BERLIN: L'activité économique allemande a progressé sans éclat au troisième trimestre sur fond de pénuries mondiales bridant la reprise, tandis que des milliers de salariés ont manifesté vendredi pour la défense de l'emploi dans l'industrie, contrainte d'effectuer sa transition écologique.
Le Produit intérieur brut (PIB) de la première économie européenne a progressé de 1,8% au troisième trimestre, par rapport au trimestre précédent, où la croissance a été révisée à la hausse (1,9%), selon des données provisoires publiées vendredi par l'institut Destatis.
"La reprise de l'économie allemande s'est poursuivie au cours de l'été", écrit Destatis, principalement grâce à la poussée des dépenses de consommation privées.
Le secteur des services a tiré l'activité, grâce à la levée des restrictions liées à l'épidémie de coronavirus. Mais l'industrie, pilier du modèle allemand, est à la peine, par manque de composants pour répondre à la demande.
Sur un an, la croissance est de 2,5% au troisième trimestre, en données corrigées des variations saisonnières.
Le PIB du trimestre écoulé reste inférieur de 1,1% au niveau du dernier trimestre de 2019, qui avait précédé le plongeon lié à la propagation de l'épidémie de Covid-19, ajoute Destatis.
Le PIB allemand s'est moins effondré que dans d'autres pays européens durant la crise sanitaire, avec une récession de 4,9% en 2020, mais la reprise est plus poussive en raison des pénuries de matériaux sur les marchés mondiaux.
Le gouvernement allemand a, pour cette raison, révisé cette semaine à la baisse ses prévisions de croissance pour 2021, à 2,6% contre 3,5% encore attendu au printemps.
Le rythme de la croissance devrait singulièrement ralentir au quatrième trimestre, avertissent les économistes.
"Le problème de la chaîne d'approvisionnement demeure, et l'inflation élevée pèse sur la demande des consommateurs. Cela ralentira l'économie" durant l'hiver, a commenté Jens-Oliver Niklasch, économiste à la banque LBBW.
Le ministère de l'Economie estime pour sa part que la crise mondiale des chaînes logistiques ne fait que retarder le rebond et a prévu un "véritable boom" en 2022 avec une hausse du PIB attendue à 4,1%.
«Ici et non en Chine»
Vendredi, le puissant syndicat de la métallurgie IG Metall, a mobilisé ses troupes pour exiger du prochain gouvernement, comme du patronat, qu'ils protègent l'emploi au moment où l'industrie doit relever le défi climatique.
Environ 50 000 manifestants se sont rassemblés dans tout le pays, selon le syndicat.
"Nous attendons des politiciens qu'ils donnent un cadre pour garantir la sécurité des emplois en veillant à ce que, à l'avenir, les produits soient fabriqués ici et non en Chine", a déclaré à Francfort, Michael Erhardt, responsable d'IG Metall pour la ville, qui explique que 2.500 emplois ont été déjà perdus ces dernières années.
"Notre site sera fermé dans quelques années et nous sommes l'une des victimes de la soi-disant transformation (...), mais au fond il s'agit d'une liquidation", s'insurge Frank Grommeck, employé chez l'équipementier automobile Continental et chef du comité d'entreprise sur le site de Karben (Ouest), promis à la fermeture avec 1.100 emplois menacés.
La transition vers une industrie décarbonée réclame des investissements dans les infrastructures à hauteur de 500 milliards d'euros, avance IG Metall. "C'est intéressant de noter que les fédérations d'employeurs réclament la même chose", a souligné M. Erhardt.
La question des investissements d'avenir est au coeur des négociations entre les sociaux-démocrates, les écologistes et les libéraux qui tentent de former une coalition dirigée par Olaf Scholz pour succéder au gouvernement d'Angela Merkel.