«Poutine veut sortir l'Ukraine de la carte des Etats», selon Le Drian

La ministre française de la Défense Florence Parly (à gauche) et le ministre français des Affaires européennes et étrangères Jean-Yves Le Drian à la sortie d’une réunion de sécurité (Conseil de défense) sur l'Ukraine à l'Elysée à Paris le 24 février 2022. (Ludovic Marin/ Pool / AFP)
La ministre française de la Défense Florence Parly (à gauche) et le ministre français des Affaires européennes et étrangères Jean-Yves Le Drian à la sortie d’une réunion de sécurité (Conseil de défense) sur l'Ukraine à l'Elysée à Paris le 24 février 2022. (Ludovic Marin/ Pool / AFP)
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Publié le Vendredi 25 février 2022

«Poutine veut sortir l'Ukraine de la carte des Etats», selon Le Drian

  • «Le président Poutine réinvente l'histoire. Il veut recréer un empire, affirmer par tous les moyens sa puissance, il est dans une forme de dérive», a indiqué Jean-Yves Le Drian
  • «Nous sommes inquiets sur la suite», a souligné Jean-Yves Le Drian, qui était interrogé sur le cas de la Moldavie et de la Géorgie

PARIS : Le président russe Vladimir Poutine est un «semeur de guerre» qui veut sortir l'Ukraine de «la carte des États», a déclaré vendredi le chef de la diplomatie française, ajoutant que la «sécurité» du président ukrainien Volodymyr Zelensky était menacée par l'offensive russe.

«La guerre est totale. Le président Poutine a choisi la guerre, il a choisi une offensive massive, il a choisi de sortir l'Ukraine de la carte des États», a affirmé Jean-Yves Le Drian sur la radio France Inter.

«L'affaire du Donbass n'était qu'un prétexte. Ce que voulait Poutine, c'est la soumission de l'Ukraine et il poursuivra apparemment jusqu'au bout son offensive», a-t-il ajouté en référence à la région séparatiste prorusse de l'est de l'Ukraine que le maître du Kremlin affirme par cette offensive vouloir protéger.

Parmi ses objectifs de guerre, Vladimir Poutine a fixé une «dénazification» de l'Ukraine et dénoncé la «junte» au pouvoir à Kiev, suggérant clairement ainsi sa volonté de renverser le président Volodymyr Zelensky, élu en 2019.

«La sécurité du président Zelensky est un élément central de ce qu'il se passe maintenant», a souligné le ministre français des Affaires étrangères.

«Nous sommes en situation de pouvoir l'aider si nécessaire (...) Nous prendrons les dispositions qu'il convient de prendre», a-t-il ajouté en refusant toutefois de dire si cette aide pouvait passer par une exfiltration.

«Vladimir Poutine est un semeur de guerre» et l'offensive russe en cours en Ukraine pourrait aussi s'étendre à la Moldavie et la Géorgie, a relevé le chef de la diplomatie française.

«Nous sommes inquiets sur la suite», a souligné Jean-Yves Le Drian, qui était interrogé sur le cas de la Moldavie et de la Géorgie.

Ces deux ex-républiques soviétiques comportent toutes deux des territoires séparatistes totalement tournés vers Moscou. Celui de Transdniestrie, en Moldavie, comporte une base militaire proche de la ville ukrainienne d'Odessa.

«Le président Poutine réinvente l'histoire. Il veut recréer un empire, affirmer par tous les moyens sa puissance, il est dans une forme de dérive», a poursuivi Jean-Yves Le Drian.

«C'est une nouvelle donne. Ce n'est plus la même chose que la Guerre froide parce que (durant) la Guerre froide, il n'y avait pas la guerre», a-t-il lancé. «La nouveauté c'est que c'est la guerre au cœur de l'Europe», a-t-il ajouté.

L'économie française «peu exposée» à la Russie selon Bruno Le Maire

L'économie française est "peu exposée" à la Russie, qui est "un partenaire économique secondaire", a assuré vendredi le ministre de l'Économie Bruno Le Maire, après l'annonce de nouvelles sanctions contre Moscou.

"J'ai conscience que ces sanctions peuvent avoir un impact sur quelques entreprises françaises", a toutefois ajouté M. Le Maire, qui s'exprimait devant la presse peu avant le début d'une réunion avec ses homologues européens à Paris, assurant par ailleurs que "les ménages français n'ont pas d'inquiétude à avoir" face à la hausse des prix de l'énergie.

