Under The Abaya propose aux Saoudiennes de raconter leur propre histoire

Marriam Zahid photographiée par Lina Qummosani.
Marriam Zahid photographiée par Lina Qummosani.
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Publié le Mercredi 09 mars 2022

Under The Abaya propose aux Saoudiennes de raconter leur propre histoire

  • Marriam Mossalli explique que son livre est un tremplin pour aider la future génération de jeunes filles à s'élancer vers les plus hauts horizons
  • Elle organise une croisière de quatre jours, «la plus grande conférence flottante sur l'autonomisation des femmes en Arabie saoudite»

DJEDDAH: Marriam Mossalli est une femme aux multiples casquettes – ou abayas. Elle est à la fois entrepreneuse, mère, directrice et instigatrice autoproclamée.

La mission de Marriam Mossalli est de présenter des Saoudiennes dynamiques au-delà de leur vêtement  tout en célébrant leur style.

Cette année, Mme Mossalli célèbre le cinquième anniversaire de son livre Under The Abaya: Street Style From Saudi Arabia («Sous l’abaya: Style de rue d’Arabie saoudite»), qui reflète la diversité de la mode dans le Royaume et les Saoudiennes qui la représentent.

Pendant longtemps, les Saoudiennes sont restées cachées derrière un écran dans le monde numérique et derrière un voile dans le monde physique.

Lorsqu'elle a rassemblé les photographies destinées à la première édition de Under The Abaya, Marriam Mossalli a constaté que de nombreuses Saoudiennes étaient prêtes à participer, mais hésitaient à révéler leur identité. Elle se souvient qu'elles voulaient «recadrer leur visage ou ne montrer que certaines parties de leur corps».

Ce n'est qu'un an plus tard, après le succès de la première édition, qu'elle a pu observer le nombre important de femmes qui non seulement proposaient fièrement des photos révélant leur visage, mais qui insistaient pour qu'elle publie leur nom complet, en plus de leurs identifiants Instagram et Twitter.

EN BREF

  • La mission de Marriam Mossalli est de présenter des Saoudiennes dynamiques au-delà du vêtement qu'elles portent  tout en célébrant leur style.
  • Seulement un an plus tard, après le succès de la première édition, elle a constaté le nombre important de femmes qui non seulement proposaient fièrement des photos révélant leur visage, mais qui insistaient pour qu'elle publie leur nom complet, en plus de leurs identifiants Instagram et Twitter.
  • L'ambassadrice officielle de l'Arabie saoudite aux États-Unis, la princesse Reema bent Bandar, a signé la préface de ce livre, mais Marriam Mossalli a déclaré à Arab News «qu’elle ne s'arrêtera pas là».
  • Après une année tumultueuse passée dans l’ombre de la pandémie de Covid-19, la femme «sous l'abaya» a décidé de célébrer la Journée internationale de la femme en témoignant du chemin parcouru par la communauté.
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Sarah al-Maddah photographiée par Osamah al-Shubbar.

Les Saoudiennes ont commencé à prendre le contrôle de leurs propres histoires. Non seulement les femmes étaient déjà légalement libres de conduire, mais elles étaient également responsables de la façon dont leurs histoires étaient racontées.

Cette dernière édition, sortie en 2020, a été publiée avec un contenu identique, mais avec trois couvertures différentes: l'une célébrant Al-Khobar, une autre Riyad, et bien sûr, la ville natale de Mme Mossalli, Djeddah. Pour plaisanter, elle a suggéré de publier cinq versions la prochaine fois, pour ne pas oublier le nord et le sud.

Marriam Mossalli n'en est pas à sa première expérience dans les médias traditionnels. Dix ans auparavant, elle a créé la rubrique «Life & Style» d’Arab News, et elle a ensuite fait la transition vers l'espace numérique avec son compte Instagram très populaire et la création de son agence de conseil en luxe Niche Arabia.

«Il s’agit de montrer au monde que l'abaya n'est jamais synonyme d'oppression, mais que c’est un vêtement qui exprime notre fierté et notre identité nationale. Nous sommes fiers de la porter.» - Marriam Mossalli

 

Malgré toutes ses activités, Marriam Mossalli affirme rester attachée au papier imprimé. Ses livres ne constituent pas uniquement des archives indispensables du style de rue saoudien et de son évolution, mais ils offrent un morceau d'Histoire  ou de son histoire  qui occupe un espace dans une maison.

