Bilan de l’année 2021: les Iraniens victimes de maladies, de sécheresse, de privation économique et de répression politique

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Publié le Mercredi 22 décembre 2021

Bilan de l’année 2021: les Iraniens victimes de maladies, de sécheresse, de privation économique et de répression politique

  • Près de cent trente mille Iraniens ont succombé au virus et, avec très peu de personnes vaccinées, le nombre de morts devrait continuer de grimper
  • L’investiture en août du président iranien, Ebrahim Raïssi – un partisan de la ligne dure choisi par Ali Khamenei et directement impliqué dans des crimes contre l’humanité – n’a fait qu’exacerber la douleur des Iraniens en 2021

LONDRES: Peu de pays ont été aussi durement touchés par la pandémie de Covid-19 que l’Iran. Plus de cent vingt-cinq mille Iraniens sont morts et le pays a connu, à plusieurs reprises, des confinements très sévères pour tenter de freiner la propagation du virus.

En plus de la sécheresse, de la violence et de la répression, la pandémie a fait de 2021 une année particulièrement sombre pour le peuple iranien. L’élection d’un nouveau président, partisan de la ligne dure, n’a fait qu’exacerber leur douleur – et le pire pourrait encore être à venir pour la population iranienne qui vit en captivité, avertissent les experts.

Les répercussions de la pandémie sur la société civile, les droits et les libertés en République islamique sont graves. Elles ont contribué à éloigner davantage le pays des principes des droits de l’homme, du respect et de la liberté, selon les observateurs.

Nassim Papayianni, militante au sein de l’équipe iranienne d’Amnesty International, déclare à Arab News: «La réaction des autorités face à la pandémie de Covid-19 a directement affecté le droit à la santé du peuple iranien. Les autorités ont largement été critiquées, notamment en raison de leur manque de transparence et de leur incapacité à remédier aux pénuries de vaccins, de lits d'hôpitaux, d’approvisionnement en oxygène et d’infirmières.»

Le président sortant, Hassan Rohani (à gauche), participe à une conférence de presse aux côtés du nouveau président, Ebrahim Raïssi (à droite), dans le cadre de sa visite pour féliciter l’ultraconservateur d’avoir remporté l’élection présidentielle. (AFP/Présidence iranienne)
Le président sortant, Hassan Rohani (à gauche), participe à une conférence de presse aux côtés du nouveau président, Ebrahim Raïssi (à droite), dans le cadre de sa visite pour féliciter l’ultraconservateur d’avoir remporté l’élection présidentielle. (AFP/Présidence iranienne)

Selon elle, la crise dans le pays aurait été aggravée par des décisions provenant des plus hautes instances gouvernementales.

«Bien que l’Iran ait initié son programme de vaccination contre la Covid-19 en février, moins de 6 % de la population avait été vaccinée en août 2021. C’est dû en grande partie à la décision du guide suprême, Ali Khamenei, en janvier 2021, d’interdire les vaccins produits au Royaume-Uni et aux États-Unis», précise-t-elle.

Ali Khamenei est revenu plus tard sur cette décision, autorisant l’importation de vaccins étrangers. Cependant, le mal était déjà fait. Près de cent trente mille Iraniens ont succombé au virus et, avec si peu de personnes vaccinées, le nombre de morts devrait continuer de grimper.

Nassim Papayianni dénonce également la manière dont l’Iran traite sa population ethniquement arabe au Khouzistan, qui a manifesté cette année contre le prélèvement d’eau dans sa province.

Les Iraniens manifestent pour exprimer leur colère, à la suite de l’assèchement de la rivière vitale de leur province, en raison de la sécheresse et du détournement des eaux, dans la ville centrale d’Ispahan, en novembre. (AFP)
Les Iraniens manifestent pour exprimer leur colère, à la suite de l’assèchement de la rivière vitale de leur province, en raison de la sécheresse et du détournement des eaux, dans la ville centrale d’Ispahan, en novembre. (AFP)

«L’aggravation de la crise de l’eau en Iran prive les gens de leur droit à une eau propre et salubre, et elle a conduit à plusieurs manifestations, notamment au Khouzistan. Les chercheurs qui travaillent dans le domaine de l’environnement affirment que les autorités n’ont pas pris les mesures adéquates pour faire face à la crise. Plutôt que de s’attaquer à cette crise environnementale, les autorités iraniennes ont pris les militants écologistes pour cible.»

