CASABLANCA: Le retour de la tension entre l’Occident et la Russie est accueilli avec une relative froideur par les diplomaties du Maghreb et du monde arabe. Celles-ci craignent la reconstitution d’un monde bipolaire et son lot de contraintes que charriait la Guerre froide, entrainant, entre autres inconvénients, l’obligation de choisir un camp et un seul. Face aux sanctions financières occidentales imposées à la Russie, les différentes chancelleries de la région tentent de se frayer une troisième voie entre condamnations de principe et non alignement sur la pression exercée sur l’Ours russe.
En guise de sanctions financières après l’invasion de l’Ukraine, l’essentiel du système financier russe a été exclu du réseau de messagerie Swift à l’instar de ce qui a été exigé du régime iranien durant la dernière décennie.
Allons au-delà de cet acronyme pour évaluer l’ampleur du bannissement de la Russie de la finance mondiale, au moment où, selon nos confrères de l’AFP, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, a enjoint à de nouvelles sanctions immédiates du G7 contre Moscou, notamment la déconnexion, cette fois-ci, totale, des banques russes de la plateforme financière internationale.
Les pays trop modérés dans les mesures prises contre la Russie de Vladimir Poutine ont été mis à l’index par le président ukrainien.
Volodymyr Zelensky a rappelé, ce mercredi, les ambassadeurs d'Ukraine au Maroc et en Géorgie, jugeant qu'ils n'étaient pas assez «efficaces»
Світ уже бачив багато воєнних злочинів. У різні часи. На різних континентах. Але настав час зробити все, щоб воєнні злочини російських військових стали останнім проявом такого зла на землі. Кожен винний у таких злочинах буде внесений у спеціальну Книгу катів. Буде знайдений і покараний.
Posted by Володимир Зеленський on Sunday, April 3, 2022
Que cache l’acronyme Swift ?
Il s’agit d’une entreprise privée belge, Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication. Celle-ci propose aux différentes institutions financières un système de messagerie instantanée. Plus de 11000 établissements, essentiellement des banques réparties de plus de 200 pays, y échangent, pas moins de, 40 millions de messages chaque 24 h.
C’est une antienne, la finance repose sur la confiance. Dans ce système, les informations envoyées ne sont pas annulées. Si une institution financière se dédit cela se répercute sur sa crédibilité. Lorsqu'un virement passe par la messagerie, il est effectué avec grande célérité, en moins de trente minutes.
Swift est, en ce sens, comparable à registre de comptes où l’on trouve trace de qui a viré des fonds, quand et, surtout, à qui. Contrairement au message martelé en cœur en Occident, cela signifie qu’en être exclu ne revient, nullement, à sortir du système financier. Pour autant, les opérations qui ne transitent pas par ce système sont extrêmement ralenties. Swift domine, en effet, le marché mondial, cependant des concurrents existent bel et bien, pour ne citer que le chinois Cips, qui met en lien plus de 1000 banques dans une centaine de pays.
Impact
Les experts sont loin d’être unanimes sur l’évaluation des conséquences des sanctions sur l’économie russe. Le FMI, certains économistes qui se sont exprimés sur la question estiment que l’ensemble des sanctions pourrait faire chuter le PIB russe de 1 à 5 points. Eric Heyer, économiste à l'OFCE, interrogé par nos confrères de franceinfo, évalue cet impact à une baisse de 2,5 points de PIB. La banque d’investissement JP Morgan anticipe une récession d’environ 7 %. Le rouble a vu sa valeur chuter, alors que dans le même temps, des fonds de pension spéculent sur un possible défaut paiement de la Russie. Pourtant, le pétrole est toujours le nerf de la guerre. Selon le cabinet Rystad Energy, les pays ayant annoncé, tambour battant, des sanctions contre Moscou, ont importé à hauteur de 200 milliards de dollars d'hydrocarbures russes par an, contre 25 milliards pour le reste du monde, exclusion faite de la Chine.
Tourisme, gaz et blé pèsent de leur poids sur la balance diplomatique
Après l’exclusion de la Russie de SWIFT les échanges économiques et touristiques sont voués à se complexifier. L’industrie du tourisme qui soigne, à peine, ses plaies après la crise pandémique, se prépare à faire l’impasse sur les touristes russes. Sont concernés en premier chef : la Tunisie, le Maroc, et l’Égypte.
Le premier client d’armements russes en Afrique, l’Algérie, essaye de se tenir à bonne distance du conflit, tout en essayant de présenter une alternative crédible au gaz russe pour les européens.
L’approvisionnement en blé engage la sécurité intérieure des pays arabes, en particulier du Maghreb. Le prix de la tonne de céréales est surveillé comme le lait sur le feu au niveau des marchés internationaux.
Si aucune évaluation définitive du ralentissement de l'économie russe suite aux sanctions n'est établie, l'exclusion de SWIFT peut, à tout le moins, couter cher à la kleptocratie qui entoure de Vladimir Poutine dans l'un des pays où les écarts de revenus sont les plus importants. Le centile qui a le patrimoine le plus florissant possède près de 60% des richesses du pays selon le rapport annuel du crédit suisse.