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Marriam Mossalli

Mme Mossalli est consciente que chaque Saoudienne dans le monde, ou sur son fil Instagram, est automatiquement une ambassadrice officieuse de l'Arabie saoudite «parce que les gens ne savent tout simplement pas qui nous sommes». Dans ce livre, elle nous laisse voir, en plus de raconter.

L'ambassadrice officielle de l'Arabie saoudite aux États-Unis, la princesse Reema bent Bandar, a signé la préface de ce livre, mais Marriam Mossalli a déclaré à Arab News «qu’elle ne s'arrêtera pas là». 

en bref

Marriam Mossalli entend normaliser le fait que les femmes soient responsables de la façon dont leur histoire est racontée.

«Le prochain livre, je veux qu'il porte sur cette force motrice que sont les Saoudiennes audacieuses et sûres d'elles-mêmes. Ce sont elles qui poussent à normaliser la participation des Saoudiennes. Parce que, encore une fois, je déteste cette idée de première et unique fois, elle doit être normalisée. Nous devons commencer à nous dire soyons les meilleures, ne soyons pas seulement les premières”», déclare Mme Mossalli à Arab News.

Après une année tumultueuse passée dans l’ombre de la pandémie de Covid-19, la femme «sous l’abaya» a décidé de célébrer la Journée internationale de la femme en témoignant du chemin parcouru par la communauté. 

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Noha Sindi photographiée par Basmah al-Halees. (Photo fournie)

Marriam Mossalli indique en avoir assez d'entendre les Occidentaux ressasser des histoires d'antan sur les femmes qui ne peuvent pas conduire et qui se préoccupent de couvrir suffisamment leurs cheveux ou leur visage.

Alors, non seulement elle s'est lancée dans l’aventure, mais elle a également décidé de prendre la mer. À l'occasion de la Journée internationale de la femme, Mme Mossalli organise une croisière de quatre jours, qui fera l'aller-retour entre Djeddah et la Jordanie. Elle souligne qu'il s'agit de «la plus grande conférence flottante sur l'autonomisation des femmes en Arabie saoudite».

«L'idée était, premièrement, de mettre en avant ces femmes  leurs métiers et leurs rôles  et de montrer cette diversité. Ensuite, il s'agissait de disposer d’une plate-forme où nous pouvons nous célébrer les unes les autres et constater simplement le chemin parcouru. Ce n'est que le début pour les Saoudiennes», précise Marriam Mossalli.

Avec le hashtag de la croisière «Under The Abaya» en croissance sur Instagram et la présence de nombreux influenceurs, les gens semblent vouloir en savoir plus sur ces Saoudiennes. «Cela fait justement partie du but recherché. La croisière présentera des ateliers et divers programmes pour aider à élever ces femmes et leur permettre d'être capitaines de leurs propres navires. Il s'agit d'une extension du livre lui-même, les femmes sortant des pages pour entrer dans la vie réelle», ajoute-t-elle.

Elle rend hommage à des dirigeants tels que le prince héritier, Mohammed ben Salmane, qui a mentionné l'abaya dans un entretien accordé à l'émission 60 Minutes sur CBS News. Au cours de cet entretien, il a expliqué que l'abaya était facultative et que l'objectif était la modestie. «J’ai pensé: “Oh, mon Dieu, c'est génial! Cela montre simplement au monde que l'abaya n'est jamais une question d'oppression, mais un vêtement symbolisant notre fierté et notre identité nationale. Nous sommes fières de la porter», déclare-t-elle.

Bien que Marriam Mossalli ait choisi de réaliser toutes ses interviews en anglais dans les médias saoudiens, ce choix linguistique ne devrait pas être confondu avec un manque de fierté saoudienne.

