LONDRES : Un an après la sortie effective du Royaume-Uni de l'Union européenne, les contrôles aux frontières des marchandises en provenance du continent seront renforcés progressivement côté britannique en 2022, suscitant l'inquiétude des PME du pays, en particulier dans l'agroalimentaire.
"Le degré de préparation pour les contrôles entrant en vigueur au 1er janvier est contrasté", explique l'organisation patronale CBI: si les grandes entreprises sont globalement rodées aux nouvelles pratiques, "la préparation des PME est plus faible".
Les denrées alimentaires constituent la principale source d'inquiétude, selon le CBI, car elles risquent d'être affectées par une multitude de problèmes: "paperasse, coûts élevés, perte de nourriture périssable et disponibilité des services vétérinaires" pour établir les certificats exigés en douane.
Pour éviter des files de camions à la frontière à cause du Brexit, le gouvernement britannique a déjà reporté à plusieurs reprises l'entrée en vigueur complète des formalités pour les importations venues d'Europe - même si certaines marchandises, comme l'alcool ou le tabac, sont déjà soumises à contrôles.
"Les entreprises ont été confrontées à une série de défis au cours des derniers mois" et "le gouvernement a pris en compte les demandes pour leur donner plus de temps pour s'adapter", justifie l'exécutif dans un document détaillant l'entrée en vigueur des contrôles frontaliers avec l'UE et actualisé en décembre.
- Mise en place progressive -
Selon le calendrier actuel des autorités britanniques, des déclarations de douanes complètes et certains contrôles seront introduits dès le 1er janvier, ainsi que l'exigence d'une notification préalable à l'importation de produits sanitaires et phyto-sanitaires.
Mais la certification et les contrôles physiques sur certains types de viandes ou de plantes, par exemple, attendront le 1er juillet et même le 1er septembre pour l'ensemble des produits laitiers. Ils s'appliqueront à partir du 1er novembre pour "tous les autres produits réglementés d'origine animale".
En dépit d'une entrée en vigueur progressive des nouvelles règles, la Fédération britannique des petites entreprises (FSB) dit s'attendre à des "perturbations importantes" des importations en provenance de l'UE.
"Dans la période chargée à l'approche de Noël, de nombreuses petites entreprises importatrices ont eu du mal à se préparer", d'autant qu'elles font déjà face à des perturbations des chaînes d'approvisionnement, des pénuries de personnel et des inquiétudes liées à la nouvelle vague de Covid-19 explique Martin McTague, vice-président de la FSB.
Selon la fédération, un tiers des petits importateurs britanniques ne sont même pas au courant des changements à venir, et parmi ceux qui savent, seul un sur quatre est prêt. "Pour certains, les démarches et les coûts supplémentaires signifieront qu'il ne sera plus possible pour eux d'importer".
- "Problèmes inévitables" -
Si elle n'anticipe pas de "grands embouteillages de camions dans les ports ou aux frontières", la fédération britannique des industries alimentaires (FDF) juge pour sa part "inévitable que les entreprises rencontrent des problèmes" qui pourraient dans certains cas "bloquer complètement les livraisons de fournisseurs de l'UE, au moins temporairement".
Le National Audit Office (NAO), le contrôleur des comptes britanniques, a prévenu début novembre que le gouvernement devait mettre les bouchées doubles pour être prêt à l'augmentation des contrôles aux frontières, notamment en ce qui concerne la mise en place de nouveaux systèmes ou infrastructures dédiées.
La surveillance des importations est nécessaire pour lutter contre la contrebande et les activités illicites, soulignait la NAO, mais aussi à cause du déséquilibre créé alors que l'UE contrôle déjà de son côté les biens en provenance du Royaume-Uni.
En dépit d'un accord commercial entre l'UE et le Royaume-Uni, le commerce de biens entre l'île et le continent avait baissé fortement juste après l'entrée en vigueur effective du Brexit, avant de rebondir.
La situation de l'Irlande du Nord est à part, alors que le protocole nord-irlandais la maintient de fait dans le marché unique européen. C'est l'une des sources de tensions principales entre Bruxelles et Londres, qui exige de renégocier l'accord en profondeur.