AMMAN: Le statut de la liberté de la presse en Jordanie est toujours classé comme «limité». Un organisme de surveillance des médias déplore les «violations contre les journalistes, l’accès du public à l’information et les obstacles à la couverture de l’actualité».
Le Centre pour la défense et la protection des journalistes, situé à Amman, a publié son rapport annuel de 2021 sur le statut de la liberté de la presse en Jordanie, classé comme «limité» pour la deuxième année consécutive.
La Jordanie a enregistré un score de 215,2 sur 600 au sein du classement de la liberté de la presse établi par le centre en question pour 2021. Il comprend soixante questions posées par 150 journalistes jordaniens qui représentent différentes organisations médiatiques du pays.
Le rapport attribue ce statut à l’absence d’environnement politique propice à la liberté de la presse en Jordanie.
Il affirme que les violations contre les journalistes ont augmenté en 2021, «bien que de nombreux autres types d’infractions n’aient pas été recensés».
Le classement de 2021 comprend plusieurs sections: l’environnement politique, le cadre législatif, le droit à l’information, la liberté des médias et la liberté d’expression.
Le fondateur et directeur du centre, Nidal Mansour, a déclaré que les conclusions de 2021 suggèrent une augmentation de l’autocensure, de la protection des intérêts du gouvernement par les dirigeants des médias et de la rétention d’informations par le gouvernement.
M. Mansour affirme que 2021 «était marquée par l’incertitude, puisque le centre n’a officiellement documenté aucune violation contre les journalistes», ajoutant que toutes les conclusions étaient basées sur les expériences des journalistes.
L’environnement politique, qui évalue l’ampleur du soutien et de l’intervention du gouvernement au sein des médias, a été classé comme «limité» dans le rapport, avec un score de 19,9 sur 60.
Le cadre législatif, qui a trait à la protection de la liberté d'expression par la Constitution jordanienne, est resté «partiellement limité» en 2020 et en 2021, tandis que le droit d’accès à l'information a été classé comme «limité» pour la deuxième année consécutive.
La liberté d’expression est qualifiée de « limitée», avec un score de 37,2 points sur 100.
Les conclusions du Centre pour la défense et la protection des journalistes sont presque identiques à celles du Classement mondial de la liberté de la presse de 2021 publié par Reporters sans frontières et Freedom House.
Dans le rapport de 2021 de Reporters sans frontières, la Jordanie se classe 129e sur 180 pays en matière de liberté de la presse. Elle est en 7e position parmi les États arabes. En Jordanie, les journalistes pratiquent l’autocensure. En outre, l’un des défis auxquels ils sont confrontés est l’émission d’ordonnances de non-publication par les autorités qui leur interdisent de couvrir certains sujets, selon Reporters sans frontières.
La Jordanie a été classée comme «non libre» dans le rapport annuel de Freedom House sur les droits politiques et les libertés civiles dans le monde.
Dans des entretiens précédemment accordés à Arab News, des journalistes, des militants des droits et des militants juridiques avaient exprimé leur inquiétude face à la «détérioration de l’état» de la liberté de la presse en Jordanie et face aux restrictions imposées à la collecte d’informations, principalement avec les ordonnances continues de non-publication. Ils affirmaient que le gouvernement avait recours à ces interdictions dans le but de réprimer les libertés.
Le journaliste Khaled Qudah, qui est également membre du conseil de l’Association de la presse jordanienne, précise que le classement de la Jordanie dans les rapports mondiaux de liberté publique s’était «considérablement détérioré» au cours des dernières années.
M. Qudah soutient que le gouvernement «abuse» de l’utilisation des ordonnances de non-publication et «les exploite pour contrôler les médias d’une main de fer».
Basil Okour, éditeur du site d’information JO24, est du même avis. Il décrit l’état de la liberté de la presse en Jordanie comme le «plus lamentable de tous les temps».
Citant l’article 11 de la loi sur la cybercriminalité et le récent rapport de l’Institut national des droits de l’homme, M. Okour déclare que les autorités ont renforcé leur emprise sur les journalistes et les militants en utilisant un ensemble de «lois martiales».
Selon l’article en question, «quiconque publie ou relaie délibérément des déclarations ou des informations sur Internet qui incluent des délits et des calomnies ou le dénigrement de qui que ce soit encourt trois mois de prison et une amende qui va de 141 à 1 410 dollars [1 dollar = 0,92 euro]».
Dans son dernier rapport, l’Institut national des droits de l’homme indique que la répression de la liberté d'expression en Jordanie augmente à un rythme alarmant. Il évoque la détention d’individus qui ont exprimé leurs opinions sur les réseaux sociaux.
L’avocat Mohammed Qteichat souligne également la détérioration de la liberté de la presse en Jordanie.
Ancien président de la Commission jordanienne des médias et conseiller juridique de l’ancien Premier ministre Omar Razzaz, il explique qu’il existe un certain nombre de lois en Jordanie, et notamment une qui concerne la cybercriminalité et le Code pénal, qui sont «hostiles aux médias».
De telles lois sont semblables à des «embuscades juridiques». Elles comprennent des termes vagues que les gouvernements utilisent pour réprimer la liberté de la presse, soutient-il. «L’organe législatif jordanien favorise les poursuites judiciaires aux dépens de la liberté de la presse», affirme-t-il.
