L'armée, argument de poids de Poutine

Le président russe, Vladimir Poutine. (AFP).
Le président russe, Vladimir Poutine. (AFP).
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Publié le Mercredi 16 février 2022

L'armée, argument de poids de Poutine

  • L'armée russe, modernisée à grands frais et expérimentée au combat, a affiché sa puissance lors du conflit actuel avec l'Ukraine
  • Avec environ 900.000 hommes en service actif, elle est équipée d'armes dernier cri, et dispose de fusées hypersoniques vantées comme «invincibles» par Vladimir Poutine

MOSCOU: Qu'elle campe aux frontières ukrainiennes ou multiplie les manoeuvres, l'armée russe, modernisée à grands frais et rompue au combat, peut se targuer d'effrayer de nouveau les Occidentaux, même si elle ne suffit pas à la Russie pour imposer ses vues.

Pendant des semaines, jusqu'à l'annonce d'un premier retrait mardi dans un signe de détente, les troupes russes ont affiché leurs importants effectifs et leur force aux frontières de l'Ukraine, laissant craindre une invasion imminente de ce voisin pro-occidental.

La démonstration fut telle que les Etats-Unis ont préféré abandonner leur ambassade à Kiev, sans qu'un soldat russe ait eu à franchir la frontière. 

Sur les réseaux sociaux, les images de témoins montraient des dizaines de chars parqués dans la neige, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière ukrainienne, ou encore d'interminables trains qui, wagon après wagon, transportaient des blindés flambant neufs.

Plus à l'ouest, l'armée elle-même affichait ses forces au Bélarus dans des vidéos à la direction léchée: lance-missiles démarrant à l'unisson, soldats en camouflage blanc et kalachnikov à la main, avions de combat patrouillant à la frontière...

En mer Méditerranée et en mer Noire, ce sont navires de guerre de surface et sous-marins qui paradaient aux portes de l'Union européenne.

La Russie n'a pas manqué, comme à chaque crise avec les Occidentaux, de gonfler ses muscles. Car, après les années d'errance post-soviétiques, c'est d'une armée modernisée à grands coups de milliards et forte de son expérience en Syrie, dont Moscou dispose.

Opérations réussies

Avec environ 900.000 hommes en service actif, elle est équipée d'armes dernier cri telles que les systèmes antiaériens S-400 et les missiles de croisière Kalibr. Elle dispose aussi de fusées hypersoniques vantées comme "invincibles" par Vladimir Poutine car capables de surpasser le bouclier antimissile américain installé en Europe orientale et honni des Russes.

Reconstruites après des années de sous-financement et de corruption, les forces russes n'ont plus rien à voir avec celles en haillons qui peinaient à contrer les rebelles en Tchétchénie dans les années 1990.

"Les efforts de modernisation au cours des dix dernières années ont été nécessaires pour la survie même de l'armée russe", souligne l'expert militaire Vassili Kachine de la Haute école d'économie de Moscou. "Il a fallu changer une grande partie de équipements, reconstruire l'armée (...) et cela a été fait en un temps record". 

Ses succès récents sur des théâtres étrangers ont démontré sa capacité de projection.

Intervenant en Syrie depuis 2015, elle y a mené des bombardements massifs qui ont permis aux forces de Bachar al-Assad de reprendre l'essentiel du pays aux rebelles et jihadistes. 

Un an plus tôt, les forces spéciales organisaient l'annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée sans qu'aucun coup de feu ne soit tiré. Et en 2008, Moscou a mis en déroute la petite armée géorgienne.

«Supériorité» américaine 

Sauf que la démonstration de force, qui accompagne désormais systématiquement l'affirmation des intérêts russes sur la scène internationale, apparaît comme le seul véritable levier à disposition de Moscou face aux Occidentaux.

Si la Russie fournit une part importante du gaz dont a besoin l'Europe, elle ne peut guère se servir de cette arme sans priver son budget d'importants revenus. A l'inverse, Moscou souffrirait d'être coupé des marchés financiers et du dollar comme l'en ont menacé les Occidentaux dans la crise ukrainienne.

