Tears For Fears, le retour des joailliers de la pop

Roland Arzabal (à gauche), Jamie Wollam (au centre) et Curt Smith (à droite) du groupe britannique Tears for Fears au Rock in Rio Festival dans le Parc olympique, Rio de Janeiro, Brésil, le 22 septembre 2017. (Mauro Pimentel / AFP)
Roland Arzabal (à gauche), Jamie Wollam (au centre) et Curt Smith (à droite) du groupe britannique Tears for Fears au Rock in Rio Festival dans le Parc olympique, Rio de Janeiro, Brésil, le 22 septembre 2017. (Mauro Pimentel / AFP)
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Publié le Lundi 21 février 2022

Tears For Fears, le retour des joailliers de la pop

  • C'est une trajectoire classique dans la pop: deux adolescents anglais sympathisent, fondent un groupe puis doivent gérer le tourbillon du succès
  • «Master plan» («Schéma directeur») se lit aussi comme une dénonciation des autoritarismes incarnés par des figures comme Trump ou Jair Bolsonaro au Brésil

PARIS : Inespéré après 18 ans sans album: Tears For Fears surmonte drames et dissensions pour signer un bijou pop, ciselé de questionnements autour des démocraties menacées ou d'une nécessaire parité homme-femme.

Mais pourquoi près de deux décennies sans sortir de nouveau disque ? Toutes les clés sont dans «The tipping point» («Le point de bascule») qui sort vendredi.

Dans la chanson «Stay» («Reste»), les deux cerveaux du groupe, Roland Orzabal et Curt Smith, ne cachent pas qu'ils n'ont pas toujours été sur la même longueur d'onde en 40 ans de carrière (premier disque, «The hurting», 1983).

«+The tipping point+ est un album puissant car honnête. Nos destins n'ont pas toujours été liés, on avait besoin de grandir spirituellement séparément avant de se retrouver, arrivés à la même maturité», expose Roland Orzabal, rencontré à Paris aux côtés de son comparse.

«On sait maintenant qu'on a besoin l'un de l'autre», établit Curt Smith, cheveux ras, petit diamant à l'oreille et silhouette entretenue à la salle de gym.

«Une sorte de lien fraternel», souffle son compère, barbe et longs cheveux blancs, veste psychédélique, sexagénaire comme son alter ego.

C'est une trajectoire classique dans la pop: deux adolescents anglais sympathisent, fondent un groupe puis doivent gérer le tourbillon du succès (au milieu des années 1980 avec les morceaux «Shout» et «Everybody wants to rule the world»). Curt le vivra mal, tentant le premier l'aventure en solo dès les années 1990 avant des allers-retours dans TFF.

«Profondeur»

Mais, plus surprenant, c'est leur ancien manager qui freine ces dernières années leur envie de nouvel album, se contentant de vouloir les faire tourner avec leurs vieux tubes.

«Il vivait dans la défiance des artistes, un peu manipulateur, mais on a repris le pouvoir», résume Roland. C'est le sujet de la chanson «Master plan».

«Notre ex-manager rejetait tout, me disait: +Il faut raconter une histoire+. Quelle histoire ? Ma femme est morte, j'ai fait deux cures de désintox', je veux parler de ça», poursuit l'artiste.

Ces tourments nourrissent les trames de «The tipping point» et «Please be happy». «On veut travailler sur la profondeur, pas rester dans la superficialité», complète Curt Smith. «On est doués pour aller dans les zones d'ombre, mais il y a toujours dans nos chansons de l'optimisme, de l'espoir» expose Roland Orzabal. 

Le duo n'a rien perdu de sa science des mélodies soyeuses pour envelopper des messages forts. Comme sur leur hit «Woman in chains» (1989) qui évoquait les violences conjugales. «Ce que mon père faisait subir physiquement et moralement à ma mère», confie Roland.

«Sous le choc»

Mettre fin à la virilité toxique et bâtir une réelle parité homme-femme sont cette fois au centre de «Break the man», sur le nouvel album.

Curt Smith en est à l'origine. Lui qui vit maintenant aux États-Unis a été horrifié par tout l'attirail de domination masculine mis en avant par Donald Trump pour conquérir le pouvoir.

«Ce côté +ma b... est plus grosse que la vôtre+, je n'ai jamais compris ça; et je me pose aussi des questions car j'ai deux filles», poursuit-il.