L’investiture en août du président iranien, Ebrahim Raïssi – un partisan de la ligne dure choisi par Ali Khamenei et directement impliqué dans des crimes contre l’humanité – n’a fait qu’exacerber la douleur des Iraniens en 2021.

«Que M. Raïssi puisse accéder à la présidence au lieu de faire l’objet d’une enquête pour crimes contre l’humanité, en termes de meurtres, de disparitions forcées et de tortures, est un rappel de l’impunité systématique qui règne en maître en Iran», ajoute la militante.

Elle affirme qu’Amnesty International dispose de preuves qui montrent que M. Raïssi est directement impliqué dans les «comités de la mort» qui ont conduit à l’exécution sommaire de milliers de prisonniers politiques par la République islamique en 1988.

L’Iran fait partie des pays les plus durement touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
L’Iran fait partie des pays les plus durement touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)

Ebrahim Raïssi a mené des opérations de disparitions forcées et d’exécutions extrajudiciaires de plusieurs milliers de dissidents politiques dans les prisons d’Evin et de Gohardasht, près de Téhéran, entre fin juillet et début septembre 1988, poursuit la militante.

«Les corps des victimes ont été, pour la plupart, enterrés dans des fosses communes anonymes.»

Elle déclare qu’Amnesty International a demandé que M. Raïssi fasse l’objet d’une enquête pour crimes contre l’humanité que constituent les meurtres, les disparitions forcées et la torture, conformément au droit international et aux normes internationales.

En chiffres

* Quatre-vingt-seize Kurdes iraniens arrêtés par la sécurité intérieure depuis le 6 janvier 2021.

* Cinquante-trois Iraniens exécutés depuis le 19 décembre 2020, dont un tiers environ sont des Baloutches.

* 6,17 millions de cas de Covid-19 depuis 2020 (au 21 décembre 2021).

En parlant des massacres de 1988, Bob Blackman, député du parti conservateur britannique, explique à Arab News: «Les circonstances qui entourent le sort des victimes et le lieu où se trouvent leurs corps sont, à ce jour, systématiquement dissimulées par les autorités iraniennes.»

Il valide l’opinion d’Amnesty International au sujet d’Ebrahim Raïssi, affirmant que l’ancien responsable du pouvoir judiciaire s’apparente davantage à un suspect principal qu’à un dirigeant et qu’il devrait faire l’objet d’une enquête pour crimes contre l’humanité au lieu d’être élu à la tête d’un pays.

M. Blackman, un critique de longue date des violations des droits de l’homme en Iran, dénonce également l’utilisation par Téhéran de l’enlèvement comme outil diplomatique.

Le député affirme qu’il ne voit aucune fin à la stratégie adoptée par le régime et il recommande aux citoyens britanniques ayant des liens avec l’Iran de rester à l’écart du pays pour leur propre sécurité.

Richard Ratcliffe, époux de Nazanin Zaghari-Ratcliffe, une Irano-Britannique détenue en Iran depuis 2016, est assis sous une tente devant le ministère des Affaires étrangères à Londres en octobre. (AFP)
Richard Ratcliffe, époux de Nazanin Zaghari-Ratcliffe, une Irano-Britannique détenue en Iran depuis 2016, est assis sous une tente devant le ministère des Affaires étrangères à Londres en octobre. (AFP)

L’affaire Nazanin Zaghari-Ratcliffe, une mère de famille anglo-iranienne détenue en Iran depuis près de six ans pour avoir comploté en vue de renverser le régime, a fait la une des journaux au Royaume-Uni tout au long de l'année. Elle est devenue l’emblème de l’approche de Téhéran en matière de diplomatie avec l’Occident.

«La prise d’otages est une technique associée à la République islamique depuis les premiers jours de son Histoire. Au moins neuf Britanniques ont été détenus par les autorités iraniennes depuis 2013», précise M. Blackman.

