Colonisation de l'Algérie: «la douleur silencieuse» des déportés en Nouvelle-Calédonie

Sur cette photo prise le 18 mai 2021, des cellules du bagne de Nouméa, en Nouvelle-Calédonie. (AFP)
Sur cette photo prise le 18 mai 2021, des cellules du bagne de Nouméa, en Nouvelle-Calédonie. (AFP)
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Publié le Mardi 12 avril 2022

Colonisation de l'Algérie: «la douleur silencieuse» des déportés en Nouvelle-Calédonie

  • «L'histoire de nos aïeux était un sujet tabou. La loi du silence régnait dans les familles de déportés», explique cet octogénaire, pilier de la «communauté arabe», les descendants d'Algériens
  • Ironie tragique: «de colonisés en Algérie, ils devinrent colonisateurs malgré eux. Sur des terres confisquées aux Kanaks», les autochtones, souligne M. Aïfa, figure de Bourail (ouest)

NOUMEA: Au 60e anniversaire de la fin de la guerre d'indépendance (1954-1962), des descendants d'Algériens déportés en Nouvelle-Calédonie pendant la phase de colonisation au XIXe siècle racontent la "douleur silencieuse" de leurs aïeuls, un épisode largement oublié.


De 1864 à 1897, au fil de l'avancée des troupes coloniales françaises, entrées en Algérie en 1830, plus de 2 100 Algériens jugés par des tribunaux spéciaux ou militaires furent déportés vers le bagne colonial de Nouméa, dans ce territoire français du Pacifique.


Les descendants des "chapeaux de paille" -- couvre-chef des bagnards -- témoignent avec émotion d'une histoire qu'il a fallu "aller chercher, presque leur extorquer".


"Ils arrivaient après un voyage de cinq mois, enchaînés dans les cales. Le nombre de morts, dont les corps furent jetés par-dessus bord pendant la traversée, reste inconnu", relate à l'AFP Taïeb Aïfa, 83 ans.


Son père faisait partie du dernier convoi de bagnards en 1898 et sa mère est la fille d'un des premiers déportés sur le "Caillou", surnom de la Calédonie.


"L'histoire de nos aïeux était un sujet tabou. La loi du silence régnait dans les familles de déportés", explique cet octogénaire, pilier de la "communauté arabe", les descendants d'Algériens. 

De colonisé à colonisateur 
"Nous les enfants des +chapeaux de paille+ étions traités de +bicots+" (insulte raciste, ndlr), se souvient Taïeb Aïfa, dont le père fut condamné à 25 ans de bagne pour avoir défendu ses terres à Sétif (est de l'Algérie) contre les militaires français.


Ironie tragique: "de colonisés en Algérie, ils devinrent colonisateurs malgré eux. Sur des terres confisquées aux Kanaks", les autochtones, souligne M. Aïfa, figure de Bourail (ouest).


"En Nouvelle-Calédonie, l'Etat français visait, comme en Algérie d'ailleurs, à créer une colonie de peuplement. Les déportés furent transformés en colons", relève pour l'AFP, Christophe Sand, archéologue à l'institut de recherche IRD de Nouméa et descendant de déporté.


Si les bagnards français purent ultérieurement ramener leurs femmes, c'était interdit aux Algériens qui se marièrent sur place.


Les condamnés à plus de huit ans de bagne -- la plupart d'entre eux -- n'avaient pas le droit de rentrer en Algérie après leur peine, souligne M. Sand. 


"D'après nos calculs, ce processus a dû abandonner en Algérie entre 3 000 et 5 000 +orphelins+", relève le chercheur. 


"Mon grand-père a laissé en Algérie deux enfants qu'il n'a plus jamais revus", confirme Maurice Sotirio, petit-fils de condamné de la région de Constantine (nord-est).


En Calédonie, c'étaient des citoyens de seconde zone, selon M. Sand, d'autant qu'ils ne parlaient souvent pas français, seulement arabe ou berbère.


Leurs enfants ont beaucoup souffert de cette stigmatisation et seules quelques familles ont sauvegardé fièrement leurs origines.  