Les soubresauts politiques actuels interpellent aussi les deux hommes. «Rivers of mercy» s'ouvre par des bruits d'émeute et de sirènes de police. Curt était aux USA le jour où le Capitole a été attaqué par des complotistes et des supporters de Trump.

«J'étais sous le choc, mais ce n'est pas fini, attention. Trump veut revenir au pouvoir, la démocratie peut être brisée à tout moment» commence-t-il. «La démocratie est aussi fragilisée avec tout ce qui se joue en coulisses chez les géants de la tech et qui peut changer la face d'une élection», déroule Roland.

«Master plan» («Schéma directeur») se lit aussi comme une dénonciation des autoritarismes incarnés par des figures comme Trump ou Jair Bolsonaro au Brésil. Mais toujours avec cette lumière au bout du tunnel: le peuple peut reprendre la main, comme le duo de Tears For Fears l'a fait en changeant de manager pour s'exprimer avec de nouvelles chansons.


Baiser forcé : deux ans et demi de prison requis contre l'ancien patron du foot espagnol

L'ancien président de la fédération espagnole de football Luis Rubiales quitte le tribunal Audiencia Nacional à Madrid le 15 septembre 2023. Les procureurs espagnols veulent que Rubiales soit emprisonné pendant 2,5 ans pour le baiser de la Coupe du monde, rapporte l'AFP le 27 mars 2024. (Photo par Thomas COEX / AFP
L'ancien président de la fédération espagnole de football Luis Rubiales quitte le tribunal Audiencia Nacional à Madrid le 15 septembre 2023. Les procureurs espagnols veulent que Rubiales soit emprisonné pendant 2,5 ans pour le baiser de la Coupe du monde, rapporte l'AFP le 27 mars 2024. (Photo par Thomas COEX / AFP
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  • Un procès devrait bien avoir lieu dans "l'affaire du baiser forcé": le parquet, qui présente ses réquisitions à l'avance en Espagne, a réclamé mercredi deux ans et demi de prison contre l'ex-homme fort du football espagnol Luis Rubiales pour avoir embrass
  • Depuis une récente réforme du Code pénal espagnol, un baiser non consenti peut être considéré comme une agression sexuelle, catégorie pénale regroupant tous les types de violence sexuelle, y compris le viol.

MADRID : Un procès devrait bien avoir lieu dans "l'affaire du baiser forcé": le parquet, qui présente ses réquisitions à l'avance en Espagne, a réclamé mercredi deux ans et demi de prison contre l'ex-homme fort du football espagnol Luis Rubiales pour avoir embrassé Jenni Hermoso sans son consentement.

Ce baiser sur la bouche de la numéro 10 espagnole devant les caméras du monde entier, quelques minutes après le triomphe de "la Roja" (l'équipe nationale) le 20 août à Sydney lors de la finale de la Coupe du Monde féminine, avait provoqué une vague d'indignation en Espagne et à l'étranger, forçant M. Rubiales à démissionner le mois suivant.

Il pourrait donc aussi le conduire derrière les barreaux pour deux délits, le premier d'agression sexuelle, pour lequel le parquet demande un an de prison, le second de coercition, pour lequel la peine requise est d'un an et demi de prison.

Le ministère public demande également que M. Rubiales soit placé pendant deux ans en liberté surveillée après l'accomplissement de sa peine et qu'il verse 50.000 euros d'indemnités à la joueuse pour le seul délit d'agression sexuelle.

La date d'un éventuel procès n'est pas encore connue.

Depuis une récente réforme du Code pénal espagnol, un baiser non consenti peut être considéré comme une agression sexuelle, catégorie pénale regroupant tous les types de violence sexuelle, y compris le viol.

Le délit de "coercition" désigne les "pressions", directes et indirectes, exercées sur la joueuse dans les jours ayant suivi l'incident pour la convaincre de dire que le baiser avait été consenti, notamment au moyen d'une vidéo.

Trois autres personnes de la RFEF sont poursuivies dans cette affaire pour ce même délit de coercition.

Le parquet réclame ainsi un an et demi de prison contre Jorge Vilda, l'ancien entraîneur de l'équipe féminine, Rubén Rivera, l'ancien directeur marketing de la Fédération, et Albert Luque, le directeur sportif de l'équipe masculine.

Le parquet demande, en outre, à ces trois hommes et à M. Rubiales le versement d'une indemnité de 50.000 euros à payer "conjointement" à Jenni Hermoso pour le délit de coercition.

