes a tout remis en question. L'homme est devenu le prédateur alpha, mais, contrairement aux autres prédateurs, il ne conserve pas l'équilibre: il le menace», ajoute-t-il.
Le titre de l’exposition s’inspire d’un texte de Henry Beston (1888-1968) un écrivain américain qui, après avoir aperçu dans le ciel le spectacle mystérieux d’un vol d’oiseaux synchronisé qui formait une constellation spontanée, s’est émerveillé de cette construction sans guide. Il écrit dans son livre The Outermost House («La Maison au bout du monde»): «Ils ne sont pas nos frères de lait, ils ne sont pas nos subordonnés; ce sont d'autres nations, prises avec nous dans le filet de la vie et du temps, compagnons de la splendeur et de la fatigue de la Terre.» Des mots qui résonnent depuis dans le travail de l’artiste.
«Cette exposition rassemble des photos prises pendant les douze dernières années. J’ai sillonné le Kenya, la Namibie, l’Afrique du Sud, le nord de la Norvège, les États-Unis, le Canada, Dubaï et le Brésil», précise Michel Zoghzoghi.
«Certes, les missions ne sont pas faciles», explique le photographe, qui doit passer de longues heures caché en attendant l’apparition d’un animal. Parfois, d’ailleurs, ces derniers ne sont pas au rendez-vous malgré sa préparation minutieuse. «Il m’est déjà arrivé de voyager sans réussir à photographier l’animal pour lequel je suis venu. Je me suis rendu à la frontière du Pakistan et de l’Inde pour immortaliser la panthère des neiges et je n’y suis pas parvenu. Je me souviens également d’avoir fait un voyage en Afrique du Sud pour voir des requins, et… zéro photo.»
Ses prochaines destinations? «Le Kenya, l’Amazonie, le nord du Canada et la frontière de l’Inde et du Pakistan, où je repars à la recherche de cette panthère des neiges que je ne désespère pas de trouver.» Et, pour ceux qui n’ont pas l’occasion de découvrir l’exposition, «un ouvrage est en cours d’élaboration», précise l’artiste.