PARIS: Le recteur de la Mosquée de Paris avertit Emmanuel Macron de ne pas simplement «mettre en place des mesures gadgets pour servir une communication politique sans lendemain» avec sa stratégie de lutte contre les «séparatismes» que le chef de l'Etat présente vendredi.
«Je veux être franc: s’il s’agit uniquement de mettre en place des mesures gadgets pour servir une communication politique sans lendemain, je préfère ne pas m’engager», écrit Chems-eddine Hafiz, dans une tribune publiée dans Le Monde de vendredi.
«Je soutiendrai complètement l’action du président de la République face au séparatisme islamiste à condition que la démarche s’inscrive dans une politique volontariste, résolument républicaine et qu’elle s'éloigne de l'opportunisme politicien et des coups de communication qui s’invitent généralement dans le débat à la veille des échéances électorales», dit-il.
Sur le constat -«existe-t-il véritablement sur notre territoire une volonté de se délier de la République ? -, M. Hafiz répond: «oui (...) sans ambages». «Certains représentants de l’islam de France – comme certains responsables politiques d’ailleurs – sont très souvent dans le déni . Un certain nombre d’acteurs représentatifs, d’élus locaux se sont refusés à voir la situation».
Et de mettre en cause «une ghettoïsation progressive qui s’est installée» depuis quarante ans, «d’abord urbanistique, ensuite sociologique, enfin économique, avant de devenir idéologique et identitaire».
Il est «fondamental de rappeler les défaillances de l’État», souligne-t-il, pointant du doigt «le désengagement de la puissance publique à l'échelle communale». «Les services de l’Etat et certaines collectivités locales ont compensé cet abandon par des ravalements de façade et des subventions généreusement distribuées, souvent sans contrôle, à des associations, généralement clientèle d’élus locaux. Ce sont autant d’attitudes (...) irresponsables, autant d’aventures qui ont livré une partie de notre jeunesse, sinon aux recruteurs islamistes, au monde de la délinquance».
Pour M. Hafiz, «quand l’État jacobin, censé jouer un rôle régulateur, organise lui-même la ghettoïsation ethnique et religieuse, quand il crée lui-même les conditions de l’échec scolaire (...), tolère que des organisations extrémistes et des associations liées à l’islam politique s'occupent du soutien scolaire, il ne faut guère s’étonner du résultat».
Il propose d’«identifier» les «partenaires» pouvant participer à la lutte contre ce «séparatisme». Il plaide pour ne «pas jeter la suspicion sur tout musulman souhaitant respecter sereinement les préceptes de sa religion», mais aussi de «désenclaver les zones dans lesquels prospèrent des groupes islamistes». Autre recommandation: apporter un «contre-discours» sur les réseaux sociaux.