GLASGOW : Les âpres tractations à la COP26, capitale pour la lutte contre le réchauffement climatique vont se poursuivre au moins jusqu'à samedi pour tenter de trouver des compromis sur l'aide aux pays pauvres et les énergies fossiles.
Vendredi matin, la présidence britannique de cette conférence sur le climat a publié un deuxième projet de déclaration finale, mais la session plénière de l'après-midi a mis en lumière les divergences toujours importantes parmi les quelque 200 pays signataires de l'accord de Paris en 2016 et les négociations vont se poursuivre sans surprise dans la nuit, au delà du programme officiel qui se terminait à 18H00 locales (18H00 GMT).
Un nouveau texte sera publié samedi matin, avant une nouvelle séance plénière pour recueillir les diverses positions dans la matinée, a précisé dans un message le président de la COP26 Alok Sharma, qui espère désormais terminer ces deux semaines de marathon dans la journée de samedi.
Un échec à cette COP mettrait encore un peu plus en danger l'objectif de l'accord de Paris de limiter le réchauffement de la planète à "bien en deçà" de 2°C par rapport à l'ère pré-industrielle, si possible 1,5°C.
Le monde se dirige toujours vers un réchauffement "catastrophique" de +2,7°C, selon l'ONU, malgré les nouveaux engagements à l'échéance 2030 annoncés juste avant et depuis le début de la COP.
Un des points les plus disputés: l'enveloppe financière pour aider les pays les plus pauvres -- les moins responsables du changement climatique mais en première ligne face à ses impacts-- à réduire leurs émissions et à se préparer à affronter tempêtes, canicules et sécheresses qui se multiplient.
"Il faut mettre l'argent sur la table pour aider les pays en développement à faire les changements nécessaires (...) C'est ce qui doit se passer dans les heures qui viennent", a insisté le Premier ministre Boris Johnson sur la BBC vendredi après-midi.
"On ne pourra pas tout avoir à la COP, mais on peut commencer", a-t-il ajouté, semblant moins optimiste qu'avant le début de cette conférence de parvenir à son objectif proclamé de "garder 1,5°C vivant".
En 2009, les pays du Nord avaient promis de porter à partir de 2020 leur aide climat au Sud à 100 milliards par an. Mais la promesse n'est toujours pas tenue, aiguisant le ressentiment des pays en développement dans un contexte de crise sanitaire qui ajoute à leur fardeau.
Le projet de déclaration appelle les pays riches à remplir, et même aller au-delà de leur promesse non tenue. Et à doubler d'ici 2025 l'aide spécifiquement consacrée à l'adaptation aux effets du changement climatique, alors que c'est le financement des réductions d'émissions qui capte 75% du total.
Mais ces engagements ne suffisent pas, insistent les pays en développement. "Notre confiance a été brisée", a notamment souligné le représentant du Kenya.
Les plus pauvres, qui comptent pour une part insignifiante des émissions mondiales, insistent également pour que les financements prennent en compte les "pertes et préjudices" qu'ils subissent déjà à un rythme de plus en plus fréquent.
Mais sur ce point, le projet de déclaration propose juste d'accélérer la mise en oeuvre de dispositifs déjà prévus, sans objectifs chiffrés dans le temps.
"Nous sommes extrêmement déçus" que la proposition d'un dispositif spécifique n'ait pas été retenue, a lancé le représentant guinéen au nom du groupe G77+Chine (plus de 100 pays en développement et émergents).
Plusieurs ONG ont accusé l'UE et les Etats-Unis d'avoir bloqué cette demande, le groupe Climate Action Network y voyant un risque de "mettre la COP26 en danger". "Quitter la COP26 avec un résultat décent dépend largement de la volonté des Etats-Unis et de l'UE d'apporter un soutien aux pays en développement", a commenté Mohamed Adow, du think tank Power Shift Africa.
Le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans s'est toutefois dit certain de "trouver une solution pour aider les pays vulnérables à faire face aux destructions et aux dommages déjà causés par la crise climatique".
Les estimations de besoins de financements des groupes de pays moins développés vont maintenant de 750 milliards à 1300 milliards de dollars par an.
Autre question brûlante au coeur des négociations, les énergies fossiles, principales responsables du réchauffement de la planète.
«Mention» des énergies fossiles
Alors que l'accord de Paris ne mentionnait pas les énergies fossiles, le dernier projet de déclaration prévoit l'inclusion --adoucie par rapport à la première version-- de la sortie de leur financement.
Une mention soutenue notamment par l'UE et les Etats-Unis. L'émissaire américain John Kerry a même fustigé les subventions massives à ces énergies qui sont "la définition même de la folie".
De manière plus générale, pour tenter de limiter le réchauffement, le texte provisoire de la présidence britannique appelle les Etats membres à relever leurs engagements de réduction d'émissions plus régulièrement que prévu dans l'accord de Paris, et ce dès 2022. Même si la possibilité d'aménagements pour "circonstances nationales particulières" a été ajoutée.
"Notre question aux gros émetteurs et aux grandes économies, ici à Glasgow est celle-là: comment voulez-vous qu'on se souvienne de vous ?", a lancé Gabriela Bucher, de l'ONG Oxfam. "Comme ceux qui ont laissé les pyromanes brûler la planète ou comme ceux qui ont mené le monde vers la sécurité ?"