MADRID: Paris et Madrid se sont dits "préoccupés" lundi par les retards pris par le projet de Système de combat aérien du futur (SCAF), jugé primordial pour la coopération européenne de défense, mais bloqué par des rivalités entre Airbus et Dassault.
"Il existe de la part du gouvernement espagnol une préoccupation" vis-à-vis des "retards" subis par ce programme, a déclaré la ministre espagnole de la Défense, Margarita Robles, à l'issue d'une rencontre à Madrid avec son homologue française Florence Parly.
"Je fais donc un appel à la responsabilité des différentes entreprises" engagées dans le projet, pour qu'elles "parviennent à un accord" sur leurs "problèmes industriels", a ajouté Mme Robles, en assurant que la France "partageait" cette préoccupation.
Une inquiétude confirmée par Mme Parly, qui a jugé "urgent" que le programme avance. "Nous sommes évidemment très désireux que le programme puisse se dérouler conformément au calendrier. Or, aujourd'hui, nous avons besoin de franchir une étape", a-t-elle expliqué.
Le projet SCAF, lancé en 2017 par la France et l'Allemagne, rejoints depuis par l'Espagne, vise à remplacer à l'horizon 2040 les avions de combat Rafale français et les Eurofighter allemands et espagnols par un avion de combat européen.
Un pas a été franchi à l'été 2021 avec un accord intergouvernemental prévoyant 3,6 milliards d'euros de financement pour des études détaillées, visant à lancer en 2025 la construction d'un démonstrateur en vol (phase 1B), sorte de pré-prototype du futur avion.
Mais depuis, le projet patine, en raison de tensions entre Dassault, maître d'oeuvre de l'avion, et son partenaire Airbus, qui représente les intérêts de Berlin et Madrid. Si bien que les contrats permettant d'engager la phase 1B n'ont toujours pas été notifiés.
"Les industriels se sont mis d'accord pour atteindre cette étape (phase 1B, NDLR), qui va nous permettre de disposer d'un démonstrateur de vol. Donc j'estime qu'il est urgent que cette phase (...) puisse être rapidement lancée", a insisté lundi Florence Parly.
"La France et l'Espagne accordent une importance cruciale au bon déroulement de ce programme et nous ne pensons pas qu'il soit de bonne politique que des sujets de désaccord industriel, qui n'auront d'application que d'ici plusieurs années, prennent en quelque sorte en otage une phase de développement qui est prête à démarrer", a-t-elle ajouté.
Un message relayé par Margarita Robles, qui rappelle que l'Espagne "a fait des investissements importants" dans des "programmes de défense européens". "Nous avons beaucoup" d'intérêts "en jeu", a-t-elle prévenu.