Pour M. Mansour, la liberté de la presse et les droits de l’homme sont «en jeu» au royaume hachémite.
«Il est impossible de parvenir à la démocratie sans une presse libre», souligne-t-il, citant la promesse faite par le gouvernement jordanien de procéder à une réforme politique tout en restreignant la liberté de la presse.
Il reproche également aux «lois martiales» de restreindre les libertés et de faire taire les journalistes, affirmant qu'il n’existe pas de véritable volonté pour mettre en place des réformes.
Le classement de la Jordanie s’est également détérioré dans le classement annuel de Human Rights Watch. Les autorités jordaniennes ciblent de plus en plus les militants politiques et anticorruption sur la base d’accusations qui portent atteinte au droit à la liberté d’expression.
Michael Page, directeur adjoint de Human Rights Watch pour le Moyen-Orient, critique lui aussi la détérioration de la situation des droits de l’homme en Jordanie.
«Les autorités jordaniennes devraient gérer le mécontentement du public face aux difficultés économiques intérieures et aux politiques d’austérité en écoutant les citoyens plutôt qu’en arrêtant les gens qui organisent des manifestations et ceux qui exigent une responsabilisation publique», conclut-il.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com
Le président français veut "marquer sa mobilisation" en faveur "d'un cessez-le-feu à Gaza" et répondre "à l'urgence", a expliqué l'Elysée.
Le retour de la guerre, avec la reprise le 18 mars des opérations militaires par Israël après deux mois de trêve, avait été qualifié de "retour en arrière dramatique" par M. Macron.
Dès son arrivée dimanche soir, il a eu une rencontre avec son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi dans le souk de la capitale égyptienne. Lundi matin, il doit le revoir pour un entretien plus formel, avant un sommet à trois auquel se joindra le roi Abdallah II de Jordanie.
Pour la diplomatie française, c'est une manière d'afficher sa solidarité avec deux pays voisins des territoires palestiniens ébranlés par le plan du président américain.
Au même moment, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, partisan de ce plan, sera reçu à la Maison Blanche.
Début février, juste après son retour au pouvoir, Donald Trump a suscité un tollé international en évoquant une prise de contrôle de la bande de Gaza par les Etats-Unis pour la reconstruire et en faire la "Riviera du Moyen-Orient".
Pour cela, ses 2,4 millions d'habitants pourraient être déplacés vers l'Egypte et la Jordanie, qui ont vivement rejeté cette option mais doivent composer avec la pression américaine.
"L'Egypte est au cœur de tous les efforts visant essentiellement à atteindre la désescalade ou un cessez-le-feu ou un arrêt complet des tirs entre Israël et le Hamas", relève Mohamed Marei, directeur de l'Observatoire égyptien, affilié au Centre égyptien de réflexion et d'études stratégiques.
Le mouvement islamiste palestinien a déclenché la guerre avec des attaques sans précédent en Israël le 7 octobre 2023.
- Etape symbolique -
Ce chercheur souligne que Le Caire a clairement "refusé" le plan Trump, considéré comme "une menace allant à l'encontre des intérêts égyptiens".
La France va aussi réaffirmer son "opposition aux déplacements forcés de populations" et exprimer son soutien au plan arabe conçu comme une réponse au plan Trump, a dit l'entourage d'Emmanuel Macron.
Cette initiative, préparée par l'Egypte, prévoit de reconstruire la bande de Gaza, détruite par 15 mois de guerre entre Israël et le Hamas, sans déplacer les Gazaouis.
Paris estime toutefois qu'il faut "encore renforcer" ce plan, notamment sur "la sécurité" et la "gouvernance" de l'enclave palestinienne.
Les pays arabes prévoient un retour de l'Autorité palestinienne, au détriment du Hamas qui dirige le territoire depuis 2007.
Emmanuel Macron veut aussi évoquer avec ses homologues "la nécessaire définition d'une sortie de crise politique fondée sur la solution à deux Etats", israélien et palestinien, selon l'Elysée.
Il coprésidera en juin à l'ONU, avec le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, une conférence sur ce sujet. Ce rendez-vous pourrait, selon des sources diplomatiques, constituer le "moment opportun" que la France attend pour éventuellement reconnaître un Etat palestinien.
Mardi, le président français se rendra ensuite dans la ville égyptienne d'al-Arich, dans le nord de la péninsule du Sinaï, à 50 kilomètres du point de Rafah par lequel est censée passer l'aide humanitaire vers Gaza, à nouveau stoppée.
Lors de cette étape hautement symbolique, il appellera à "la réouverture des points de passage pour l'acheminement de fret humanitaire à Gaza" et "redira l'engagement de la France à poursuivre son soutien humanitaire vers les populations gazaouies", a fait savoir la présidence française.
Dans ce port méditerranéen qui sert de base arrière pour l'aide, il va rencontrer des personnels d'ONG françaises, des Nations unies, du Croissant-Rouge égyptien, mais aussi probablement des "bénéficiaires" palestiniens de l'action humanitaire, a-t-on détaillé de même source.
La quasi-totalité des Gazaouis ont été déplacés par les combats et vivent dans un territoire dévasté et assiégé.
Sur le plan bilatéral franco-égyptien, plusieurs accords économiques doivent être signés lundi dans les transports, la santé, les énergies renouvelables ou le domaine universitaire.
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