Il insiste sur les mises en garde du gouvernement britannique contre les voyages en Iran et il déclare: «Les dangers auxquels les gens pourraient être confrontés incluent la détention arbitraire et le manque d’accès aux droits humains et juridiques fondamentaux.»

L’année écoulée a été sombre pour la liberté d’expression, la sécurité des journalistes et l’accès à des informations impartiales en République islamique.

«Le traitement infligé aux journalistes s’est détérioré car le nouveau président ultraconservateur étouffe la dissidence», déclare à Arab News Yeganeh Rezaian, chercheuse principale sur l’Iran, au sein du Comité pour la protection des journalistes.

Le taux d’inflation en Iran a atteint 45,2 % en août 2021. Il s’agit du taux le plus élevé en vingt-six ans. (AFP)
Le taux d’inflation en Iran a atteint 45,2 % en août 2021. Il s’agit du taux le plus élevé en vingt-six ans. (AFP)

«L’épuisement des ressources a contraint de nombreux journalistes à accepter d’autres emplois et un nombre croissant choisissent de fuir le pays, souvent au péril de leur vie, plutôt que de continuer à travailler en Iran.»

Elle ajoute: «La pandémie a eu une incidence profonde sur le secteur de l’information. Plusieurs journalistes ont été sanctionnés pour avoir rendu compte avec précision des répercussions de la pandémie. Les médias d’État, quant à eux, ont systématiquement sous-estimé la dévastation et ils ont publié de fausses informations sur les vaccins et les prétendus remèdes contre le virus.»

La chercheuse affirme que cette tendance ne montre aucun signe de ralentissement, pas tant que M. Raïssi reste au pouvoir du moins.

«En tant qu’ancien responsable du pouvoir judiciaire en Iran, Ebrahim Raïssi avait un bilan déplorable en matière d’abus contre les journalistes. Les tribunaux serviront probablement de plus en plus comme outil de répression sous sa surveillance.»

Après un an de répression et de désespoir, il semble que les souffrances du peuple iranien ne soient pas près de prendre fin – une situation sinistre créée par son propre gouvernement.

 

 Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Au Pakistan, le mois d'avril «le plus pluvieux» depuis 1961

Vue générale du débordement de la rivière Jhelum après de fortes pluies à Muzaffarabad, au Cachemire sous administration pakistanaise, le 29 avril 2024. (AFP)
Vue générale du débordement de la rivière Jhelum après de fortes pluies à Muzaffarabad, au Cachemire sous administration pakistanaise, le 29 avril 2024. (AFP)
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  • Beaucoup s'inquiètent désormais au Pakistan: les pluies d'avril ont déjà tué au moins 144 personnes, dont des dizaines d'enfants dans l'écroulement de leur maison sous des pluies torentielles
  • Outre les inondations, le pays a aussi été éprouvé par des canicules mortelles et une pollution atmosphérique parmi les pires au monde

ISLAMABAD, Pakistan : Si une grande partie de l'Asie connaît une vague de chaleur sans précédent, le Pakistan, lui, vient de vivre son «avril le plus pluvieux depuis 1961», avec des températures près d'un degré plus basses qu'à l'habitude.

Comme souvent dans le pays, le cinquième le plus peuplé du monde et l'un des plus exposés aux phénomènes climatiques extrêmes, experts et météorologues pointent du doigt le changement climatique.

Le pays pauvre d'Asie du Sud ne cesse de répéter que ses 240 millions d'habitants (environ 3% de la population mondiale) ne sont responsables que de moins de 1% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Beaucoup s'inquiètent désormais au Pakistan: les pluies d'avril ont déjà tué au moins 144 personnes, dont des dizaines d'enfants dans l'écroulement de leur maison sous des pluies torentielles. Mais la mousson, et son lot d'inondations, de crues subites et de dégâts, doit arriver en juillet et durera jusqu'en septembre.

Outre les inondations, le pays a aussi été éprouvé par des canicules mortelles et une pollution atmosphérique parmi les pires au monde, autant de phénomènes dont l'impact est aggravé, disent les experts, par un manque d'infrastructures et une mauvaise gouvernance.

En avril, les précipitations ont atteint «59,3 millimètres», bien au-delà des moyennes habituelles de 22,5 millimètres, détaille un rapport des services de météorologie publié tard vendredi.