- "Sphère de l'intimité" -

Le juge de l'Audience nationale qui a conduit l'instruction avait conclu que ce baiser n'avait "pas été consenti" et était "une initiative unilatérale, faite par surprise", avait expliqué l'instance judiciaire en janvier.

"Un baiser sur la bouche affecte la sphère de l'intimité relevant des relations sexuelles", poursuivait-elle, estimant qu'il reviendrait au tribunal "d'apprécier pendant le procès" les conséquences de "(sa) finalité érotique ou non, tout comme l'état d'euphorie et d'agitation ressenti à la suite du triomphe sportif extraordinaire" de l'équipe d'Espagne.

Luis Rubiales, 46 ans, n'a eu de cesse de mettre en avant pour sa défense son "émotion" lors du sacre de "la Roja", "un moment de bonheur", démentant toute "connotation sexuelle".

Le 20 août, quelques minutes après la victoire de l'équipe féminine à Sydney, il avait agrippé à deux mains la tête de Jennifer Hermoso et l'avait embrassée par surprise sur la bouche. Il a toujours affirmé que Jenni Hermoso était d'accord.

Une version démentie par Jenni Hermoso, qui avait dit s'être "sentie vulnérable et victime (...) d'un acte impulsif et sexiste, déplacé et sans aucun consentement de (sa) part".

Refusant initialement de démissionner pour "un petit bisou consenti", il avait attaqué cinq jours plus tard, lors d'un discours retentissant, ce qu'il avait qualifié de "faux féminisme".

Sous la pression, il avait finalement quitté ses fonctions le 10 septembre, se disant victime d'une "campagne disproportionnée".

Il a depuis été suspendu pour trois ans de toute activité liée au football par la Fédération internationale (Fifa), une décision contre laquelle il veut faire appel.

La justice espagnole l'a, par ailleurs, interdit de s'approcher à moins de 200 mètres de Jenni Hermoso, 33 ans, qui est devenue malgré elle un symbole mondial de la lutte contre les violences sexuelles et a été élue femme de l'année 2023 par l'édition espagnole du prestigieux magazine américain GQ.

Ces réquisitions du parquet de ce tribunal madrilène surviennent deux jours après la remise en liberté - dans l'attente de son procès en appel - du footballeur brésilien Dani Alves, condamné à quatre ans et demi de prison en première instance pour le viol d'une jeune femme à Barcelone (nord-est) en décembre 2022.


Alizey Khan, première femme pakistanaise lauréate du prix Legacy

Le Prince William de Grande-Bretagne récompense Alizey Khan du Pakistan lors des Diana Legacy Awards au Science Museum à Londres, Grande-Bretagne, 14 mars 2024. (REUTERS)
Le Prince William de Grande-Bretagne récompense Alizey Khan du Pakistan lors des Diana Legacy Awards au Science Museum à Londres, Grande-Bretagne, 14 mars 2024. (REUTERS)
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  • Les prix de l'héritage de Diana sont décernés tous les deux ans et récompensent les réalisations de 20 jeunes leaders du monde entier. L'édition de cette année a coïncidé avec le 25e anniversaire de Lady Diana.
  • Mme Khan a créé la Ruhil Foundation en 2016 pour lutter contre l'insécurité alimentaire en distribuant des sacs de rationnement et des repas cuisinés aux personnes dans le besoin. Elle a effectué un travail considérable pendant la pandémie de COVID-19

ISLAMABAD : Une travailleuse humanitaire pakistanaise de 26 ans est devenue ce mois-ci la première femme de son pays à remporter le prix Diana Legacy en reconnaissance de ses services sociaux, ce qui l'a incitée à décrire cette réussite comme une occasion d'apporter une reconnaissance plus large à d'autres personnes travaillant dans son domaine.

Les prix de l'héritage de Diana sont décernés tous les deux ans et récompensent les réalisations de 20 jeunes leaders du monde entier. L'édition de cette année a coïncidé avec le 25e anniversaire de Lady Diana.

Alizey Khan, la jeune travailleuse humanitaire pakistanaise, est diplômée en droit et a reçu le prix des mains du Prince William le 14 mars lors d'une cérémonie qui s'est tenue à Londres.