A la fin des années 1960, les descendants se sont regroupés dans l'association des "Arabes et amis des Arabes de Nouvelle-Calédonie".


"J'ai été ouvrier à 17 ans et j'ai fait du syndicalisme. Maire pendant 30 ans, je signais des documents officiels en tant que Taïeb Aïfa, une revanche sur l'Histoire", témoigne celui qui fut surnommé le "Calife" quand il devint maire de Bourail en revendiquant "son algérianité". 

«Processus de guérison»
M. Aïfa se souvient de son premier voyage en Algérie en 2006, quand il a eu la sensation de "ramener symboliquement (son) père qui, comme les autres Arabes, avait souffert de ne pas pouvoir rentrer et mourir dans son pays natal". 


"Je revendique ma calédonitude. Mais, je suis aussi Algérien, j'ai un lien avec l'Algérie, de la famille, des terres...J'ai réussi à obtenir mes papiers algériens il y a 20 ans", dit-il fièrement.


Lorsque Christophe Sand s'est rendu en Algérie avec deux autres descendants de bagnards, il a eu "pendant tout le vol l'impression de porter (son) ancêtre sur les épaules". "Quand j'ai aperçu, à travers le hublot, le port d'Alger, où mon arrière-grand-père et ses compagnons avaient été jetés dans la cale, j'ai ressenti une douleur à hurler", dit-il.


Arrivé au village d'Agraradj, en Kabylie (est), dans sa maison natale, il a touché le sol: "j'ai eu le sentiment que le poids symbolique que j'avais sur les épaules depuis le début du voyage avait disparu. J'avais ramené son esprit exilé à l'endroit où il était né".


Pour M. Sand, il faut passer par "ce processus de guérison, de refermeture de la porte" pour "se construire un avenir en Nouvelle-Calédonie". "Guérir du traumatisme de l'exil permet aux Calédoniens que nous sommes aujourd'hui de se projeter dans l'avenir sans rester prisonniers du passé".


Trêve à Gaza : le médiateur qatari évoque une « fenêtre d'opportunité »

Cette image tirée d'une vidéo de l'AFPTV montre le porte-parole du ministère des Affaires étrangères du Qatar, Majed al-Ansari, s'exprimant lors d'une conférence de presse à Doha le 17 juin 2025. (Photo de Jacqueline PENNEY / AFPTV / AFP)
Cette image tirée d'une vidéo de l'AFPTV montre le porte-parole du ministère des Affaires étrangères du Qatar, Majed al-Ansari, s'exprimant lors d'une conférence de presse à Doha le 17 juin 2025. (Photo de Jacqueline PENNEY / AFPTV / AFP)
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  • Majed al-Ansari, porte-parole du ministère qatari des Affaires étrangères, a précisé que Doha et les autres médiateurs à Washington et au Caire veulent relancer les pourparlers sur Gaza.
  • M. Al-Ansari a expliqué qu'il n'y avait pas de cycle de négociations en cours entre les parties, mais que le Qatar était « fortement impliqué dans les discussions avec chaque partie séparément ».

DOHA : Le Qatar, pays médiateur entre Israël et le Hamas dans la guerre à Gaza, a évoqué une « fenêtre d'opportunité » créée par le cessez-le-feu entre l'Iran et Israël, en vue de parvenir à une trêve dans le territoire palestinien.

Dans un entretien accordé à l'AFP vendredi, Majed al-Ansari, porte-parole du ministère qatari des Affaires étrangères, a précisé que Doha et les autres médiateurs à Washington et au Caire s'efforcent à présent « d'utiliser l'élan créé par le cessez-le-feu entre l'Iran et Israël pour relancer les pourparlers sur Gaza ».

« Si nous ne profitons pas de cette fenêtre d'opportunité et de cet élan, ce sera une occasion perdue de plus dans un passé récent. Nous ne voulons pas que cela se reproduise », a déclaré le porte-parole, qui est également conseiller du Premier ministre du Qatar. 