Le Balouchistan, la plus grande province du Pakistan aux frontières de l'Iran et de l'Afghanistan, a connu l'augmentation la plus importante du pays. Là, notent les services de météorologie, les précipitations ont été quatre fois et demie supérieures aux normales saisonnières.

Le bilan humain le plus lourd, avec 84 morts dont 38 enfants, a en revanche été enregistré dans la province du Khyber Pakhtunkhwa, dans le nord-ouest frontalier de l'Afghanistan, où 3.500 habitations ont été endommagées.

- «Météo imprévisible» -

Et alors que des Philippines à la Birmanie en passant par l'Inde, des millions de personnes suffoquent sous une vague de chaleur inédite, le Pakistan a vu sa température moyenne mensuelle baisser à 23,67 degrés, contre 24,54 habituellement, poursuit le rapport.

Pour Zaheer Ahmad Babar, porte-parole des services météorologiques, le changement climatique explique ce mois inhabituel.

«Le changement climatique est un facteur important qui influe sur les tendances météo imprévisibles dans notre région», affirme-t-il à l'AFP.

En 2022, le pays pauvre d'Asie du Sud avait subi des inondations dévastatrices qui avaient touché près d'un tiers de son territoire et affecté plus de 33 millions de personnes, faisant plus de 1.700 morts.

Dans des régions du Pendjab, province la plus peuplée et grenier à céréales du pays, les récoltes ont souffert récemment des pluies abondantes et de la grêle.

«Les crues subites ont provoqué des dégâts importants à de grandes surfaces de cultures, en particulier celle du blé, qui était prêt à être récoltée», a indiqué l'agence onusienne OCHA dans un rapport récent.

«Ceci a entraîné des pertes économiques importantes pour les cultivateurs et les villages».

«On assiste quasiment chaque année à des événements liés aux changements climatiques. Et pourtant on n'y est toujours pas préparé», constate l'avocat et militant écologiste Ahmad Rafay Alam.

La responsabilité du climat «incombe à nos gouvernements provinciaux et fédéral, mais ceux-ci accordent la priorité aux questions politiques», dit-il.

Si le Pakistan pâtit actuellement de précipitations élevées, début avril, Islamabad annonçait être confronté à une pénurie d'eau d'environ 30% par rapport à ses besoins au début de la saison des semis pour le riz et le coton.

Les autorités pointait du doigt un enneigement hivernal moins important qu'à l'habitude dans la région des glaciers du Nord.

Plus d'un an et demi plus tard, souligne l'ONU, près de 10 millions d'enfants avaient encore besoin d'aide humanitaire pour survivre dans les zones touchées par les pluies diluviennes qui ont tout emporté en 2022.

Pour l'Unicef, «les enfants pakistanais sont pris dans un cercle vicieux de sècheresse et d'inondation».

«De leur conception à leur arrivée à l'âge adulte, le développement des cerveaux des enfants, de leurs poumons et de leur système immunitaire est affecté par leur environnement», poursuit l'Unicef qui s'inquiète pour toute une génération.

«Les risques qu'ils encourent du fait du changement climatique sont considérés comme extrêmement élevés», s'alarme l'agence onusienne.


Dublin: des étudiants campent sur le campus du Trinity College contre la guerre à Gaza

Vue de l'enceinte du Trinity College de Dublin. (Photo Paul Faith AFP)
Vue de l'enceinte du Trinity College de Dublin. (Photo Paul Faith AFP)
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  • Le président du syndicat étudiant TCDSU de l'université, Laszlo Molnarfi, a affirmé sur la chaîne RTE que les manifestants demandent à l'université de couper ses liens avec Israël
  • L'opposition à l'intervention militaire d'Israël à Gaza est très forte en Irlande où des marches appelant à un cessez-le-feu ont rassemblé des milliers de personnes dans la rue

DUBLIN, Irlande : Des étudiants de la prestigieuse université Trinity College de Dublin ont installé un campement sur le campus de l'établissement pour protester contre l'offensive militaire israélienne à Gaza, bloquant samedi l'entrée d'un bâtiment qui attire habituellement de nombreux touristes.