Mme Khan a créé la Ruhil Foundation en 2016 pour lutter contre l'insécurité alimentaire en distribuant des sacs de rationnement et des repas cuisinés aux personnes dans le besoin. Elle a effectué un travail considérable pendant la pandémie de COVID-19 avant de fournir de la nourriture et d'autres articles de secours aux familles touchées par les inondations dans les provinces du Punjab, du Sindh et du Baloutchistan.

S'adressant à Arab News mercredi, elle a souligné que de nombreuses femmes au Pakistan étaient engagées dans des efforts humanitaires et sociaux remarquables et qu'elles méritaient d'être reconnues au niveau mondial.

"Elles n'ont pas bénéficié de la même reconnaissance ou de la même exposition", a-t-elle déclaré. "C'est pourquoi je suis reconnaissante de ce prix, qui met en lumière les précieuses contributions des femmes pakistanaises. J'espère qu'il encouragera davantage de femmes à se manifester, à recevoir des nominations et à être reconnues par des prix internationaux prestigieux".

Selon le site web du prix Diana, l'organisation de Mme Khan a livré 5 500 colis alimentaires mensuels et 10 000 repas entre avril 2016 et mars 2022. Elle a également élargi son champ d'action à l'éducation et à l'hébergement en collectant plus de 150 000 dollars.

En outre, l'entreprise humanitaire de Khan a financé 200 mariages, distribué 600 serviettes hygiéniques, fourni 1 100 couvertures en hiver, déboursé 1 000 prêts d'urgence sans intérêt et versé des allocations mensuelles à 25 personnes transgenres et veuves au cours de la même période.

Elle a déclaré qu'elle s'était sentie exceptionnellement fière lorsqu'il a été annoncé, lors de la cérémonie de remise des prix, qu'elle était la première femme pakistanaise à recevoir cet honneur. Auparavant, un seul Pakistanais, Ahmed Nawaz, qui a survécu à la fusillade de l'Army Public School en 2014, avait reçu le prix en 2019 pour ses efforts de déradicalisation.

"J'ai reçu le prix en raison de mon implication constante dans les efforts humanitaires, car j'ai commencé mon travail humanitaire à l'âge de 16 ans et, au cours de la dernière décennie, j'ai considérablement élargi à la fois la portée et la portée de mes initiatives", a-t-elle déclaré, ajoutant que la jeunesse était considérée comme un facteur positif, car le jury appréciait les jeunes individus qui se consacrent au bien-être de la communauté.

Première femme pakistanaise lauréate du prestigieux Diana Legacy Award, Alizey Khan pose avec son prix à Londres, au Royaume-Uni, le 14 mars 2024. (Photo Fournie)
Première femme pakistanaise lauréate du prestigieux Diana Legacy Award, Alizey Khan pose avec son prix à Londres, au Royaume-Uni, le 14 mars 2024. (Photo Fournie)

Parlant de son travail au fil des ans, elle a déclaré qu'elle s'était principalement concentrée sur la distribution de nourriture aux personnes méritantes, dont plusieurs personnes transgenres et veuves.

En outre, son organisation fournit des repas complets lors des mariages pour les familles défavorisées, et a déjà soutenu environ 200 d'entre elles.

"Nous nous chargeons également de l'adoption et de la réforme de divers orphelinats, dont nous assurons le fonctionnement efficace en les mettant en relation avec notre réseau de donateurs", a-t-elle ajouté.

Pour le prix Diana, Mme Khan a déclaré que le travail d'une personne devait démontrer sa durabilité et son impact sur une longue période de temps.

"Parmi les 20 lauréats du prix de l'héritage de cette année, c'est moi qui ai réuni le plus de fonds pour mes projets, renforçant ainsi leur impact et leur durabilité", a-t-elle ajouté.

Mme Khan a déclaré que le prix offrait plus qu'une simple reconnaissance puisqu'il comprenait également un programme de mentorat de deux ans avec des sessions régulières avec des personnes de son propre domaine.