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Elle s'exprime par le visuel et elle maîtrise la communication à travers les images et les propos des femmes qu'elle admire. Sa tante, Nawal Mossalli, est l'une de ses idoles. Elle reconnaît que ce sont les femmes de sa famille qui l'ont motivée, mais aussi le temps passé à Arab News. Lorsqu'elle a rejoint l'équipe, elle s'est décrite comme «une gamine de 20 ans». Mais elle a pris à bras-le-corps son projet d'intégrer la mode et le style dans le journal et elle se souvient avec nostalgie de la manière dont les rédacteurs en chef lui ont donné la liberté de diriger la rubrique et de convaincre différents auteurs de soumettre des articles sur le sujet.

À l'époque, elle était déterminée à accumuler les signatures, mais aujourd'hui, elle est plus heureuse de fournir des conseils et un soutien au nouveau groupe de rédacteurs.

Mme Mossalli reconnaît que de nombreux Occidentaux ne saisissent peut-être pas pleinement ce que les femmes saoudiennes ont dû affronter. Mais elle espère que ce livre sera un tremplin à partir duquel la future génération de jeunes filles pourra s'élancer vers les plus hauts horizons. Elle a été attentive et réfléchie dans ses choix.

Elle a délibérément mis en avant la diversité du Royaume et elle s'est assurée de ne pas utiliser simplement ce qu'elle appelle «la Saoudienne la plus occidentalisée». Elle veut normaliser le fait que les femmes soient responsables de la façon dont leur histoire est racontée et dont leur image est perçue dans le monde. Elle a donné ce contrôle à chaque femme et chacune d'entre elles est volontaire.

«Nous avons des filles qui viennent de petits villages et qui veulent être représentées. Je pense que c'est quelque chose qui, au fur et à mesure que nous nous développons et que nous faisons passer le mot, sera plus important pour la prochaine génération de filles», déclare-t-elle.

Under the Abaya est actuellement vendu sur le site Web de Niche Arabia, à la boutique du Musée national et dans les magasins d'AlUla et, à partir de ce ramadan, à Al-Balad, à Djeddah.

Tous les bénéfices de la vente des livres sont destinés à financer des bourses d'études pour soutenir la prochaine génération de femmes artistes et entrepreneuses. Cette année, deux pilotes de rallye seront parrainées, Saja Kamel et Manar Alesayi, qui sont présentées dans le livre.

 

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Hoor al-Qasimi nommée directrice artistique de la Biennale de Sydney

Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
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  • Créée en 1973, la Biennale de Sydney est l'une des expositions les plus anciennes du genre
  • Depuis 2017, Al-Qasimi préside l'Association internationale des biennales ainsi que l'Institut d’Afrique

DUBAÏ : La Biennale de Sydney a annoncé cette semaine la nomination de la commissaire d’expositions émiratie Hoor al-Qasimi au poste de directrice artistique de sa 25e édition, qui se tiendra du 7 mars au 8 juin 2026.

Créée en 1973, la Biennale de Sydney est l'une des expositions les plus anciennes du genre et s’affirme en tant que première biennale établie dans la région Asie-Pacifique.

En 2009, Al-Qasimi a créé la Fondation d'art de Sharjah, dont elle est actuellement la présidente et la directrice. Tout au long de sa carrière, elle a acquis une vaste expérience dans la conception de biennales internationales, notamment en tant que commissaire de la deuxième Biennale de Lahore en 2020 et du Pavillon des Émirats arabes unis à la 56e Biennale de Venise en 2015.

Elle a également cocuraté la sixième édition de la Biennale de Sharjah en 2003 et en assure la direction depuis.

Al-Qasimi préside l'Association internationale des biennales ainsi que l'Institut d’Afrique depuis 2017.  Elle a précédemment siégé au conseil d'administration du MoMA PS1 à New York et à celui du Ullens Center for Contemporary Arts (UCCA), à Beijing, entre autres fonctions.

Elle est également directrice artistique de la sixième Triennale d'Aichi, qui se tiendra au Japon en 2025.