Les manifestants ont décrit leur mobilisation comme un «campement en solidarité avec la Palestine», sur fonds de multiplication de ces mobilisations en Europe et aux États-Unis.

Ils sont plusieurs dizaines à avoir installé des tentes vendredi soir dans plusieurs endroits du campus, plaçant des bancs devant la bibliothèque qui contient «le Livre de Kells», un célèbre manuscrit médiéval que les touristes viennent voir nombreux dans la capitale irlandaise.

Le président du syndicat étudiant TCDSU de l'université, Laszlo Molnarfi, a affirmé sur la chaîne RTE que les manifestants demandent à l'université de couper ses liens avec Israël.

«Un campement non autorisé de BDS (mouvement qui appelle au boycott d'Israël) est présent à Trinity», a indiqué l'établissement dans un communiqué.

«Pour assurer la sécurité, l'accès au campus sera restreint aux étudiants, personnels, résidents et membres du département des sports, a-t-il ajouté, prévenant que l'accès des visiteurs serait interdit ce samedi.

«Même si Trinity soutient le droit des étudiants à manifester, les manifestations doivent se tenir dans le cadre des règles de l'université», a encore indiqué l'établissement.

Parties des campus américains, où elles ont fait l'objet d'une répression des forces de l'ordre, les mobilisations contre l'offensive israélienne à Gaza se sont propagées un peu partout dans le monde ces derniers jours.

L'opposition à l'intervention militaire d'Israël à Gaza est très forte en Irlande où des marches appelant à un cessez-le-feu ont rassemblé des milliers de personnes dans la rue.

Le gouvernement lui-même est très critique vis-à-vis de l'attitude du gouvernement israélien dirigé par Benjamin Netanyahu depuis le début du conflit, déclenché après l'attaque sanglante du Hamas en Israël le 7 octobre.

Le nouveau Premier ministre irlandais Simon Harris s'est dit prêt mi-avril à reconnaître un État palestinien, y voyant un moyen de contribuer au processus de paix au Moyen-Orient.

En février, le gouvernement irlandais avait demandé à la Commission européenne, aux côtés de l'Espagne, de vérifier sur Israël respectait bien les droits humains à Gaza.

Plus de 400 artistes irlandais ont appelé dans une lettre commune à boycotter le concours international de chanson de l'Eurovision en raison de la participation d'Israël.


Aux Etats-Unis, les étudiants propalestiniens cherchent un nouveau souffle après des arrestations massives

Des étudiants et des militants pro-palestiniens dansent lors d'un rassemblement dans un campement sur le campus de l'université Brown à Providence, Rhode Island, le 29 avril 2024. La Maison Blanche a insisté le 28 avril sur le fait que les manifestations pro-palestiniennes qui ont secoué les universités américaines ces dernières semaines devaient rester pacifiques, après que la police a arrêté environ 275 personnes sur quatre campus différents au cours du week-end. (Photo : Joseph Prezioso / AFP)
Des étudiants et des militants pro-palestiniens dansent lors d'un rassemblement dans un campement sur le campus de l'université Brown à Providence, Rhode Island, le 29 avril 2024. La Maison Blanche a insisté le 28 avril sur le fait que les manifestations pro-palestiniennes qui ont secoué les universités américaines ces dernières semaines devaient rester pacifiques, après que la police a arrêté environ 275 personnes sur quatre campus différents au cours du week-end. (Photo : Joseph Prezioso / AFP)
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  • A l'Université de Chicago, l'administration a indiqué dans un communiqué que faute d'un accord avec les protestataires, le moment était venu de disperser le rassemblement
  • Depuis le 17 avril, une nouvelle vague de mobilisation pour Gaza déferle sur les campus américains, évoquant, dans une moindre ampleur, les manifestations contre la guerre du Vietnam dans les années 1960-70

NEW YORK : Les manifestations propalestiniennes qui secouent les campus américains depuis quelques semaines cherchent un nouveau souffle, après des dispersions par la police, des arrestations massives et un sévère rappel à l'ordre par la Maison Blanche.

Tôt vendredi, la police a démantelé sans heurts un campement à l'université de New York (NYU), à la demande de l'établissement.

