PARIS : "Planification écologique", "protectionnisme solidaire", "VIe République": le programme présidentiel de Jean-Luc Mélenchon, "L'Avenir en commun" (AEC), sort jeudi légèrement remanié par rapport à 2017, signe de la confiance inaltérable, et parfois décriée, du candidat LFI en ses idées.
"Vous allez voir, toutes les idées qu'ils vont sortir dans les prochaines semaines auront été dans l'AEC depuis 2017", claironnait récemment devant la presse le chef des Insoumis à propos des autres candidats de gauche.
Le droit de vote dès 16 ans proposé par sa concurrente socialiste Anne Hidalgo? L'Insoumis rappelle qu'il le défend depuis de nombreuses années. La volonté déclarée de l'écologiste Yannick Jadot de "réindustrialiser le pays"? Il l'adoube, en remarquant que "le discours de M. Jadot évolue vers des positions beaucoup plus proches des nôtres".
"On revendique la continuité, la base très forte de ce programme vendu en 2017 à 360 000 exemplaires", et "dont on est fiers", explique à l'AFP la coordinatrice du programme Clémence Guetté.
La convocation d'une assemblée constituante pour fonder une VIe République plus parlementaire, la planification étatique de la "bifurcation écologique", "le partage des richesses" obtenu grâce à une taxation accrue des salaires supérieurs à 4 000 euros, la retraite à 60 ans: autant de piliers du programme de 2017 qui sont repris pour 2022, rassemblés dans un livre vendu trois euros en ligne et dans les librairies .
Mais Clémence Guetté et ses équipes ont procédé à un patient travail d'actualisation et d'approfondissement, s'appuyant notamment sur les propositions de loi des 17 députés. "Le degré de précision et le caractère opérationnel sont plus forts", se félicite Mme Guetté.
Le programme, aux 84 mesures-clé et 690 propositions au total, est ainsi davantage fourni sur l'égalité femmes-hommes (salaires, lutte contre les violences, parité), la planification écologique (200 milliards d'investissements sur des "grands chantiers" de transports, d'énergie et agricoles, la protection des "biens communs comme l'eau"...) ou encore les outre-mers.
«Petit livre rouge»
Le thème de l'Union européenne connaît aussi un changement important, même si les Insoumis le souhaitent discret. Il ne s'agit plus de menacer l'UE de sortie de la France en cas de refus de ses pays membres de réviser les traités, jugés trop contraignants, pour les investissements publics notamment.
Les Insoumis proposent désormais un "opt-out", c'est-à-dire la désobéissance aux traités sur des points stratégiques.
Visuellement, quand la couverture de la version 2017 jouait la sobriété d'un manuel pratique, faisant la part belle au logo insoumis, celle de 2022 arbore un portrait de Jean-Luc Mélenchon regardant frontalement l'électeur, tout sourire, en veste et col roulé noirs.
Preuve que La France insoumise s'appuie sur la notoriété de son fondateur et leader. "Il y a une énorme hypocrisie, un déni collectif chez les Insoumis, qui prétendent voter pour un programme et non pour une personne", sourit un ancien cadre de LFI.
"Mettre autant en avant le programme, pour dire que ce sont les idées qui sont importantes", est une manière de répondre au "reproche qu'on serait une armée de petits soldats de Mélenchon", confie Merlin, militant LFI parisien de 21 ans.
Il conçoit qu'on puisse, sur le plan symbolique, "comparer l'Avenir en commun avec le petit livre rouge de Mao ou le manifeste du Parti communiste". Mais "c'est l'un des programmes les plus complets", assure-t-il.
Pour sa part, l'ancien cadre de LFI dénonce la "sacralité de l'AEC, programme qui serait intouchable, empêchant de s'entendre avec le reste de la gauche" - dont les sept candidatures ne totalisent qu'un quart des intentions de vote selon les sondages.
Les Insoumis organisent ce weekend une grande distribution des 60 000 exemplaires déjà tirés, vendredi devant les universités, et samedi et dimanche dans toute la France.