Corruption présumée à La Défense : Une vieille affaire enfin jugée

Salle du tribunal de Nanterre, en banlieue parisienne (Bertrand Guay/AFP)
Salle du tribunal de Nanterre, en banlieue parisienne (Bertrand Guay/AFP)
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Publié le Samedi 19 septembre 2020

Corruption présumée à La Défense : Une vieille affaire enfin jugée

  • Ancien dirigeant des ex-Charbonnages de France, Jean Bonnefont est poursuivi devant le tribunal correctionnel pour avoir faussé entre 1999 et 2003 l'attribution du marché du chauffage et de la climatisation du premier quartier d'affaires d'Europe
  • Selon l'accusation, l'appel d'offres a été façonné de manière à écarter les candidats indésirables et deux offres étaient des offres "de couverture" censée simuler une concurrence

NANTERRE : "On marche sur la tête !" Me Olivier Baratelli ne décolère pas : son client est jugé à partir de lundi à Nanterre pour l'affaire de corruption présumée dite de la "chaufferie de la Défense", après vingt ans de procédures qui en ont fait l'un des plus vieux justiciables de France.

"Ça pourrait prêter à sourire de voir un vieil homme de (presque) 98 ans comparaître devant un tribunal", fulmine l'avocat, "mais la situation est beaucoup plus triste".

Ancien dirigeant des ex-Charbonnages de France, Jean Bonnefont est poursuivi devant le tribunal correctionnel, avec quatre autres chefs d'entreprises, pour avoir faussé entre 1999 et 2003 l'attribution du juteux marché du chauffage et de la climatisation du premier quartier d'affaires d'Europe, estimé à plusieurs centaines de millions d'euros.

L'affaire débute en 1998, lorsque le Syndicat mixte de chauffage urbain de La Défense (Sicudef) lance le renouvellement du marché que détenait depuis trente ans la société Climadef, filiale de Charbonnages de France.

Trois ans plus tard, il attribue la concession à un groupement d'entreprises baptisé Enertherm.

Mais les services de la répression des fraudes repèrent vite des anomalies dans le processus. Dès juin 2002, une première information judiciaire est ouverte des chefs de "corruption" et "trafic d'influence", puis une seconde en janvier suivant pour "abus de biens sociaux".

L'enquête met en cause, outre Jean Bonnefont, l'ex-numéro 3 de la Compagnie générale des Eaux-Vivendi Bernard Forterre, 82 ans, et l'homme d'affaires Antoine Benetti, 68 ans.

Le trio est accusé d'avoir faussé le marché afin d'assurer son attribution à Enertherm, dont les actionnaires étaient en réalité les mêmes que ceux de la Climadef, l'ancien concessionnaire.

Selon l'accusation, l'appel d'offres a, en amont, été façonné de manière à écarter les candidats indésirables et deux offres, celle de la société allemande RWE et celle de l'ex-concessionnaire, étaient des offres "de couverture" censée simuler une concurrence.

Au centre de l'entente présumée figurait Charles Ceccaldi-Raynaud, le président "omnipotent" du Sicudef, selon des témoignages de l'époque, mis en examen pour avoir perçu une commission de 5 millions de francs (760.000 euros de l'époque).

Grand absent

Il sera le grand absent du procès. L'ex-sénateur-maire de Puteaux est décédé en juillet 2019 à l'âge de 94 ans, quelques jours à peine avant que le parquet ne prenne ses réquisitions.

Un protagoniste du montage financier, Laurent Gimel, aujourd'hui en fuite au Maroc, a affirmé durant l'instruction avoir remis des sacoches de billets à un proche de M. Ceccaldi-Raynaud. Des pots-de-vin destinés, selon lui, à arroser les membres du Sicudef.

Renvoyés notamment pour "corruption" ou "complicité de corruption" active et passive et "abus de biens sociaux", les principaux prévenus contestent farouchement les faits.

Ils risquent jusqu'à 10 ans de prison et un million d'euros d'amende.