A l'Université de Chicago, l'administration, qui a fait état sur X d'«informations sur des altercations physiques» sur son campus, a indiqué dans un communiqué que faute d'un accord avec les protestataires, le moment était venu de disperser le rassemblement.

Les protestataires à l'université de Riverside, en Californie (ouest), sont parvenus à un accord avec l'administration et devaient mettre fin à leur mouvement avant 00H00 samedi (07H00 GMT). Des compromis similaires avaient permis l'évacuation sans heurts des universités Rutgers (New Jersey, est) et Brown (Rhode Island, est).

Sur d'autres campus, les forces de l'ordre sont intervenues manu militari ces derniers jours, comme à Columbia à New York et à UCLA à Los Angeles.

Près de 2.000 personnes en tout ont été interpellées, selon un bilan établi par plusieurs médias américains.

Très critiquée par des étudiants et au sein du corps enseignant pour avoir deux fois appelé la police à intervenir - des images qui ont fait le tour du monde - la présidente de Columbia, Minouche Shafik, a évoqué la «tourmente» dans son établissement.

«Ces deux dernières semaines ont été parmi les plus difficiles de l'histoire de Columbia», a-t-elle dit dans une vidéo publiée vendredi sur les réseaux sociaux, affirmant que l'occupation d'un bâtiment par des étudiants avait été «un acte violent».

«Nous avons beaucoup à faire, mais je m'engage à oeuvrer chaque jour et avec chacun d'entre vous pour reconstruire la communauté sur notre campus», a-t-elle ajouté.

Depuis le 17 avril, une nouvelle vague de mobilisation pour Gaza déferle sur les campus américains, évoquant, dans une moindre ampleur, les manifestations contre la guerre du Vietnam dans les années 1960-70.

En plus de réclamer la fin du conflit à Gaza, ces étudiants appellent les universités à rompre leurs relations avec Israël et à se désengager de leurs investissements en lien avec ce pays.

Ils dénoncent aussi l'appui quasi inconditionnel des Etats-Unis à leur allié.

Israël est engagé dans une offensive massive dans la bande de Gaza, en représailles à l'attaque du Hamas le 7 octobre sur son sol.

- Vietnam -

Jeudi, lors d'une courte allocution, le président démocrate Joe Biden, longtemps muet sur les manifestations, a martelé que «l'ordre devait prévaloir».

Cela lui a valu à la fois les critiques de la droite, qui l'a jugé trop complaisant, et l'indignation des partisans des manifestants.

«Il existe un droit à manifester, pas un droit à provoquer le chaos», a lancé l'octogénaire, candidat face au républicain Donald Trump à la présidentielle de novembre.

Son ministre de l'Education, Miguel Cardona, a envoyé selon la chaîne CNN une lettre à des dirigeants d'universités dans laquelle il se dit «incroyablement préoccupé par les informations sur de la haine antisémite à l'encontre d'étudiants sur certains campus».

Les manifestations ont ravivé le débat aux Etats-Unis, déjà tendu voire violent depuis l'attaque du Hamas, sur la liberté d'expression, l'antisionisme et ce qui constitue de l'antisémitisme.

D'un côté, des étudiants et enseignants accusent leurs universités de chercher à censurer un discours politique, de l'autre plusieurs personnalités, dont des élus du Congrès, affirment que les militants attisent l'antisémitisme.

La question pourrait plomber la course de M. Biden à la Maison Blanche.

«Cela pourrait être le Vietnam de Biden», a averti sur CNN le sénateur de gauche Bernie Sanders.

«Je crains vraiment que le président Biden ne se mette dans une position où il s'aliène non seulement les jeunes, mais une grande partie de la base démocrate», a-t-il ajouté.

Côté républicain, Donald Trump a qualifié les manifestants de «tarés de la gauche radicale», qu'il faut «arrêter maintenant».

La mobilisation a inspiré les militants propalestiniens à travers le monde, en France, comme dans la prestigieuse école parisienne Sciences Po, ou à l'université McGill au Canada et à l'UNAM à Mexico.

A rebours d'autres institutions, l'université Brown, dans l'Etat américain du Rhode Island, s'est accordée avec les manifestants sur le démantèlement de leur campement en échange d'un vote sur un éventuel «désinvestissement».