PARIS: Cible privilégiée des défenseurs des animaux, le patron des chasseurs Willy Schraen n'en a cure : il fustige sans relâche l' « idéologie » de « groupuscules violents » et l' « écologie punitive », persuadé de regagner les cœurs des Français en expliquant sans relâche sa « passion ».
A quelques jours d'un procès à Saint-Omer (Pas-de-Calais) de personnes l'ayant menacé de mort sur les réseaux sociaux, le président de la Fédération nationale des chasseurs (FNC) raconte avec son franc-parler habituel son « choix de vie ».
« La vie et la mort, ce n'est pas quelque chose qui nous bloque, la nature ce n'est pas le monde des Bisounours : ou tu manges ou tu es mangé », déclare-t-il dans son bureau aux murs couverts de trophées et de tableaux de scènes de chasse.
Dans une société de plus en plus sensible au bien-être animal, ses opposants dénoncent la chasse d'espèces menacées et des méthodes de chasse parfois « barbares ».
« On a des réflexes normaux et complètement sains : la quête d'un animal, le tuer à la chasse, le manger », répond Willy Schraen, 51 ans, qui dénonce toutefois les excès « ultraminoritaires » selon lui de ceux qui tuent des centaines d'oiseaux en une journée.
« Dans le fond, quand on regarde ce qu'il y a dans les grottes, par exemple Lascaux, est-ce que ce sont des carottes et des choux-fleurs dessinés sur les murs ? Je ne crois pas », poursuit cet originaire des Flandres.
Et si une image de « gros beaufs dans les campagnes » colle aux 1,1 million de chasseurs revendiqués, c'est parce que la population ne comprend pas la chasse, estime-t-il. La faute aux chasseurs eux-mêmes : « pendant trop longtemps, on s'est dit pour vivre heureux, vivons cachés. Et quand on ne comprend pas quelque chose, souvent on s'y oppose ».
Coups pour coups
Alors « on a décidé de sortir du bois, d'aller sous les rampes médiatiques et d'expliquer ». Depuis son élection à la tête de la FNC en 2016, Willy Schraen écume les plateaux télé pour regagner « le cœur de l'opinion publique », quitte à prendre des coups.
Des coups qu'il n'hésite pas à rendre. Si dans son livre publié récemment (« Un chasseur en campagne », éditions Gerfaut), il ne cache pas sa proximité et son admiration pour certains politiques, d'autres ne sont pas épargnés : « les bobos chantres de l'écologie punitive », la « catastrophe » Nicolas Hulot...
Quant à l'actuelle ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, dont le « cœur reste vert » malgré son passage à LREM, « c'est une femme intelligente, mais elle a malheureusement une grosse idéologie anti-chasse et anti-ruralité », affirme-t-il.
Après la victoire qu'il lui reconnaît sur la chasse à la glu, récemment suspendue par l'Elysée, le patron des chasseurs prédit des discussions difficiles avec sa ministre de tutelle.
Mais n'a-t-il pas l'oreille du président de la République lui-même ? « Pas toujours, la preuve » avec la glu, répond-il. Ce qui ne l'empêche pas d'être prêt à défendre les sujets qui lui tiennent à cœur directement auprès d'Emmanuel Macron, comme une réforme du système qui fait que les chasseurs doivent payer des millions d'euros d'indemnisation aux agriculteurs chaque année pour les dégâts causés par les sangliers.
« Guerres de religion »
S'il cultive cette proximité avec le monde politique, il écarte toute ambition politique nationale. Il espère en revanche la création d'un « groupe d'influence », rassemblant chasseurs, agriculteurs, pêcheurs, bouchers ou viticulteurs.
Un groupe pour défendre la ruralité dans son ensemble contre les attaques de groupuscules vegans ou antispécistes « extrémistes » qui « veulent imposer par la violence leur mode de vie », souligne Willy Schraen, qui compare ce conflit aux anciennes « guerres de religion ».
Une violence qui s'exprime de plus en plus en ligne, comme après ses propos au printemps sur la capture des chats errants retournés à la vie sauvage. Ses déclarations avaient provoqué un déferlement d'insultes, voire de menaces de mort sur lesquelles se penchera le tribunal de Saint-Omer jeudi.
« Est-ce qu'on doit continuer comme ça, avec une poubelle à ciel ouvert où n'importe quel abruti de service menace de mort quelqu'un, planqué derrière un clavier, dans l'impunité la plus totale ? », s'insurge le patron de la FNC.
Et si certains militants écologistes accusent à l'inverse les chasseurs de menaces et d'intimidations, il s'en défend.
« La violence n'est pas de notre côté. Si la violence était de notre côté, je vous rappelle juste qu'on est armé, ça se verrait tous les jours à la télévision au moment du journal ».