MONTRÉAL: Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 494 438 morts, 26 727 victimes femmes, 27 126 victimes enfants, 5,6 millions de réfugiés, et pas moins de 6 millions de Syriens de plus déplacés à l’intérieur de leur pays ravagé. Des milliers de manifestants syriens antirégime ont manifesté ce mardi à Idlib et dans d'autres villes du nord-ouest de la Syrie pour marquer le 11e anniversaire du début du soulèvement.
Pour l’occasion, la France, l'Allemagne, l'Italie, les États-Unis et le Royaume-Uni ont publié une déclaration conjointe, dans laquelle ils réitèrent leur soutien au peuple syrien et mettent en lumière «le caractère brutal et destructeur des agissements de la Russie», soutenue ouvertement par le régime de Bachar el-Assad, dans ce conflit qui coïncide cette année avec la terrible invasion de l'Ukraine par les troupes russes.
«Après avoir causé pendant onze années tant de morts et de souffrances, il est plus que temps pour le régime syrien et ses soutiens, notamment la Russie et l’Iran, de mettre un terme à leurs attaques sans pitié contre la population syrienne», précise la déclaration.
À l'heure où le conflit en Syrie entre dans sa onzième année, ils rappellent les besoins humanitaires du pays qui sont toujours aussi criants et la nécessité de vaincre Daech.
«La situation économique et humanitaire est sombre et les millions de réfugiés syriens, généreusement accueillis par les pays voisins, ainsi que les personnes déplacées à l’intérieur de la Syrie, qui ne peuvent toujours pas rentrer chez eux conformément aux standards des Nations unies, sans craindre les violences, les arrestations arbitraires et la torture. L’enlisement du conflit a également fourni aux groupes terroristes, notamment Daech, un terrain à exploiter. Prévenir la résurgence de Daech demeure une priorité», affirme le communiqué commun.
Les dirigeants ont appelé à «un cessez-le-feu à l’échelle de tout le pays, au respect du droit international humanitaire et à l’acheminement sans entrave de l’aide par tous les moyens». Les cinq pays ont d'autre part déclaré «ne pas soutenir les efforts de normalisation» entrepris par certains pays avec Damas, prévenant qu'ils ne lèveront pas les sanctions sans «progrès irréversibles vers une solution politique» en Syrie.
Soumise à des pressions de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et malgré le manque de coopération de la Syrie, ils resteront pleinement mobilisés pour faire face à la menace que constituent les armes chimiques. «Les responsables de ces violations de la norme internationale d’interdiction d’utilisation des armes chimiques doivent rendre des comptes», soutiennent-ils.
«Nous avons oublié nos blessures»
Galvanisés par le tollé général que suscite l'invasion russe en Ukraine, nombre de manifestants de la région d’Idlib espèrent que la guerre lancée par Moscou suscitera un nouvel intérêt pour leur cause.
«Cela fait onze ans que la révolution syrienne a débuté, mais aujourd'hui, c'est comme si c'était le premier jour», a témoigné à l'AFP Salwa Abdelrahmane, présente dans la foule de manifestants. Certains d’entre eux brandissaient des drapeaux ukrainiens ou des pancartes avec des messages exigeant une intervention contre le président russe.
«Nous avons oublié nos blessures, les déplacements forcés, les massacres et les arrestations. Nous avons renouvelé notre promesse de poursuivre notre révolution», a ajouté la manifestante de 49 ans, appelant les Ukrainiens à continuer de résister. «Mon message au peuple ukrainien est de ne pas abandonner!»
Tactiques de guerre
«Fortifiez vos hôpitaux avec des blocs de ciment, l'ennemi Poutine ne fait pas de distinction entre civils, blessés et combattants», recommande Ali Hamouch, médecin dans un hôpital d'Idlib, solidaire avec les Ukrainiens.
Au cours du conflit syrien, l'aviation russe a ciblé à plusieurs reprises des hôpitaux, selon des témoins, des médecins et des ONG. En Ukraine la semaine dernière, un hôpital pédiatrique a été touché par une frappe supposément russe dans la ville assiégée de Marioupol, suscitant un tollé et des accusations de crimes de guerre à l'encontre de Vladimir Poutine.
Les tactiques de guerre adoptées en Ukraine ressemblent à celles éprouvées par Moscou en Syrie, où les Russes ont testé la plupart de leurs armes. Par ailleurs, Moscou recrute actuellement des milliers de combattants en Syrie, de l'armée régulière et des milices, pour les déployer en Ukraine.
Alors que le conflit entame sa douzième année, le secrétaire général de l'ONG Norwegian Refugee Council (NRC), Jan Egeland, a exhorté la communauté internationale à ne pas oublier la Syrie. «Alors que nous constatons avec choc et horreur ce qui se passe en Ukraine, cela nous rappelle les souffrances intenses endurées par la population syrienne, qui continuent de s’aggraver», a-t-il déclaré.
(Avec AFP)