Lundi, leurs conseils entendent plaider en préambule la nullité de la procédure pour "violation du droit à être jugé dans un délai raisonnable". "Impossible" pour leurs clients de se défendre et pour le tribunal de statuer équitablement sur un dossier financier si ancien, estime Me Jean-Didier Belot, l'avocat de M. Forterre.

La défense a abondamment critiqué, lors des réquisitions, les nombreuses "erreurs factuelles" du parquet et une insuffisance de charges pesant contre le trio d'entrepreneurs. 

"Tout est singulier" dans ces 30 tomes de procédure, note lui aussi Me Steeve Ruben, l'avocat de Laurent Gimel.

Les méandres de cette instruction tentaculaire, sur laquelle se sont penchés successivement huit juges, ont également permis de révéler d'importantes sommes sur des comptes ouverts au Luxembourg par la famille Ceccaldi-Raynaud.

Charles Ceccaldi-Raynaud avait accusé sa propre fille Joëlle Ceccaldi-Raynaud, l'actuelle maire de Puteaux, d'avoir reçu ces pots-de-vin, se défendant personnellement de toute infraction.

L'élue LR, tout comme l'opticien Alain Afflelou apparu lui aussi dans le dossier, ont été entendus en tant que témoins assistés pour des fonds suspects versés ou perçus, mais ont finalement été mis hors de cause.

Le procès doit durer jusqu'à vendredi.


La manifestation de soutien à Le Pen "n'est pas un coup de force", dit Bardella

La présidente du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), l'eurodéputé Jordan Bardella (G) et la présidente du groupe parlementaire du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, quittent le palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 26 août 2024, après leur rencontre avec le président français. (Photo by Bertrand GUAY / AFP)
La présidente du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), l'eurodéputé Jordan Bardella (G) et la présidente du groupe parlementaire du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, quittent le palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 26 août 2024, après leur rencontre avec le président français. (Photo by Bertrand GUAY / AFP)
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  • « Ce n'est pas un coup de force, c'est au contraire une défense très claire et très profonde de l'État de droit et de la démocratie française.
  • « Cela nous semblait nécessaire que nous puissions nous exprimer directement aux Français.

STRASBOURG : La manifestation de soutien à Marine Le Pen prévue dimanche à Paris « n'est pas un coup de force », mais une mobilisation « pour la démocratie », a assuré mercredi Jordan Bardella, président du Rassemblement national, à des journalistes au Parlement européen à Strasbourg.

« Ce n'est pas un coup de force, c'est au contraire une défense très claire et très profonde de l'État de droit et de la démocratie française. C'est une mobilisation en réalité, non pas contre, mais pour la démocratie française », a déclaré l'eurodéputé au sujet de ce rassemblement annoncé par le RN après la condamnation de la triple candidate à la présidentielle à une peine d'inéligibilité immédiate.

« Cela nous semblait nécessaire (...) que nous puissions nous exprimer directement aux Français par l'intermédiaire de ces discours qui seront prononcés dimanche avec l'ensemble de nos cadres, de nos parlementaires et de nos militants », a-t-il ajouté.

Cette condamnation, que le RN qualifie de « scandale démocratique », compromet grandement ses chances de concourir une quatrième fois à la fonction suprême en 2027.

Pour Jordan Bardella, cela ne change « absolument rien » à sa relation avec Marine Le Pen, « si ce n'est qu'elle est peut-être encore plus forte qu'elle ne l'a été par le passé ».

« Je suis à ses côtés, je vais continuer à l'être (...) Nous allons évidemment mener le combat », a assuré l'eurodéputé qui faisait son retour au Parlement européen après avoir manqué les deux premiers jours de la session.

Il a qualifié de « bonne nouvelle » l'annonce de la justice qu'une décision en appel devrait être rendue « à l'été 2026 », donc bien avant la présidentielle.


