BEYROUTH: L'organisation Etat islamique (EI) a confirmé jeudi la mort de son chef Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi, un peu plus d'un mois après l'annonce de son décès par les Etats-Unis dans une opération en Syrie, et nommé son successeur.
Les djihadistes de l'EI ont "prêté allégeance à Abou Hassan al-Hachimi al-Qourachi, l'émir des croyants et calife des musulmans," a déclaré le porte-parole du groupe, Abou Omar al-Mouhajir, dans un enregistrement audio publié sur Telegram.
Les décès de l'ancien chef de l'EI ainsi que de son précédent porte-parole sont également confirmés dans l'enregistrement.
"Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi et le porte-parole officiel de l'Etat islamique (...) Abou Hamza al-Qourachi ont été tués récemment", a ajouté le nouveau porte-parole.
L'ancien chef de l'EI s'était fait exploser au cours d'une opération des forces spéciales américaines dans le nord-ouest de la Syrie, une région sous le contrôle de djihadistes, a déclaré le président américain Joe Biden le 3 février dernier.
Qourachi, originaire de Tal Afar, à 70 kilomètres à l'ouest de Mossoul en Irak, avait pris fin octobre 2019 la tête du groupe après l'élimination de son prédécesseur Abou Bakr al-Baghdadi le même mois.
«Inconnu»
Le nouveau chef de l'organisation radicale sunnite, le troisième du groupe depuis sa création, a jusqu'ici peu fait parler de lui et le communiqué du groupe ne donne pas plus de détails sur son identité.
"Nous ne connaissons tout simplement pas son identité", a déclaré à l'AFP Tore Hamming, chercheur au King's College de Londres spécialisé dans l'étude des mouvements djihadistes.
Selon Colin Clarke, directeur de recherche au Soufan Center, un think-tank basé à New-York, l'EI a choisi "un inconnu car le banc s'est considérablement aminci".
Mais, il ajoute que "le nouvel émir doit être quelqu'un qui peut redonner un élan (...) au groupe".
L'EI a assuré dans son communiqué que la nomination d'Abou Hassan al-Qourachi en tant que successeur avait été approuvée par Abou Ibrahim avant sa mort, et sa nomination a été confirmée par les dirigeants du groupe.
D'après Damien Ferré, fondateur de l'agence Jihad Analytics, spécialisée dans l'analyse du jihad mondial et dans le cyberespace, le prédécesseur d'Abou Ibrahim avait fait de même.
"Baghdadi avait proposé au Conseil de la Choura (assemblée consultative) qu’Abou Hamza soit son successeur et le Conseil avait entériné ce choix-là", a expliqué M. Ferré à l’AFP.
"Je pense que c’est la même chose qui s’est passé et que ce choix a été fait tôt pour éviter d’avoir une déstabilisation trop forte du groupe," a-t-il ajouté.
Le nouveau chef prend les rênes de l'EI au moment où le groupe est affaibli par des offensives successives soutenues par les États-Unis pour contrecarrer une résurgence djihadiste.
«Présence clandestine»
Après une montée en puissance fulgurante en 2014 en Irak et en Syrie voisine et la conquête de vastes territoires, l'EI a vu son "califat" autoproclamé vaciller sous le coup d'offensives successives dans ces deux pays.
Les Forces démocratiques syriennes, dominées par les Kurdes et soutenues par la coalition internationale, avaient vaincu en 2019 l'EI en Syrie en le chassant de son dernier fief de Baghouz dans la province de Deir Ezzor (est).
Mais l'Etat islamique "maintient une présence largement clandestine en Irak et en Syrie et mène une insurrection soutenue de part et d'autre de la frontière entre les deux pays", selon un rapport de l'ONU publié l'an dernier.
Dans ces deux pays, l'organisation djihadiste conserverait "en tout 10.000 combattants actifs", d'après ce rapport.
L'élimination d'Abou Ibrahim al-Qourachi en février est intervenue quelques jours après la fin d'un assaut de l'EI contre une prison tenue par les FDS dans la région de Hassaké (nord-est) fin janvier
Plus de 370 personnes ont été tuées dans cette offensive, la plus importante du groupe djihadiste depuis sa défaite territoriale en Syrie en 2019, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).
La guerre complexe en Syrie, pays morcelé où interviennent différents protagonistes, a fait environ 500.000 morts depuis 2011, d'après l'OSDH.