BEYROUTH : Les autorités sanitaires libanaises ont ouvert une enquête après que des images vidéo qui auraient été filmées par un médecin montraient des patients émaciés attachés à des lits sales dans un centre médical de la ville.
Les images documentées par l'association caritative Wataawanou ont suscité l'indignation du public lors de leur diffusion sur les chaînes d'information vendredi.
;Les images ont mis en évidence les mauvaises conditions dans les chambres et les couloirs du centre de santé Santa Maria à Byblos qui accueille 55 hommes et 15 femmes souffrant de maladies neurologiques et mentales.
Ces images montraient des patients à l'apparence squelettique assis ou allongés sur des lits sales, incapables de parler, et certains avec les mains attachées à leurs lits. Des pots contenant de la nourriture pourrie et des miches de pain moisi ont été aperçus dans une cuisine, et d'autres images semblaient représenter des salles de bains insalubres.
Après que la vidéo soit devenue virale, le ministre libanais de la Santé, le Dr Firas Abiad, et le ministre des Affaires sociales, Hector Hajjar, ont visité le centre samedi pour inspecter les locaux avec une équipe d'experts du bureau de l'Organisation mondiale de la santé au Liban.
«Une enquête a été ouverte pour que les auteurs soient tenus responsables et définir les raisons pour lesquelles le centre a atteint un état aussi dégradé sans en informer le ministère, qui a le devoir de veiller à ce que ses patients soient traités dans de bonnes conditions», a avisé Abiad.
Le ministère a pris des dispositions afin que les patients de Santa Maria soient transférés dans d'autres établissements en attendant l'achèvement d'une opération de nettoyage.
Un scandale sanitaire similaire a été révélé en février 2019 à l'hôpital Al-Fanar d'Al-Msayleh, dans le sud du Liban. Là encore, les patients ont été transférés vers d'autres centres de santé, dont celui de Byblos qui a accueilli 38 personnes sur environ 90 patients.
Après la diffusion des dernières images, des responsables du centre de santé de Santa Maria auraient tenté de faire un nettoyage rapide et ont empêché les journalistes d'entrer dans les locaux.
Abiad a déclaré à Arab News que «Malgré la tentative de nettoyage, ce que nous avons vu montre une grande négligence et à quel point la crise économique au Liban a affecté le centre».
Le Liban est plongé dans une crise économique et financière qui a propulsé 55% de la population du pays en dessous du seuil de pauvreté.
«Tous les centres d'aide sociale dans le monde sont confrontés à des problèmes, mais de nombreuses raisons nous ont conduits ici au Liban», a ajouté Abiad. «Les familles des patients ne les surveillent pas. Ils les laissent dans les centres et les oublient. Si une famille s'était plainte, nous aurions agi immédiatement».
«De plus, les contrôleurs sanitaires affiliés à notre ministère ne font plus leur travail. Le contrôleur de la santé qui est censé visiter le centre a déclaré que le coût de venir ici de Beyrouth est équivalent à la moitié de son salaire mensuel».
«Le ministère de la Santé verse au centre LBP24 000 ($15,88) par jour pour chaque patient qu'il accueille, mais cette somme ne vaut plus rien maintenant.
«Le directeur du centre m'a affirmé que l'État ne pompe plus l'eau dans la région à cause du manque de gasoil dans les stations, et qu'il doit acheter l'eau lui-même, ce qui est extrêmement coûteux, il est donc naturel que les services de nettoyage se détériorent et par conséquent l'hygiène des patients », a expliqué le ministre.
Cependant, il a souligné qu'aucun de ces problèmes ne justifiait la situation dans laquelle se trouvait le centre de santé.
Abiad a constaté qu'il y avait environ 50 autres centres au Liban offrant des services similaires, et que le ministère avait distribué 2 000 cartes aux patients cette année leur permettant d'accéder aux installations.
«Des milliers d'autres ont déjà cette carte tandis que d'autres patients ont été placés dans de tels centres par leurs familles qui ne peuvent pas leur fournir les services de santé requis », a-t-il signalé.
Le directeur du centre médical Santa Maria, Joseph Harb, a justifié qu'il n'avait «pas reçu les frais dus depuis le début de 2021, s'élevant à LBP900 millions, ce qui constitue un obstacle majeur à l'approvisionnement en eau, en carburant et en nourriture».
Abiad a ajouté : «Ces centres n'ont pas reçu leurs cotisations en raison du retard des contrats en attente de transfert de crédits pour paiement. Les cotisations impayées sont calculées sur la base du taux officiel, soit LBP1 507 pour un $1, alors que les coûts que ces centres doivent supporter sont très élevés. Cela vaut également pour les hôpitaux et les associations de premier ordre, ce qui pose un problème majeur».
«Le système de santé au Liban est injuste. La grave crise économique a encore révélé ses défauts et ses inconvénients», a-t-il soutenu.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com