BOURGES : P.R2B, derrière ce nom de scène façon "Star Wars", il y a Pauline Rambeau de Baralon, sensation électro-pop, qui maîtrise toute sa chaîne de création, entre musique et réalisation de clips, talent aiguisé dans une école de cinéma.
Son amour du 7e art transpire dans la vidéo qu'elle signe pour "Des rêves", chanson-titre de son mini-album récemment sorti (chez Naive). On y voit ainsi une belle séquence avec des draps suspendus, écrans dans l'écran.
"Oui, on voit ça dans le cinéma italien, chez Fellini, ces draps qui pendent", acquiesce l'artiste, rencontrée par l'AFP aux Printemps Inouïs, format inédit du Printemps de Bourges - sa ville d'origine - dédié aux artistes émergents.
La musique est venue en "héritage", comme elle le dit, avec un père qui jouait de la guitare blues. "Mais le cinéma - même si ma mère travaillait à la Maison de la Culture de Bourges comme programmatrice - j'y suis allée moi-même, j'ai agi, je suis allée apprendre comment filmer en 35 mm", développe-t-elle.
La jeune femme ébouriffée est une vraie touche-à-tout. A l'image de sa pratique de la musique jalonnée par la clarinette, puis la guitare, le piano et les logiciels électro.
Elle n'aime pas être enfermée dans une case. Le t-shirt imprimé d'une photo du cinéaste japonais Takeshi Kitano, qu'elle porte à un moment dans le clip pour "Des rêves", n'est pas là par hasard.
"Il a changé beaucoup de choses dans ma manière d'appréhender ce que je fais, déroule-t-elle. Quand on est un jeune Français, une jeune Française, et qu'on veut faire plusieurs arts, on nous demande toujours de choisir à un moment. Takeshi Kitano, lui, il a été animateur d'émission tv, humoriste, peintre, acteur, réalisateur, il a fait son premier film assez tard, comme Pialat, après 40 ans. Moi, ça me plaît cette figure complexe".
"J'aime quand ça frotte"
Outre la Fémis, école réputée de cinéma, et, toujours parallèlement à la musique, elle a aussi suivi le cours Florent, référence pour les acteurs.
"C'est quelque chose qui m'importait, il y avait l'idée de se mettre en scène - ce qui ne plaisait pas forcément aux puristes des écoles de cinéma même si les choses ont changé avec Nanni Moretti - de s'incarner, de travailler son corps comme un outil, dans sa bizarrerie - je n'ai pas le physique d'une jeune première (rires) - pour aller dans des endroits sur le côté".
Ses morceaux sont nés au croisement de ses influences, rap, électro et grandes figures du répertoire français. Elle cite Barbara - "un fil qu'on déroule, ne s'arrêtera jamais et ce sera toujours de plus en plus beau" - Gainsbourg et Brigitte Fontaine, "qui tordent la langue". "J'ai aussi beaucoup lu des auteurs de la pensée, comme Cioran, des auteurs toujours un peu énervés, à la parole rugueuse, une parole de discours. J'aime quand ça frotte".
"P.R2B incarne cette nouvelle génération, ces jeunes artistes qui prennent la chanson et la revisitent à leur façon, avec leur vécu, avec des productions plus actuelles, ça donne un joli mélange de chanson moderne tout en étant très classique finalement", décrypte pour l'AFP Rita Sa Rego, directrice des Inouïs, dispositif de repérage et d'accompagnement des jeunes talents du Printemps de Bourges.
Une artiste engagée - le clip pour "Des rêves" dénonce au passage les bavures policières - et émouvante, comme quand elle salue depuis la scène sa grand-mère venue assister à son concert à Bourges.