Le président américain Donald Trump a assuré vendredi qu'un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza était « proche » et pourrait intervenir dès « la semaine prochaine » pour mettre fin à la guerre dévastatrice qui fait rage depuis plus de 20 mois dans ce territoire palestinien.

M. Al-Ansari a expliqué qu'il n'y avait pas de cycle de négociations en cours entre les parties, mais que le Qatar était « fortement impliqué dans les discussions avec chaque partie séparément ».

Les médiateurs sont engagés depuis des mois dans des négociations avec Israël et le Hamas pour mettre fin à ce conflit. 

« Nous avons vu la pression américaine et ce qu'elle peut accomplir », a déclaré M. Ansari en faisant référence à la trêve de janvier qui avait permis la libération de dizaines d'otages détenus par le Hamas en échange de centaines de prisonniers palestiniens.

Dans le contexte de l'intervention des États-Unis pour un cessez-le-feu entre Israël et l'Iran, il n'est pas « farfelu » selon lui de penser que les pressions exercées par Washington pourraient permettre d'obtenir une nouvelle trêve à Gaza.

« Nous travaillons très étroitement avec eux pour nous assurer que la communauté internationale, et en particulier les États-Unis, exercent la pression nécessaire pour que les deux parties s'assoient à la table des négociations », a déclaré M. Ansari. 

Concernant l'attaque iranienne contre une base militaire américaine située au Qatar lundi dernier, M. Ansari a déclaré que, tandis que les dirigeants du Qatar réfléchissaient à la réaction à apporter à cette attaque sur leur sol, le président américain avait téléphoné à l'émir du Qatar pour lui annoncer : « Il y a une possibilité de stabilité régionale (...) et Israël a accepté un cessez-le-feu. »

« Le Qatar aurait pu décider d'une escalade », a déclaré M. Ansari, avant d'ajouter : « Mais parce qu'il y avait une chance de paix, nous avons opté pour cette solution. »


Liban: une femme tuée et 11 blessés dans une frappe israélienne dans le sud

De la fumée s'élève après des frappes aériennes israéliennes près de Nabatieh, dans le sud du Liban, le 27 juin 2025. (AFP)
De la fumée s'élève après des frappes aériennes israéliennes près de Nabatieh, dans le sud du Liban, le 27 juin 2025. (AFP)
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  • L'armée israélienne bombarde régulièrement le Liban, surtout le sud frontalier d'Israël, en dépit d'un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre

BEYROUTH: Le ministère libanais de la Santé a indiqué qu'une femme avait été tuée et que 11 autres personnes avaient été blessées vendredi dans une frappe israélienne visant le sud du pays, malgré un cessez-le-feu entre Israël et le mouvement islamiste Hezbollah.

"Une femme a été tuée et 11 personnes blessées dans une frappe de l'ennemi israélien visant un appartement à Nabatiyé", selon un bilan provisoire du ministère, publié par l'agence de presse officielle libanaise Ani.

Israël a mené vendredi de nouveaux raids aériens sur le sud du Liban, malgré le cessez-le-feu en vigueur depuis sept mois, a indiqué un média d'Etat libanais, l'armée israélienne disant viser un site souterrain du Hezbollah que le mouvement pro-iranien tentait de "réhabiliter".

Des avions de chasse israéliens ont lancé une "violente offensive aérienne de grande ampleur", a rapporté l'agence de presse officielle libanaise, Ani, évoquant une série de raids sur plusieurs positions, au cours desquels des missiles ont été largués, provoquant des explosions assourdissantes.

"Des avions de chasse de l’armée de l’air israélienne ont frappé un site utilisé par l’organisation terroriste Hezbollah pour gérer son dispositif de tirs et de défense dans la région du Beaufort, dans le sud du Liban", a déclaré l'armée israélienne dans un communiqué.

Le site visé "fait partie d’un important projet souterrain qui avait été totalement mis hors service à la suite de frappes israéliennes", a ajouté l'armée israélienne, affirmant qu'elle "avait identifié des tentatives de réhabilitation entreprises par le Hezbollah, et a ciblé des infrastructures terroristes dans la zone".

"La présence de ce site et les tentatives de le réhabiliter constituent une violation flagrante des accords conclus entre Israël et le Liban", a estimé l'armée.

