NEW YORK : Le conseil de surveillance de Facebook a annoncé jeudi qu'il allait examiner la politique de modération des contenus publiés par des célébrités et a plus globalement accusé le réseau social de manquer de transparence dans ses décisions de supprimer ou non des publications.
"Facebook n'est pas clair avec les personnes qui se servent de ses plateformes. Nous avons observé de manière systématique des cas d'utilisateurs contraints de deviner pourquoi Facebook avait retiré leur contenu", a affirmé dans un rapport l'instance indépendante, parfois comparée à la "Cour suprême" du géant des réseaux sociaux.
Les annonces du conseil interviennent au moment où le groupe dirigé par Mark Zuckerberg affronte une avalanche de critiques de la part des régulateurs et des élus suite à des révélations sur ses pratiques commerciales.
Frances Haugen, une ancienne employée du groupe devenue lanceuse d'alerte, a récemment fait fuiter des documents internes à la presse et au gendarme boursier et accusé la plateforme de faire passer "les profits avant la sécurité" de ses utilisateurs.
Dans son rapport, le conseil de surveillance s'en prend en particulier au système de régulation des comptes "VIP" sur Facebook ou Instagram, regrettant que l'entreprise n'ait pas davantage communiqué sur ce sujet.
D'abord tenu secret, ce programme, baptisé "cross-check", a été dévoilé par le Wall Street Journal en septembre grâce aux documents transmis par Mme Haugen.
Le quotidien économique a montré que la modération des comptes de certaines personnalités n'obéissait pas aux mêmes impératifs que celle des utilisateurs lambda, les célébrités étant parfois autorisées à publier des messages contraires au règlement de la plateforme.
Le footballeur brésilien et star du PSG Neymar a ainsi pu partager des photos nues d'une femme l'accusant de viol avant que Facebook ne les retire.
Le conseil de surveillance regrette l'opacité dont le réseau social a fait preuve à cet égard.
"Dans certains cas, Facebook n'a pas communiqué d'informations pertinentes au conseil tandis que dans d'autres, les informations étaient incomplètes", écrivent les sages, qui ont toutefois accepté d'être saisis par la plateforme pour évaluer le programme.
L'un des exemples mentionnés par l'instance concerne la modération des comptes Facebook et Instagram de l'ancien président américain Donald Trump, suspendus jusqu'à janvier 2023.
Lorsque Facebook s'est tourné vers le conseil de surveillance en lui demandant de trancher sur sa décision, le réseau social n'a pas fait part du programme "cross-check".
"Cette omission n'est pas acceptable", assènent les sages.
- Arcs-en-ciel et poneys -
Financé par Facebook mais indépendant de sa direction, le conseil de surveillance est composé de 20 membres internationaux dont des journalistes, des avocats, des défenseurs des droits humains et d'anciens dirigeants politiques.
Il peut être saisi par le groupe pour émettre son avis et trancher sur des questions liées à la modération des contenus.
L'instance s'est engagée à publier à la fin de chaque trimestre un rapport sur la transparence ainsi que des rapports annuels permettant d'évaluer la façon dont Facebook applique ses décisions et ses recommandations.
"Nous remercions le conseil pour leur travail et pour la publication de leur rapport sur la transparence", a réagi un porte-parole auprès de l'AFP.
"Nous estimons que le travail du conseil a un vrai impact et c'est la raison pour laquelle nous lui avons demandé son avis sur notre système 'cross-check'. Nous allons tout faire pour être clairs à l'avenir."
Les recommandations du rapport ont cependant laissé de marbre le "véritable conseil de surveillance de Facebook", une association très critique du réseau social et de son instance de régulation.
"Le conseil de surveillance, qui est payé par Facebook, sélectionné par Facebook et à qui Facebook donne un mandat étriqué et inadapté, voudrait désormais que Facebook cesse de leur mentir et soit plus transparent", a réagi le groupe.
"On voudrait être plus jeunes et plus attirants. On voudrait des poneys, des arcs-en-ciel et un château", a-t-il ironisé. "Le conseil de surveillance n'est qu'un coup de com' de Facebook pour camoufler et détourner l'attention du fait que l'entreprise n'a pas réussi à empêcher la haine, le racisme et la désinformation de se propager sur ses plateformes."