LONDRES: Deux experts de l’ONU ont appelé l’Iran à «renoncer à ses efforts qui visent à promulguer une nouvelle loi qui isolerait efficacement le pays de l’Internet mondial».
Dans une déclaration conjointe, Javaid Rehman, rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Iran, et Irene Khan, rapporteuse spéciale des Nations unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, ont averti que le Parlement pourrait bientôt signer le projet de loi sur le système de réglementation des services en ligne.
Mieux connu sous le nom de «projet de loi sur la protection des utilisateurs du cyberespace», il accorde à Téhéran et à l’armée «un vaste contrôle sur les infrastructures qui relient l’Iran à l’Internet mondial».
Si la législation est promulguée, elle contraindrait les entreprises technologiques à «suivre les directives de l’État» ou les soumettrait à la limitation et au blocage de la bande passante. Cela aurait de nombreuses répercussions sur les droits des entreprises mondiales et des citoyens iraniens.
Ce projet de loi bloquerait probablement l’ensemble des plates-formes et des sites Internet gérés par des sociétés étrangères qui opèrent toujours en Iran. En outre, il contraindrait les gens à utiliser des identifiants pour accéder à Internet et criminaliserait la distribution et la vente de réseaux privés virtuels, selon les experts de l’ONU.
«Ce projet de loi représente une étape inquiétante vers le renforcement du mur numérique en Iran, ce qui restreindrait davantage l’information dans un environnement où la liberté d’expression et les autres droits fondamentaux sont déjà fortement limités», s’alarment les deux rapporteurs.
«Cette mesure entraverait également le droit des individus à participer à la vie culturelle et à accéder aux ressources culturelles.»
Les coupures d’Internet ont longtemps été utilisées par Téhéran comme un outil pour dissimuler les violations des droits de l’homme, en particulier en période d’instabilité.
En 2019, lors de certaines des plus grandes manifestations antirégime jamais observées depuis la révolution de 1979, l’accès à Internet avait été bloqué afin de dissimuler la mort d’au moins trois cent vingt-quatre personnes provoquée par les forces de sécurité, dont le Corps des gardiens de la révolution islamique.
«Les coupures et les perturbations des services Internet se sont poursuivies depuis, notamment pour ce qui touche aux manifestations», déclare l’ONU.
Le projet de loi sur la protection des utilisateurs du cyberespace renforcerait encore plus la capacité de l’Iran à déconnecter sa population du monde extérieur en temps de crise.
Selon les experts de l’ONU, il restreindrait à la fois l’information et les activités commerciales. Il aurait une incidence négative sur les secteurs qui dépendent des technologies de l’information comme les sciences, l’éducation et la médecine.
«Aujourd’hui, il est évident que le développement économique et social des sociétés repose sur l’accès à l'information et sur un environnement propice à l’échange d’idées et de ressources culturelles», ajoutent-ils.
«Nous appelons la République islamique d’Iran à revenir sur sa décision à propos de ce projet de loi», concluent-ils.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com