BEYROUTH: Dans la province d’Al-Jawf, au nord-ouest du Royaume, trois éperons rocheux, qui composent ce que l’on appelle désormais le «Camel Site», affichent des représentations réalistes grandeur nature. Au moins onze dromadaires et deux équidés, dont un âne ou un mulet, ont été sculptés en taille réelle et en relief. Site rupestre spectaculaire du nord de l’Arabie, le Camel Site se distingue autant par la qualité que par la singularité de ses hauts-reliefs et ses bas-reliefs antiques.
L’origine de ces reproductions grandeur nature de chameaux et d’équidés demeure mystérieuse.
Une équipe franco-saoudienne tente de retracer l'évolution de ces sculptures, exceptionnelles à la fois par leur taille et par leur facture, dans la péninsule Arabique. Les chercheurs ont estimé que ce site datait de l’Antiquité, entre le Ier siècle et le Ier siècle de notre ère. Ils ont établi des similitudes esthétiques avec une caravane de dromadaires qui orne le Sîq de Pétra, en Jordanie, cité incontournable du peuple nabatéen.
À mesure que se précisaient les observations, la datation et l’origine des sculptures du Camel Site, ces dernières se révélaient de plus en plus énigmatiques.
Des études supplémentaires menées par un trio d’archéologues de l’université du roi Saoud (Arabie saoudite), de l’Institut Max-Planck (Allemagne) et du CNRS font remonter ces sculptures à l’âge de pierre.
La croûte qui recouvre ces œuvres atteste leur grand âge, de même que le lent processus d’érosion qui a fait choir de leur point d’origine, sur les parois, en hauteur, les blocs dans lesquels elles ont été taillées.
Un large éventail de techniques et de méthodes de datation a été utilisé: il va de l'analyse des traces d’outils à celle de l’érosion de la roche en passant par la datation par luminescence de la chute d’un bloc sculpté.
Une nouvelle datation a bouleversé la perception de ce site unique. Les œuvres d’art nous viennent en effet de la préhistoire, «au plus tard au cours du 6e millénaire avant J.-C.», estime le CNRS. Les sculptures d’animaux n’ont pas été réalisées à l’aide d’outils en métal, mais en pierre. Cette nouvelle révélation indique le Camel Site «abrite vraisemblablement les plus vieux reliefs d’animaux en taille réelle au monde qui subsistent à ce jour».
Un sondage ouvert entre deux rochers a également révélé un assemblage d’ossements animaux, datés par radiocarbone, et de pierres taillées, qui témoignent de l’occupation du site.
La grande finesse des portions de camélidés encore visibles ont captivé les archéologues: les dromadaires représentés sont parfaitement proportionnés, figés dans des mouvements naturels et dynamiques. Il est évident que ces artistes étaient doués et dotés d’un grand savoir-faire.