WASHINGTON : Dernier épisode en date dans la saga sur le sort des applications TikTok et WeChat aux Etats-Unis: les restrictions qui devaient empêcher à partir de dimanche l'utilisation normale de WeChat, du groupe chinois Tencent, ont été temporairement suspendues par une juge.
Le département du Commerce avait annoncé vendredi qu'il interdirait, au nom de la sécurité nationale, le téléchargement dans le pays d'une des applications les plus populaires en Chine.
Il avait aussi proscrit l'utilisation de l'application, utilisée par quelque 19 millions d'utilisateurs sur le sol américain pour la messagerie, les achats, les paiements et d'autres services, pour tout transfert financier et empêché tout service de support technique à WeChat.
En gros, « même si elle était techniquement disponible aux Américains l'ayant déjà téléchargée, l'application leur aurait probablement été inutile », a résumé la juge Laurel Beeler dans une décision consultée par l'AFP.
Les restrictions avaient été contestées en justice par un groupe d'utilisateurs, selon qui elles auraient fortement affecté les relations aussi bien professionnelles que personnelles au sein de la communauté sinophone aux Etats-Unis.
De nombreux usagers de WeChat s'inquiétaient de ne plus pouvoir communiquer avec leurs proches de part et d'autre du Pacifique.
Les plaignants ont démontré que la décision du département du Commerce posait de « sérieuses questions » sur le respect du premier amendement de la Constitution américaine, qui garantit la liberté d'expression, a estimé la juge.
« WeChat est dans les faits le seul moyen de communication pour de nombreux membres de la communauté, non seulement parce que la Chine interdit d'autres applications, mais aussi parce que les locuteurs chinois ayant une maîtrise limitée de l'anglais n'ont pas d'autre choix que WeChat », a-t-elle souligné.
Le département du Commerce n'avait pas dans l'immédiat répondu aux sollicitations de l'AFP sur ce qu'il comptait faire.
Accord pour TikTok
L'interdiction de téléchargement annoncée vendredi concernait aussi la populaire application de courtes vidéos TikTok, utilisée par 100 millions de personnes aux Etats-Unis.
Mais cette dernière a été repoussée samedi soir au 27 septembre dans la mesure où TikTok est parvenue à un accord sur la gestion de ses activités aux Etats-Unis avec Oracle et Walmart ayant reçu le feu vert du président américain.
Donald Trump affirme depuis des semaines, sans avoir rendu publics des éléments de preuve, que TikTok espionne pour le compte de Pékin et il avait donné à sa maison mère basée en Chine, ByteDance, jusqu'à dimanche pour céder les activités de TikTok sur le sol américain à une entreprise « made in USA ».
L'accord annoncé samedi doit encore être finalisé par les entreprises impliquées et approuvé par un comité de sécurité nationale du gouvernement américain.
Le département du Commerce avait justifié sa décision vendredi en estimant que « le Parti communiste chinois a démontré qu'il avait les moyens et l'intention d'utiliser ces applications pour menacer la sécurité nationale, la politique étrangère et l'économie des Etats-Unis ».
Il avait aussi affirmé dans un décret début août que WeChat récupérait « les données des visiteurs chinois aux Etats-Unis (...), ce qui permet au Parti communiste chinois d'espionner des citoyens chinois qui profitent peut-être des avantages d'une société libre pour la première fois de leur vie ».
Pour la juge Beeler toutefois, les preuves de menace pour la sécurité nationale liées spécifiquement à WeChat « sont modestes ».
La Chine avait réagi vivement aux menaces d'interdiction de téléchargement de TikTok et WeChat en dénonçant samedi « l'intimidation » des Etats-Unis et en instaurant un mécanisme lui permettant de restreindre les activités d'entreprises étrangères.
Contre une « liste d'entités non fiables » - dont les noms n'ont pas été rendus publics - Pékin prévoit des sanctions potentielles allant d'amendes à la restriction d'activités ou d'entrée de matériel et de personnel en Chine.