Condamnation de Marine Le Pen: Macron rappelle au gouvernement l'indépendance de la justice

Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
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  • Le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés
  • Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours ».

PARIS : Mercredi en Conseil des ministres, le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés, après la condamnation de la cheffe de l'extrême droite Marine Le Pen qui a suscité des attaques contre les juges, ont rapporté des participants.

Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours », selon ces sources. La justice a déjà fait savoir qu'un nouveau procès en appel pourrait se tenir dans des délais qui laissent une porte ouverte à une éventuelle candidature présidentielle en 2027 de la leader du Rassemblement national (RN), principale formation d'extrême droite française. 

Devant la presse, à l'issue du Conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement Sophie Primas a rapporté mercredi les propos du chef de l'État.

« La première chose qu'il a rappelée, a poursuivi Mme Primas, est que la justice est évidemment indépendante et prend ses décisions en toute indépendance, et qu'il faut donc la respecter comme l'un des piliers de notre démocratie. La première, a-t-elle dit, est que la justice est indépendante et qu'elle prend ses décisions en toute indépendance et qu'il faut donc la respecter comme un pilier de notre démocratie.

« La troisième chose, pour rappeler que les menaces qui sont faites à l'encontre des magistrats sont absolument insupportables et intolérables, puisque nous sommes encore une fois dans une démocratie. Et la justice est tout à fait indépendante et doit être respectée », a-t-elle ajouté.

« Et la troisième chose, pour rappeler que chacun a le droit à une justice équivalente et que le droit est le même pour tous. »


Bac: l'épreuve de maths en première se précise pour l'an prochain

La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
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  • Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté
  • L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première,

PARIS : Le projet d'épreuve de mathématiques en classe de première pour l'an prochain, qui vise à mettre en œuvre le « choc des savoirs » annoncé par l'ex-ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal, a été présenté mardi devant une instance consultative de l'Éducation nationale, étape-clé avant sa publication.

Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté instaurant cette « épreuve terminale de culture mathématique aux baccalauréats général et technologique ».

Ils ont recueilli 0 voix pour, 27 contre, 31 abstentions et 4 refus de prendre part au vote (l'administration ne votant pas dans cette instance), un vote indicatif qui n'empêche pas la mise en œuvre de la réforme, selon des sources syndicales.

Cette épreuve écrite d'une durée de deux heures, qui entrera en vigueur au printemps 2026, sera « affectée d'un coefficient 2 » (points pris sur l’épreuve du Grand oral en terminale), selon ces textes, consultés par l'AFP.

L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première, un projet confirmé en novembre 2024 par sa successeure, Anne Genetet.

Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat du second degré (collèges et lycées), qualifie auprès de l'AFP la mesure de « rafistolage supplémentaire du bac Blanquer », décidé en 2019 par l'ex-ministre Jean-Michel Blanquer.

Pour Jérôme Fournier, secrétaire national du SE Unsa, la nouvelle épreuve « alourdit la fin de l'année pour les élèves et les correcteurs ».

La première partie, qui est commune à tous les élèves, sera sous forme de QCM et pourrait être corrigée automatiquement, ce à quoi « de nombreuses organisations syndicales sont opposées », a-t-il ajouté, tandis que la deuxième partie devrait consister en des résolutions de problèmes.

Des projets de textes ont par ailleurs été votés au CSE relatif à « la mise en place du +parcours renforcé+ en classe de seconde générale et technologique » ou professionnelle à partir de la rentrée 2026, avec trois votes pour, 45 contre et 13 abstentions.

Mis en place par la ministre Élisabeth Borne, ce parcours est destiné aux élèves n’ayant pas obtenu le diplôme du brevet. Son organisation relèvera « de l’autonomie de l’établissement sur la base indicative de deux heures hebdomadaires sur tout ou partie de l’année », selon le projet d'arrêté.

Sophie Vénétitay déplore « une coquille vide » tandis que Tristan Brams (CFDT Éducation) regrette l'absence de « moyens supplémentaires ».