CHICAGO: Le Liban deviendra «un autre État en faillite dominé par l’Iran et gangrené par la corruption», si des mesures cruciales ne sont pas prises rapidement pour mettre fin à la corruption gouvernementale au sein du pays, relever les défis économiques auxquels il est confronté et résoudre le problème «paralysant» de la violence du Hezbollah.
Telle est la conclusion d’un rapport publié mardi par deux grands groupes de réflexion sur le Moyen-Orient, basés à Washington, l’American Task Force on Lebanon (AFTL) et le Middle East Institute. Pour marquer l’occasion, ils ont organisé une conférence en ligne au cours de laquelle les intervenants ont discuté des moyens afin de mettre en œuvre les solutions préconisées par le rapport et de rétablir l’ordre au Liban.
Une grande partie de la discussion a porté sur le rôle du Hezbollah. Les participants soutiennent que le résultat des négociations américaines avec l’Iran sur son programme nucléaire pourrait avoir des répercussions importantes pour le Liban.
Paul Salem, président du Middle East Institute, affirme que le Liban fait face à de nombreux défis, notamment son inaptitude à éliminer le sectarisme au cours des trente et une dernières années, mais que l’enjeu le plus grand est la présence et le pouvoir continus du Hezbollah en tant qu’acteur non étatique qui a prêté serment d’allégeance à l'Iran.
«La présence du Hezbollah est un problème paralysant», déclare-t-il. «L’État libanais n’est pas souverain, indépendamment de la manière dont il réforme son système gouvernemental, lutte contre la corruption ou même prend les bonnes décisions», poursuit-il.
«Il ne contrôle pas ses frontières. Il ne contrôle pas son territoire. Les décisions de guerre et de paix ne sont pas entre ses mains. Il existe une armée à part entière qui est très fière d’avoir prêté serment d’allégeance à un pays étranger – la République islamique d’Iran. Cette armée ne répond ni au peuple libanais ni à l’État libanais. C'est également un problème paralysant.»
M. Salem soutient que le pouvoir du Hezbollah au Liban ne changera pas, même si les États-Unis et l’Iran parviennent à un accord à Vienne.
«Avec ou sans retour à l’accord sur le nucléaire, l’Iran reste attaché à une stratégie de défense avancée. Par ailleurs, il est déterminé à mettre sur pied des milices dans d’autres pays», précise-t-il. «Dans le passé, c’était le Liban. Désormais, c’est le Liban, l’Irak, la Syrie et le Yémen», poursuit-il.
Dans son intervention, le membre du Congrès Darrell Issa affirme la volonté des États-Unis de s’engager aux côtés du Liban pour la tenue d’«élections libres et équitables» en mai pour le Parlement et plus tard dans l’année pour la présidence.
Edward M. Gabriel, président de l’ATFL et ancien ambassadeur; Brian Katulis, vice-président des politiques du Middle East Institute et la journaliste Joyce Karam ont également participé à la discussion, animée par Jean Abi Nader, vice-président de l’ATFL pour les politiques.
«Conclure correctement un accord avec l’Iran est notre seule chance de faire face à cette pression extérieure exercée sur le Liban», insiste M. Gabriel, en faisant allusion aux liens entre le Hezbollah et l’Iran.
«Les États-Unis doivent comprendre qu’ils vont traverser des moments compliqués avec le Golfe, avec Israël et les Américains d’origine libanaise, s’ils ne trouvent pas de solution contre les mandataires du terrorisme dans la région.»
M. Katulis souligne que le monde doit dépasser l’idée que «le Liban est perdu». Il espère que le président des États-Unis, Joe Biden, qui a commencé son mandat en mettant l’accent sur l’Iran et le Yémen, comprendra que l’avenir du Liban «est directement lié à la question de l’Iran».
M. Abi Nader affirme, quant à lui, que le fait de sauver le Liban est «crucial pour les États-Unis».
«Sans le soutien ferme des États-Unis et de leurs alliés, l’Iran et la Syrie domineraient le Liban et constitueraient probablement une plus grande menace terroriste pour les États-Unis. Cela ne sert pas les intérêts américains», déclare-t-il.
Le rapport des deux groupes de réflexion détaille un certain nombre d’obstacles qui doivent être levés pour améliorer la situation au Liban et mettre fin aux crises auxquelles il est confronté. De même, il appelle le président Biden et les États-Unis à diriger une «coalition diplomatique» pour encourager la mise en œuvre de réformes politiques et économiques.
Tous les intervenants sont d’accord sur la nécessité de «réduire considérablement la corruption à tous les niveaux au sein du gouvernement» au Liban.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com