LONDRES: De la Russie à l'Argentine, en passant par le Japon, la France ou Cuba, des stars internationales du ballet ont offert samedi à Londres un grand gala humanitaire pour l'Ukraine et envoyer un message de paix.
Le drapeau jaune et bleu de l'Ukraine flottait à l'extérieur du London Coliseum, siège de l'English National Opera où la collecte de fonds a dépassé les espérances des organisateurs, avec 140 000 livres sterling (166 000 euros environ) récoltés entre les dons et le prix des places, avant même le début de la soirée.
La soirée, ouverte au son de l'hymne ukrainien, s'est achevée sur "Le triomphe de l'amour" tiré d'un ballet du compositeur russe Alexandre Glazounov.
L'argent ira au profit du Disasters Emergency Committee (DEC), coalition d'associations humanitaires britanniques ayant déjà levé quelque 200 millions de livres pour l'Ukraine.
"S'il vous plaît, continuez votre soutien", a prié le danseur et producteur ukrainien Ivan Putrov, coordinateur de la représentation, donnée à guichet fermé.
L'ambassadeur ukrainien à Londres Vadym Prystaiko a été ovationné tandis qu'Ivan Putrov et sa complice pour l'organisation, la danseuse roumaine Alina Cojacaru, ont exalté l'importance d'un tel spectacle, "pour la démocratie, pour défendre la liberté et les valeurs humaines".
"En tant qu'artistes, nous avons du talent et nous devons l'utiliser pour dire ce en quoi nous croyons. L'art a une voix et c'est la voix que nous utilisons", avait auparavant confié à l'AFP Ivan Putrov.
L'Ukrainien fut danseur principal du prestigieux Royal Ballet de Londres de 2002 à 2010. Aujourd'hui, alors qu'il voit son pays détruit par la guerre, l'enjeu pour lui et Alina Cojocaru, formée comme lui à Kiev où ils ont toujours des amis et des proches, était de mobiliser le monde du ballet pour un "appel humanitaire".
"Ce qui se passe est horrible", explique Ivan Putrov qui a réuni un casting d'exception pour "lever des fonds qui sauveront des vies" et "envoyer un message non seulement à l'Occident (...) mais aussi aux Russes, dont certains nous entendront et élèveront la voix".
Parmi les étoiles de la soirée, la Russe Natalia Osipova, l'Argentine Marianela Núñez et la Japonaise Fumi Kaneko, issues du Royal Ballet et le Français Mathieu Ganio de l'Opéra de Paris.
L'Ukrainienne Katja Khaniukova, l'Espagnole Katja Khaniukova et l'Américaine Emma Hawes (English National Ballet) étaient aussi sur scène.
«Devoir humanitaire»
"L'art est-il approprié dans des circonstances si horribles? Bien sûr qu'il l'est, parce qu'il donne de l'espoir, de l'inspiration aux gens", assure Ivan Putrov.
Le gala a mis à l'honneur plusieurs compositeurs russes, outre Glazounov, comme Tchaïkovski et Rachmaninov, parce que "la culture russe n'a rien à voir avec (le président russe Vladimir) Poutine, et Poutine n'a rien avoir avec la culture russe", insiste le danseur ukrainien.
"Et la danse est si intégrée depuis des siècles qu'on ne peut pas vraiment l'attribuer à une nation en particulier. C'est donc vraiment un message d'unité", ajoute-t-il.
Parmi les artistes répondant à l'appel, la danseuse russe Natalia Osipova, célèbre dans son pays, a refusé toute interview.
Le Cubain Javier Torres, du Northern Balle a dansé une version masculine de "La mort du cygne" de Camille Saint-Saens.
L'oeuvre qui met en scène un paraplégique perdant un membre "représente la lutte pour ce qu'on a perdu", explique Javier Torres à l'AFP.
"Elle parle de se battre jusqu'au bout", ajoute-t-il, évoquant les "gens qui tentent de résister contre ce qui leur arrive", comme les Cubains souffrant depuis des décennies des sanctions américaines ou les Ukrainiens plongés dans la guerre.
Participer au gala est pour Javier Torres "un devoir humanitaire (...) d'abord en tant que personne et ensuite en tant qu'artiste".