PARIS: Après Son oeil dans ma main, de Raymond Depardon et Kamel Daoud, inaugurée en février dernier, l’Institut du monde arabe (IMA) poursuit sa mise en lumière de l’Algérie avec l’ouverture au public aujourd’hui (et gratuitement ce 18 mars) de l’exposition Algérie mon amour, 36 oeuvres de 18 artistes issus de la collection donnée par Claude et France Lemand.
« Les artistes arabes sont passionnants, merveilleux, en particulier les artistes algériens » explique Claude Lemand lors du vernissage presse de l’exposition. « J’ai connu les artistes algériens à partir de 1986-1987, à travers l’artiste Abdallah Benateur, à qui j’ai commencé à acheter beaucoup d’oeuvres », explique le collectionneur d’origine libanaise, à l’époque professeur d’université en Egypte. « Mais où trouver ces grands artistes algériens en 1988-1989 ? Ils étaient tous en Algérie et le régime algérien était presque un système soviétisé, qui ne soutenait pas du tout les artistes. Il n’y avait aucun marché de l’art. »
C’est seulement il y a une dizaine d’années, que l’amateur d’art, dont la collection s’étoffait d’oeuvres d’artistes libanais, irakiens, syriens, égyptiens, soudanais, marocains, se rend compte qu’il n’a pas ou peu d’œuvres algériennes, « C’est là que j’ai fait l’effort d’aller contacter ces artistes de trois générations. » A présent, il privilégie dans ses dernières acquisitions les artistes femmes de la nouvelle génération.
La collection du musée de l’IMA comprend aujourd’hui 600 oeuvres d’artistes algériens, soit le quart de sa collection d’art moderne et contemporain.
Une partie de cette collection est exposée jusqu'au 31 juillet à l'IMA. Cette exposition montre « la pluralité des expressions artistiques des artistes in situ et de la diaspora algérienne » estime l’historienne d'art Emilie Goudal, mais aussi et surtout des « oeuvres d’artistes mésestimés dans l’art tel que présenté aujourd’hui dans les musées, qui nous permet d’aborder des artistes qu’on voit peu à Paris », notamment de Mohamed Khadda, peintre et graveur né en 1930 à Mostaganem.
Pour la chercheuse associée au Ceac de l’Université de Lille, il est plus que temps de redonner aux artistes algériens la place qu’ils méritent, 60 ans après l’indépendance de l’Algérie, arrachée dans le sang: « Se dire qu’on peut exposer sereinement ces artistes tout en ne mettant pas sous le tapis les rapports de force de leur présence en France sur les cimaises et la relation au passé colonial français, c’est un signe fort que les choses avancent. »