Et la modernisation militaire a privé de fonds les efforts de diversification économique, les grands chantiers d'infrastructures et le social, autant de secteurs en demande de réformes urgentes. 

Sur le plan militaire, l'armée russe, certes impressionnante, ne rivalise pas encore en termes d'armes conventionnelles avec les Etats-Unis.

Selon M. Kachine, la Russie serait capable de "résister un certain temps" mais Washington conserve une "supériorité militaire très importante". Du coup, un conflit avec les Occidentaux porte le risque d'une "escalade incontrôlable et d'un débordement de la guerre dans une phase nucléaire".

Un scénario catastrophe évoqué par le maître du Kremlin lui-même.

"Si l'Ukraine rejoint l'Otan et récupère militairement la Crimée, les pays européens seront automatiquement entraînés dans un conflit militaire avec la Russie", avertissait Vladimir Poutine la semaine dernière, soulignant que son pays était "l'une des principales puissances nucléaires".

Une telle guerre "n'aurait pas de vainqueur", a-t-il relevé.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.


Les États-Unis proposent à l'ONU une résolution pour « une fin rapide » du conflit en Ukraine

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine.  (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
  • Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE.

NATIONS-UNIES : Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale du pays, après une nouvelle attaque du président américain Donald Trump contre son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Dans un communiqué, le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a exhorté les pays membres de l'ONU à approuver cette nouvelle résolution « simple » et « historique », et « tous les États membres à la soutenir, afin de tracer un chemin vers la paix ».

« Cette résolution est une bonne idée », a rapidement commenté l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassili Nebenzia, déplorant toutefois l'absence de référence « aux racines » du conflit.

Les Européens, désarçonnés par l'ouverture du dialogue américano-russe sur l'Ukraine, n'avaient pas réagi samedi matin à la proposition américaine.

« Nous n'avons pas de commentaire pour l'instant », a simplement indiqué l'ambassadeur français à l'ONU Nicolas de Rivière, alors que l'Assemblée générale doit se réunir lundi.

Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE, mais aussi à un mépris pour les principes fondamentaux du droit international », a déclaré à l'AFP Richard Gowan, de l'International Crisis Group.

L'Assemblée générale de l'ONU se réunit lundi pour marquer le troisième anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine.

À cette occasion, l'Ukraine et les Européens ont préparé un projet de résolution qui souligne la nécessité de « redoubler » d'efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre « cette année », et prend note des initiatives de plusieurs États membres ayant présenté « leur vision pour un accord de paix complet et durable ».

Le texte réitère également les précédentes demandes de l'Assemblée générale, appelant à un retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes d'Ukraine ainsi qu'à la cessation des attaques de la Russie contre l'Ukraine.

Ces précédents votes avaient rassemblé plus de 140 voix sur les 193 États membres.

Les nouvelles salves de M. Trump contre M. Zelensky interviennent alors que la visite de l'émissaire du président américain, Keith Kellogg, semblait avoir apaisé la situation. Ces nouvelles attaques de M. Trump contre M. Zelensky font suite à des premières invectives virulentes plus tôt dans la semaine, qui avaient suscité une vive réaction de la part de Kiev et la stupéfaction de ses alliés européens.

M. Zelensky avait déclaré avoir eu des échanges « productifs » avec M. Kellogg, et ce dernier l'avait qualifié de « dirigeant courageux et assiégé d'une nation en guerre ».

Vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réaffirmé que le président Vladimir Poutine était « ouvert » à des pourparlers de paix.

La Russie exige notamment que l'Ukraine lui cède quatre régions ukrainiennes, en plus de la Crimée qu'elle a annexée en 2014, et qu'elle n'adhère jamais à l'Otan. Des conditions jugées inacceptables par les autorités ukrainiennes qui demandent à leurs alliés des garanties de sécurité solides.

M. Trump et ses collaborateurs ont jugé « irréaliste » l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan et son ambition de reprendre ses territoires perdus à la Russie.

Sur le terrain, la situation reste difficile pour les troupes ukrainiennes. L'armée russe a revendiqué vendredi la prise de deux localités dans l'est de l'Ukraine.