PARIS: Christiane Taubira a annoncé mercredi qu'elle se retirait de la course à la présidentielle, laissant la gauche, qu'elle prétendait unir, aussi divisée qu'au début de sa campagne-éclair.
"Il est évident que nous ne réussirons pas à avoir les parrainages", a déclaré l'ex-ministre, qui avait annoncé sa candidature le 15 janvier et était arrivée en tête de l'initiative citoyenne de la Primaire populaire 15 jours plus tard, bien décidée à tenter de faire l'union à gauche.
Créditée d'environ 2% d'intentions de vote dans les sondages, elle n'avait recueilli mardi que 181 signatures d'élus sur 500 nécessaires, à trois jours de la date limite des dépôts des parrainages, malgré les efforts du collectif de citoyens "Taubira pour 2022" pour convaincre les élus.
Pas de ralliement prévu à un autre candidat de gauche, assure son entourage, mais l'ex-candidate à la présidentielle de 2002 a indiqué qu'elle exprimerait "dans les prochaines semaines (son) vote du premier tour".
"Mais pour l'instant il n'y a pas d'évidences", a insisté l'ex-frondeur PS Christian Paul, un proche, avant de préciser "enfin si, une seule: ce sera à gauche".
"Elle a voulu marquer cette présidentielle de ses valeurs, de son discours, de sa pensée politique", a salué le candidat écologiste Yannick Jadot. "Si elle choisit de nous rejoindre, elle aura toute sa place".
Alexis Corbière, lieutenant de Jean-Luc Mélenchon, en tête à gauche dans les sondages, l'a enjoint auprès de l'AFP à "appeler à voter pour le mieux placé". Mais "depuis le début elle a montré qu'elle était dans des réflexions qui n'appartenaient qu'à elle", a souligné le député de Seine-Saint-Denis.
Le communiste Fabien Roussel a dit "(son) estime et (son) amitié à Christiane Taubira dont la voix continuera à compter pour reconstruire une gauche républicaine et sociale".
"Elle est une force morale, éthique, politique qui ne renonce jamais", a twitté le Premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui "souhaite que son indépendance, son engagement, sa vision continuent de nourrir nos combats communs".
L'entourage de Christiane Taubira accuse notamment Anne Hidalgo et le Parti socialiste d'avoir "fait pression" pour l'empêcher d'obtenir ses signatures, ce qu'a démenti le PS.
Responsables "devant l'histoire"
L'ex-Garde des Sceaux a assuré que "nous n'allons pas rentrer chez nous, nous allons poursuivre ensemble", regrettant que sa "candidature ancrée dans une initiative citoyenne" ait été empêchée par un "dispositif administratif", celui des parrainages.
Elle a aussi fustigé les partis "qui n’en finissent pas d'agoniser", "n’ont plus que leur capacité de nuisance" et ont voulu "rendre difficile cette candidature qui manifestement les bouscule".
Elle a affirmé vouloir "que la démocratie puisse reposer sur des forces politiques où les citoyens vont émerger de plus en plus massivement", évoquant déjà pour les législatives "des initiatives de +maison commune+".
"Christiane Taubira prend une décision courageuse, digne et responsable", a reconnu la Primaire populaire, saluant "sa volonté de continuer le combat pour faire gagner la gauche et l'écologie".
Il reste désormais quatre principaux candidats à gauche: Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, Fabien Roussel et Anne Hidalgo.
L'ex-ministre a dit espérer "que les jours qui viennent" permettent "à la gauche de se ressaisir" et se rassembler. Sinon "ils devront prendre leurs responsabilités devant l'histoire".
Entrée en campagne tardivement, Christiane Taubira, 70 ans, avait fait le pari d'une "opération éclair" pour réunir la gauche, et rivaliser avec Emmanuel Macron, la droite et l'extrême droite, pour une place au second tour.
Mais la campagne de celle qui bénéficie d'une forte popularité, notamment auprès des jeunes, n'a jamais décollé, et les autres candidats de gauche ont opposé une fin de non recevoir à ses tentatives de rassemblement.
Elle a aussi souffert du choix du Parti radical de gauche (PRG) de se retirer de la campagne mi-février, évaporant son réseau de 170 promesses de signatures et son soutien financier.
Se vantant d'avoir eu le plus grand socle électoral avec 392.000 votants à la Primaire populaire, la candidate a pâti aussi de sa prestation ratée auprès de la Fondation Abbé Pierre pour parler du mal logement, et s'est vue aussi reprocher une impréparation, une absence de programme, voire d'avoir copié les mesures de ses concurrents.