 


Cannes: le conflit israélo-palestinien en filigrane

L'actrice française Leila Bekhti porte un badge en forme de pastèque palestinienne alors qu'elle arrive à la projection du film "Furiosa : A Mad Max Saga" lors de la 77e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 15 mai 2024. (Photo Valery Hache AFP)
L'actrice française Leila Bekhti porte un badge en forme de pastèque palestinienne alors qu'elle arrive à la projection du film "Furiosa : A Mad Max Saga" lors de la 77e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 15 mai 2024. (Photo Valery Hache AFP)
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  • Sur TikTok, le hashtag «blockout2024» fait florès et invite les internautes à bloquer les comptes de stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza
  • Vendredi, une projection privée du film-témoignage monté par le gouvernement et l'armée israélienne sur les massacres du 7 octobre, «Bearing Witness», a été envisagée avant d'être annulée «pour raisons de sécurité »

CANNES, France : Un symbole palestinien ou un portrait d'otage: à l'heure où le conflit entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza embrase les campus et les réseaux sociaux, les stars présentes au 77e Festival de Cannes préfèrent afficher un soutien discret.

Ruban jaune accroché à la veste, l'acteur Philippe Torreton a gravi mardi les marches du Festival. Un symbole en soutien aux quelque 250 personnes prises en otage par le Hamas le 7 octobre.

L'actrice Leïla Bekhti, qui a récemment enregistré un message en faveur des enfants de Gaza pour l'Unicef, a arboré mercredi un pin's pastèque, l'un des symboles de la résistance palestinienne.

Des positionnements très discrets quant au conflit israélo-palestinien, au moment où sur TikTok, le hashtag «blockout2024» fait florès et invite les internautes à bloquer les comptes de stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza. Beyoncé et Kim Kardashian figurent parmi les cibles de cette mobilisation propalestinienne et ont déjà perdu des centaines de milliers d'abonnés.

En réponse, des célébrités comme Omar Sy, membre du jury à Cannes, ont mis en ligne en début de semaine un appel au cessez-le-feu sur Instagram.

Sur le tapis rouge cannois, le message le plus fort à propos de ce conflit est venu jusqu'ici d'une survivante de l'attaque du Hamas le 7 octobre, Laura Blajman-Kadar, vêtue d'une robe jaune affichant des portraits d'otages israéliens et une écharpe noire «Bring them home» («Ramenez-les à la maison»).

Vendredi, une projection privée du film-témoignage monté par le gouvernement et l'armée israélienne sur les massacres du 7 octobre, «Bearing Witness», a été envisagée avant d'être annulée «pour raisons de sécurité, ont indiqué à l'AFP ses organisateurs.

Ce film, composé d'extraits des caméras et téléphones des assaillants du Hamas et d'images captées par des victimes et des secouristes, avait été diffusé le 14 novembre à l'Assemblée nationale en France. Des projections privées ont déjà eu lieu en marge de sommets comme Davos, selon les organisateurs.

- Haute surveillance -

Mais point de manifestation politique, ni côté public, ni côté montée des marches. Une discrétion à l'extrême, qui pourrait basculer avec la présentation vendredi à 18H00 de «La belle de Gaza», documentaire dans le milieu très fermé des femmes transgenres palestiniennes réfugiées à Tel-Aviv.

Même si le conflit israélo-palestinien, évoqué à travers la dureté des autorités pour les «clandestines» venues de Cisjordanie sans permis de travail, s'efface totalement dans ce film de Yolande Zauberman, supplanté par un autre type de conflit intime et universel.

Si aucun film palestinien n'est présent en sélection, «Vers un pays inconnu» du réalisateur danois d'origine palestinienne Mahdi Fleifel, suit deux jeunes cousins palestiniens se retrouvant en Grèce, après avoir fui un camp au Liban. Le film est présenté à la Quinzaine des cinéastes.

Au Marché du film, le plus grand au monde, le pavillon du «film arabe» a déroulé une grande banderole appelant à soutenir l'industrie des territoires occupés ou ses cinéastes en exil.

Le seul film israélien présenté cette année est le court-métrage d'Amit Vaknin, étudiante en cinéma à l'Université de Tel-Aviv. «It's no time for pop» s'attache à une jeune femme qui refuse de prendre part à des festivités patriotiques.

Le pavillon israélien a été maintenu, sous très haute surveillance, avec un filtrage sécuritaire drastique à l'entrée.

L'équipe de l'ambassade israélienne a déclaré à l'AFP avoir douté jusqu'au dernier moment du maintien de sa présence, moins d'une semaine après les manifestations monstre lors de l'Eurovision en Suède.

