WASHINGTON : Joe Biden a maintenu la pression sur Moscou en annonçant l'envoi prochain d'un nombre limité de soldats en Europe de l'Est, malgré les échanges tous azimuts qui laissent une voie ouverte pour un règlement diplomatique des tensions autour de l'Ukraine.
De son côté, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a appelé vendredi les Occidentaux à ne pas semer la "panique" autour du risque d'une invasion russe de son pays, pendant que le président russe Vladimir Poutine et son homologue français Emmanuel Macron convenaient de la "nécessité d'une désescalade".
"Je vais envoyer des troupes américaines en Europe de l'Est et dans les pays de l'Otan prochainement, pas beaucoup", a annoncé vendredi le président américain, dont le pays a déjà placé 8 500 militaires en alerte pour renforcer l'Otan.
Le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, a estimé qu'avec plus de 100 000 soldats russes déployés aux frontières ukrainiennes, la Russie avait amassé des forces suffisantes pour une invasion, mais il a souligné qu'un conflit entre l'Ukraine et la Russie n'était "pas inéluctable".
"Il reste du temps et du champ pour la diplomatie", a-t-il ajouté.
Le chef d'état-major américain, le général Mark Milley, a pour sa part estimé qu'une attaque à grande échelle de Moscou aurait des conséquences "épouvantables", prévoyant "un nombre important de victimes" en cas d'offensive.
A Londres, Boris Johnson s'est dit "déterminé à accélérer les efforts diplomatiques et à renforcer la dissuasion pour éviter une effusion de sang en Europe", selon une porte-parole de Downing Street vendredi soir. Le Premier ministre britannique doit s'entretenir dans les prochains jours avec Vladimir Poutine, avant un déplacement dans la région.
Pour sa part, le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki est attendu mardi à Kiev. "La Pologne soutient l'Ukraine pour empêcher l'agression de la Russie", a tweeté le porte-parole du gouvernement polonais Piotr Muller.
«Climat propice au dialogue»
Lors d'une conférence de presse vendredi à Kiev, le président ukrainien avait appelé à ne pas céder à la "panique", tout en appelant la Russie à "faire des pas pour prouver" qu'elle ne va pas passer à l'attaque.
La Russie dément tout projet d'invasion, mais s'estime menacée par l'expansion de l'Otan depuis 20 ans et par le soutien occidental à l'Ukraine.
Elle a donc lié la désescalade à la fin de la politique d'élargissement de l'Alliance atlantique, notamment à l'Ukraine, et au retour des déploiements militaires occidentaux aux frontières de 1997.
Les Etats-Unis et l'Otan ont formellement rejeté mercredi ces demandes.
"Les réponses des Etats-Unis et de l'Otan n'ont pas tenu compte des inquiétudes fondamentales de la Russie", a relevé le Kremlin dans un communiqué consacré à l'entretien entre MM. Poutine et Macron vendredi.
«Aucune intention offensive»
"Le président Poutine n'a exprimé aucune intention offensive", a noté la présidence française, ajoutant que les deux dirigeants sont convenus de la "nécessité d'une désescalade" et d'une poursuite du "dialogue."
Les Européens et les Américains ont promis des sanctions féroces et sans précédent en cas d'attaque contre l'Ukraine.
Ont été évoqués le gazoduc stratégique Nord Stream 2 entre la Russie et l'Allemagne, ou encore l'accès des Russes aux transactions en dollars, la monnaie reine dans les échanges internationaux.
Les Etats-Unis ont par ailleurs saisi jeudi le Conseil de sécurité de l'ONU, réclamant une réunion lundi en raison de la "menace claire" que fait peser à leurs yeux la Russie sur "la paix et la sécurité internationales".
Sanctions russes contre l'UE
De son côté, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a assuré que la Russie ne voulait "pas de guerre" et préférait la "voie de la diplomatie".
Les pays européens et les Etats-Unis doivent "faire très attention" à ne pas faire de concessions à la Russie ou offrir aux Russes "quelque chose qu'ils n'avaient pas avant", a estimé vendredi dans un entretien avec l'AFP la Première ministre estonienne Kaja Kallas. "La seule qui peut procéder à une désescalade est la Russie."
Moscou avait prévenu qu'un rejet de ses demandes allait se traduire par des représailles d'ampleur, sans plus de précisions.
Vendredi soir, la diplomatie russe a annoncé interdire d'entrée en Russie des représentants des forces de l'ordre, des organes législatifs et exécutifs de certains pays de l'UE qui sont "personnellement responsables de la propagation de la politique antirusse".
Des députés russes en vue ont quant à eux proposé que la Russie reconnaisse l'indépendance des territoires séparatistes prorusses en Ukraine et qu'elle les arme.
Le Kremlin est déjà considéré comme l'instigateur de ce conflit dans l'est du territoire ukrainien, qui a été déclenché en 2014 peu après l'annexion russe de la Crimée ukrainienne et dans la foulée d'une révolution pro-occidentale à Kiev.