"Les participants ont accès à des programmes leur permettant d'entrer en contact avec des experts dans le domaine et d'accéder à des possibilités de collecte de fonds", a-t-elle poursuivi, ajoutant que l'attention portée au domaine de l'aide sociale contribuait à la croissance et à la viabilité des initiatives des participants.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


L'Australie tente de sauver ses derniers «dragons sans oreilles»

Cette photo prise le 25 mars 2024 montre un lézard dragon sans oreilles des prairies dans la réserve naturelle de Tidbinbilla, située à la périphérie de la capitale australienne, Canberra. (AFP)
Cette photo prise le 25 mars 2024 montre un lézard dragon sans oreilles des prairies dans la réserve naturelle de Tidbinbilla, située à la périphérie de la capitale australienne, Canberra. (AFP)
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  • L'Australie abrite des milliers d'espèces animales uniques, parmi lesquelles 1 130 espèces de reptiles qu'on ne trouve nulle part ailleurs au monde
  • Une centaine d'espèces de la flore et de la faune endémique d'Australie ont disparu au cours des 300 dernières années

SYDNEY: Quand il voit le jour, le "dragon des prairies sans oreilles" d'Australie est à peine plus grand que le petit doigt. Mais le minuscule reptile doit répondre à un défi de taille : échapper à l'extinction de son espèce.

En 2019, des scientifiques de Canberra avaient recensé plusieurs centaines de spécimens de ce lézard à l'état sauvage. Cette année, ils n'en ont compté que 11.

Le dragon des prairies sans oreilles, une espèce endémique d'Australie, a une peau brune claire, striée de longues bandes blanches. Dépourvu d'oreilles et de tympans fonctionnels, il mesure 15 centimètres à l'âge adulte.

L'Australie en compte quatre espèces, dont trois "en danger critique d'extinction" - la catégorie la plus menacée - la quatrième étant classée comme "en danger".

Sans mesures de conservation, les dragons en "danger critique d'extinction" seront probablement éteints dans les 20 prochaines années. Mais "si nous gérons correctement leur conservation, nous pouvons les faire revenir", espère Bernd Gruber, professeur à l'université de Canberra, qui œuvre en ce sens.

«Espoir»

L'Australie abrite des milliers d'espèces animales uniques, parmi lesquelles 1.130 espèces de reptiles qu'on ne trouve nulle part ailleurs au monde.

Victimes du changement climatique, de la prolifération de plantes et d'animaux invasifs et de la destruction de leurs habitats - en 2019, les incendies de forêt ont brûlé plus de 19 millions d'hectares - les espèces endémiques d'Australie sont dans une situation critique.

Une centaine d'espèces de la flore et de la faune endémique d'Australie ont disparu au cours des 300 dernières années.

Pour éviter un tel sort aux dragons sans oreilles, plusieurs programmes de conservation ont été mis en place dans le pays, comptant au total jusqu'à 90 animaux voués à être relâchés dans la nature.

M. Gruber supervise l'un d'entre eux, dans la région de Canberra, où des compartiments abritent chacun un lézard, disposant d'herbe, d'un terrier et d'une lampe chauffante.

L'accouplement des spécimens est particulièrement épineux.

Les femelles préférant choisir leur partenaire, les scientifiques doivent leur présenter plusieurs mâles jusqu'à ce qu'elles en acceptent un.

Il leur faut aussi déterminer - à l'aide d'analyses génétiques - quels sont les lézards compatibles et assurer la diversité génétique de leur progéniture.

M. Gruber prend soin d'une vingtaine de bébés lézards, à peine éclos. Il y a encore trois semaines, les scientifiques ne voyaient pas leurs œufs. "Il y a un sentiment d'espoir quand on les regarde", confie-t-il à l'AFP.

Ces reptiles vivent exclusivement dans des prairies tempérées, un habitat que l'étalement urbain a pratiquement réduit à néant, explique la chargée de campagne de l'Australian Conservation Foundation, Peta Bulling. Seules 0,5% des prairies de l'époque de la colonisation européenne subsistent encore.

"Nous ne comprenons pas tout ce que les dragons des prairies sans oreilles font dans l'écosystème, mais nous pouvons supposer qu'ils jouent un rôle important dans la gestion des populations d'invertébrés", explique-t-elle à l'AFP. "Ils vivent dans des terriers creusés dans le sol, ce qui fait qu'ils aèrent probablement le sol", détaille-t-elle.

Pour Mme Bulling, si les programmes d'élevage sont importants, il est vital de protéger les habitats où les lézards élevés pourront être réintroduits.

Ces animaux "sont hautement spécialisés pour vivre dans leur habitat, mais ils ne s'adapteront pas rapidement au changement", prévient-elle.

L'année dernière, des scientifiques ont observé pour la première fois depuis 50 ans un petit nombre de spécimens d'une autre espèce de dragons sans oreilles, dans une zone tenue secrète pour les protéger.