 


Pour sa nouvelle création, Angelin Preljocaj livre son «Requiem(s)»

Le chorégraphe et danseur français Angelin Preljocaj participe à une répétition de sa chorégraphie, le ballet «Le lac des cygnes» du compositeur russe Tchaïkovski, avec les danseurs du «Ballet Preljocaj», au Théâtre de l'Archeveche à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, le 23 juillet 2020. (Clement Mahoudeau AFP)
Le chorégraphe et danseur français Angelin Preljocaj participe à une répétition de sa chorégraphie, le ballet «Le lac des cygnes» du compositeur russe Tchaïkovski, avec les danseurs du «Ballet Preljocaj», au Théâtre de l'Archeveche à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, le 23 juillet 2020. (Clement Mahoudeau AFP)
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  • Dans la salle du Grand Théâtre de Provence d'Aix, 300 personnes ont assisté à la répétition générale, la veille de la première, et les deux premières dates de «Requiem(s)» étaient annoncées complètes
  • Cette mosaïque d'émotions jaillit aussi de la musique qui accompagne les 19 danseurs, avec des ruptures aussi rapides qu'un claquement de doigts, passant brutalement du +Lacrimosa+ du requiem de Mozart à une chanson de métal

AIX-EN-PROVENCE, France : De la tristesse, de la rage parfois mais aussi des moments de joie, le chorégraphe français Angelin Preljocaj présente ce week-end à Aix-en-Provence, en première mondiale, «Requiem(s)», un spectacle autour de toutes les facettes de la mort et du deuil.

«C'est un thème magnifique et puis l'année 2023 était une année assez dure pour moi personnellement. J'ai perdu beaucoup d'amis, mes parents aussi. Je me suis dit que c'était peut-être le moment de faire un requiem», confie M. Preljocaj à l'AFP.

Basé avec son ballet à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, au Pavillon noir, le chorégraphe d'origine albanaise est connu notamment pour ses ballets «Le Parc» et «Blanche-Neige», et ses collaborations fréquentes avec des artistes issus de la musique électro comme Air, le DJ Laurent Garnier et les Daft Punk.

Dans la salle du Grand Théâtre de Provence d'Aix, 300 personnes ont assisté à la répétition générale, la veille de la première, et les deux premières dates de «Requiem(s)» étaient annoncées complètes.

Pour ce spectacle, Angelin Preljocaj dit s'être longuement documenté, allant piocher des références entre autres chez le sociologue Émile Durkheim, qui expliquait que les hommes ont fait société quand ils ont commencé à donner une cérémonie pour leurs morts.

Les facettes de ce cérémonial ressortent tout au long du ballet, tantôt langoureux, tantôt très rythmé, parfois complètement frénétique, les danseurs jouant avec les différentes émotions liées au deuil.

«Ce n'est pas toujours triste, il y a beaucoup de joie dans le spectacle aussi, de la rage parfois, de la mélancolie», énumère le chorégraphe.

- De Mozart au métal -

Cette mosaïque d'émotions jaillit aussi de la musique qui accompagne les 19 danseurs, avec des ruptures aussi rapides qu'un claquement de doigts, passant brutalement du +Lacrimosa+ du requiem de Mozart à une chanson de métal.

«Les musiques m'apportaient des nuances d'émotions différentes et j'avais envie de travailler avec ces choses-là, par exemple les cantates de Bach (1685-1750), Ligeti (1923-2006), Mozart (1756-1791)... et du métal. Je me suis beaucoup amusé avec ça», sourit Angelin Preljocaj.

Des décors aux costumes en passant par la lumière, les danseurs se retrouvent plongés dans une bichromie noire et blanche pudique, seulement troublée par quelques très rares touches de rouge.

Après une heure trente de danse, le public a applaudi de longues minutes.

«Un spectacle, c'est comme une photographie qu'on met dans le révélateur; le révélateur c'est le public, et ce soir c'était très très chaleureux», souffle le chorégraphe à l'issue de la générale.

Après les deux dates inaugurales au Grand Théâtre de Provence vendredi et samedi, une tournée à Paris et dans plusieurs autres villes de France, le spectacle reviendra au mois d'octobre à Aix puis sera joué le 4 décembre à Modène (Italie) puis en 2025 à Athènes, Madrid et Fribourg (Suisse).