L'armée israélienne bombarde régulièrement le Liban, surtout le sud frontalier d'Israël, en dépit d'un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre pour mettre fin à plus d’un an d’hostilités, dont deux mois de guerre ouverte ayant fortement affaibli le Hezbollah.

Jeudi, deux personnes ont été tuées dans des frappes israéliennes sur le sud, où l'armée a dit avoir ciblé des membres du Hezbollah.

Mardi, le ministère de la Santé avait annoncé la mort de trois personnes dans une frappe israélienne ayant visé un véhicule dans le district de Nabatiyé, dans le sud.

L’armée israélienne avait alors affirmé avoir tué le directeur d’une société de change accusé de transférer des fonds pour le Hezbollah.


Gaza: l'OMS annonce avoir effectué sa première livraison de fournitures médicales depuis le 2 mars

Des volontaires de familles palestiniennes organisées en comités pour empêcher les vols, gardent des camions transportant de l'aide alors qu'ils entrent dans la bande de Gaza depuis le point de passage de Zikim contrôlé par Israël, à l'ouest de Beit Lahia dans le nord du territoire palestinien assiégé, le 25 juin 2025. (AFP)
Des volontaires de familles palestiniennes organisées en comités pour empêcher les vols, gardent des camions transportant de l'aide alors qu'ils entrent dans la bande de Gaza depuis le point de passage de Zikim contrôlé par Israël, à l'ouest de Beit Lahia dans le nord du territoire palestinien assiégé, le 25 juin 2025. (AFP)
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  • "Hier, l'OMS a livré sa première cargaison médicale à Gaza depuis le 2 mars - 9 camions transportant des fournitures médicales essentielles, 2.000 unités de sang et 1.500 unités de plasma", a indiqué jeudi le chef de l'Organisation mondiale de la santé
  • L'OMS appelle "à l'acheminement immédiat, sans entrave et durable de l'aide sanitaire à Gaza par toutes les voies possibles"

GENEVE: L'OMS a annoncé avoir effectué mercredi à Gaza sa première livraison de fournitures médicales depuis le 2 mars, date à laquelle Israël a imposé un blocus sur le territoire palestinien, partiellement allégé depuis le 19 mai.

"Hier, l'OMS a livré sa première cargaison médicale à Gaza depuis le 2 mars - 9 camions transportant des fournitures médicales essentielles, 2.000 unités de sang et 1.500 unités de plasma", a indiqué jeudi le chef de l'Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, sur le réseau social X.

"Ces fournitures médicales ne sont qu'une goutte d'eau dans l'océan. Une aide à grande échelle est essentielle pour sauver des vies", a-t-il ajouté.

L'OMS appelle "à l'acheminement immédiat, sans entrave et durable de l'aide sanitaire à Gaza par toutes les voies possibles".

"Les fournitures seront distribuées aux hôpitaux prioritaires dans les prochains jours. Le sang et le plasma ont été livrés à l'entrepôt frigorifique du complexe médical Nasser en vue d'être distribués aux hôpitaux confrontés à de graves pénuries", a expliqué M. Tedros.

Selon le chef de l'OMS, les fournitures médicales ont été transportées dans Gaza depuis le point de passage de Kerem Shalom, "sans aucun pillage, malgré les conditions à haut risque le long de la route".

Quatre camions de l'OMS sont toujours à Kerem Shalom et d'autres sont en route pour Gaza.

En riposte à l'attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre 2023 en Israël, le gouvernement israélien a juré de détruire le mouvement islamiste.

L'armée israélienne a lancé une offensive à Gaza qui a fait des dizaines de milliers de morts, déplacé la quasi-totalité des quelque 2,4 millions d'habitants et provoqué un désastre humanitaire.

Selon des ONG et l'ONU, les plus de deux millions de Gazaouis vivent dans des conditions proches de la famine en raison des restrictions imposées par Israël.

Des Palestiniens sont en outre tués quasi-quotidiennement en allant chercher l'aide humanitaire dans des sites de distribution, selon la Défense civile locale.