VILLEDIEU-SUR-INDRE: "Quand on me parle de ça, je m'agace": à la brocante de Villedieu-sur-Indre (Indre), les abstentionnistes balançaient dimanche entre colère et désintérêt pour un scrutin présidentiel qui ne les mobilise pas.
Ce dimanche de vote, vendeurs et chineurs ont choisi de le passer à déambuler entre les étals ensoleillés, avec en fond sonore le murmure du ruisseau qui passe près de l'église de cette commune de près de 3.000 habitants.
Devant son stand de vieux outils, Patrick Taillandier affiche clairement la couleur: il ne votera pas.
"Ce sont des bandits en col blanc. Je ne vais pas voter pour eux! Qu'ils soient de droite ou de gauche, ils ne crèvent pas de faim, eux", s'emporte-t-il, ne semblant pas franchement ravi d'aborder le sujet.
"Quand on me parle de ça, je m'agace", s'excuse-t-il ensuite.
Un peu plus loin, un brocanteur professionnel hésite. Lui a le sourire, debout devant sa fourgonnette blanche.
"Je suis ennuyé, je ne sais pas quoi faire. Vu les frais engagés aujourd'hui pour déballer, plus l'essence. Si je dois aller voter, il faudrait que je parte maintenant", explique Didier Le Gall.
"J'ai la carte d'électeur, c'est important d'aller voter, mais il faut bien vivre aussi", se justifie-t-il. "Je voudrais que les bureaux de vote ferment tous à 20H00. C'est ma revendication."
Avec sa poussette, Coline Baert, ambulancière, ne s'en cache pas, elle n'a "aucun intérêt pour le vote". "Ca ne change rien. Le changement, ce n'est pas maintenant", insiste-t-elle.
"Il y a un moment, j'y ai cru, mais plus maintenant. Depuis les attentats du Bataclan (ndlr en novembre 2015), je n'y crois plus. Je ne crois plus en cette France. Je ne crois plus dans les Français", regrette cette ancienne militaire.
«Tant pis»
Dans une allée, Anita, une fonctionnaire territoriale, se promène avec sa fille. Elle aussi fera partie des abstentionnistes.
"Je n'ai pas fait de procuration et je n'ai pas reçu ma carte d'électeur", déclare-t-elle. "Cela m'intéresse d'aller voter, mais je n'ai pas pris le temps de m'en occuper."
"Je vais me débrouiller pour aller voter au deuxième tour", assure la quinquagénaire derrière ses lunettes de soleil.
A quelques kilomètres de Villedieu-sur-Indre se trouve le parc naturel régional de la Brenne, le pays aux mille étangs, où une compétition est organisée par la fédération de pêche de l'Indre.
Sur le plan d'eau de Neuillay-les-Bois (Indre) règne un calme absolu. Seuls les chants des oiseaux et les discussions à voix basse des pêcheurs viennent troubler la quiétude.
Même si la compétition a été écourtée pour pouvoir permettre aux concurrents de rentrer chez eux voter, Alexis Cassagne, 22 ans, qui vient de réussir une belle prise, n'ira pas voter.
"Je n'ai pas eu le temps de m'occuper de la procuration", explique-t-il. "Ce matin, en me levant à 04H00, il fallait faire un choix. Je me suis dit +tant pis!+"
"Mais j'irai au deuxième tour", promet le jeune homme.
Contrairement à la légende, les pêcheurs à la ligne ne boudent pas toujours les urnes. "On va aller voter. On prend du bon temps avant les choses qui fâchent", estime Joe, quadragénaire, casquette de baseball vissée sur la tête.
En 2017, dans le département de l'Indre, l'abstention avait atteint 20,49%. Marine Le Pen était arrivée en tête avec 24,43% des voix devant Emmanuel Macron (20,85%) lors du premier tour.