GLASGOW : Le Premier ministre britannique Boris Johnson a demandé mercredi "une impulsion forte" pour un accord à la COP26, assurant qu'il n'y aurait "pas d'excuse" pour échouer alors qu'un premier projet de décisions a reçu mercredi un accueil mitigé.
"Les négociations entrent dans le dur" et il faut "une impulsion forte pour nous faire franchir la ligne" d'arrivée, a lancé M. Johnson, revenu pour quelques heures à Glasgow, où se tient cette conférence climat considérée comme cruciale pour lutter contre un réchauffement qui s'annonce catastrophique.
"Il n'y a pas d'excuses" car "nous savons ce qui doit être fait, il nous faut juste le courage de le faire", a poursuivi le Premier ministre. Et d'interpeller les dirigeants du monde entier: "Allez-vous nous aider à saisir cette opportunité ou allez-vous nous en empêcher?"
Il a mis en garde contre la "colère" des populations en cas d'échec, et cité les questions de financements comme écueil principal guettant les négociations.
Après 10 jours de discussions, la présidence britannique de la COP avait diffusé dans la matinée un premier projet qui a provoqué des réactions mitigées, notamment des pays pauvres, qui insistent pour que les plus riches tiennent leur promesse d'aide.
Le texte, qui sera amendé d'ici la fin de la COP, prévue vendredi mais qui peut être retardée, appelle les pays à "réviser et renforcer" dès 2022 les contributions nationales (NDC) qui fixent leurs engagements à court terme.
L'accord de Paris de 2015 fixe leur révision à tous les cinq ans, mais de nombreux pays demandaient qu'elles le soient plus fréquemment.
Il s'agit, selon le texte, de rendre ces engagements "compatibles avec les objectifs de réchauffement de l'accord de Paris", c'est-à-dire "bien en deçà" de +2°C par rapport à l'ère pré-industrielle, si possible +1,5°C.
Londres a depuis le début affiché comme priorité de la COP26 de "maintenir 1,5°C en vie".
Car les dernières estimations de l'ONU sont alarmantes: malgré les nouveaux engagements à échéance 2030 pris par certains Etats, le monde est toujours sur la trajectoire d'un réchauffement "catastrophique" de +2,7°C d'ici la fin du siècle.
Le projet appelle donc à des "réductions rapides, fortes et soutenues des émissions mondiales" et encourage également les pays à "accélérer la sortie du charbon et des financements des énergies fossiles".
Une telle mention explicite des énergies fossiles, responsables de la plupart des émissions, est inédite, et ne figure notamment pas dans l'accord de Paris. Mais elle promet d'être âprement disputée jusqu'à la conclusion du texte final, notamment par les pays producteurs.
Sur le dossier brûlant du financement, le texte "relève avec regret" l'échec des pays développés à tenir leur promesse de mobiliser à partir de 2020 quelque 100 milliards par an d'aide climatique aux pays pauvres.
Souvent les moins pollueurs, ils sont aussi les plus exposés aux ravages du changement climatique, comme l'a rappelé le ministre des Affaires étrangères de l'archipel des Tuvalu, lançant aux délégués de la COP "nous sommes en train de couler", dans une vidéo filmée debout jusqu'à mi-cuisse dans l'océan.
Le texte n'avance aucune solution concrète sur le financement, mais appelle les donateurs à doubler les fonds accordés aux mesures "d'adaptation" aux effets du changement climatique.
L'adaptation ne représente actuellement qu'un quart environ de cette aide, contre 75% consacrés à la réduction d'émissions. Les pays pauvres revendiquent au minimum la parité entre les deux volets.
Concernant l'autre question très controversée des "pertes et dommages" déjà subis par les pays les plus exposés, le texte "reconnaît" le problème et "réitère l'urgence d'augmenter le soutien et l'action". Mais là encore sans modalités concrètes.
Les pays pauvres ont exprimé leur inquiétude lors d'une première réunion pour recueillir les commentaires des délégations.
Les pays du groupe G77+Chine (plus de 100 pays en développement et émergents) se sont dits "extrêmement préoccupés par l'absence de progrès", le groupe Afrique a insisté sur l'augmentation des fonds pour l'adaptation et les Pays les moins développés souligné que "l'ambition sur le seuil de 1,5°C doit être renforcée".
L'Alliance des petits Etats insulaires (AOSIS) a réclamé des progrès pour "répondre aux besoins des plus vulnérables", alors que le Climate Vulnerable Forum (CVF), qui représente plus d'un milliard de personnes de 54 pays, a regretté un texte qui "ne répond pas aux principales demandes des pays vulnérables".
Côté sciences, Joeri Rogelj, membre du groupe des experts ONU sur le climat a salué des "progrès", mais relevé que les engagements étaient pour l'heure "loin des objectifs de l'accord de Paris".