Le ministre français de l'Economie Bruno Lemaire (Thomas Coex, AFP)
Le ministre français de l'Economie Bruno Lemaire (Thomas Coex, AFP)

 

Mélanchon: «nous serons les principales victimes»

Jean-Luc Mélenchon a nié s'être trompé sur la Russie vendredi sur franceinfo, estimant à l'inverse avoir été, depuis plusieurs années, "le seul à dire que si vous menacez la Russie, elle passerait les frontières".

S'est-il trompé en estimant, il y a quelques semaines, que "l'Otan était l'agresseur"? "A l'inverse, je suis le seul à avoir d'un bout à l'autre, depuis 2014, dit +si vous essayez d'établir l'Otan à la frontière de la Russie, vous aurez un incident majeur, mieux vaut discuter avant+".

Il a insisté: "Je pense ne pas m'être trompé. J'ai toujours dit pareil: on ne franchit pas les frontières, si vous menacez la Russie, elle passera les frontières. Maintenant qu'elle passe la frontière, ils (les pays occidentaux, NDLR) n'ont rien prévu et c'est à moi qu'on demande des comptes? Je trouve ça extraordinaire".

 

Interrogé sur l'envoi d'armes à l'Ukraine demandé par son concurrent à gauche l'écologiste Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon a répliqué: "Ils ne sont jamais en retard d'une bêtise. (...) Pensez-vous qu'elle soit en état de résister à la Russie, sur le terrain la guerre est perdue".

Le candidat insoumis à la présidentielle s'est inquiété des sanctions qu'il a dit malgré tout soutenir maintenant qu'elles sont décidées: "Je suis à peu près persuadé que ça ne servira à rien sinon rendre plus difficile la vie à certains Russes et pour pas longtemps, mais en tout cas à nous en France, beaucoup: le prix du pétrole, du gaz, du blé va augmenter, tous les prix vont augmenter et nous serons les principales victimes".

M. Mélenchon souhaite que soit obtenu un "cessez-le-feu", le départ de l'armée russe et la réunion d'une conférence de l'OSCE.

Et il a taxé Vladimir Poutine "d'autocrate rugueux".

Macron recevra vendredi Hollande et Sarkozy

Le président français Emmanuel Macron recevra successivement vendredi ses prédécesseurs François Hollande et Nicolas Sarkozy pour s'entretenir avec eux de l'attaque russe en Ukraine.


Il accueillera d'abord M. Hollande puis M. Sarkozy plus tard dans la journée.


A plusieurs reprises au cours du quinquennat, le chef de l’État français a reçu les deux ex-présidents ou échangé avec eux, comme en juin 2020 où il les avait invités à l’Élysée pour les consulter sur l'après-Covid. Il les a aussi conviés régulièrement à assister à ses côtés à des cérémonies mémorielles.


"Je ne blâme pas du tout le président Macron d'avoir cherché la diplomatie et d'avoir cherché le dialogue, mais ce qui a été à mon avis le grand oubli dans cette période, c'est de faire comprendre qu'il y aurait des réactions extrêmement rudes et dures", avait estimé François Hollande jeudi soir sur un plateau télévisé, en appelant à ce que les sanctions contre la Russie, "notamment sur le système financier, (soient) très élevées".


"L'Europe doit comprendre que sa sécurité est en cause", avait ajouté l'ex-chef de l’État socialiste, en faisant valoir qu'"un jour peut-être, il n'y aura pas le même président des États-Unis: la sécurité des Européens doit donc être assurée par les Européens".


"Poutine le sait parfaitement. Et si nous ne voulons pas nous défendre, hé bien il avancera", avait-il encore assuré.


Vendredi au petit matin, Emmanuel Macron a jugé utile de "laisser ouvert le chemin" du dialogue avec Moscou pour obtenir un arrêt de son offensive en Ukraine, tout en dénonçant "la duplicité" de son homologue russe Vladimir Poutine.


A l'issue d'un sommet de l'UE  à Bruxelles, le président français a indiqué avoir eu jeudi "un "échange franc, direct, rapide" avec Vladimir Poutine, pour réclamer "l'arrêt des combats dans les meilleurs délais" et "lui demander de discuter" avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky "dont c'était la demande".


"Je pense que c'est de ma responsabilité (...) tout en condamnant, tout en sanctionnant, tout en continuant à agir, de laisser ce chemin ouvert pour que le jour où les conditions pourront être remplies, nous puissions obtenir une cessation des hostilités", a-t-il fait valoir.


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.