Pourquoi l’Iran préfère la guerre des drones par procuration

Une photo publiée par le bureau de l’armée iranienne le 5 janvier 2021 montre des responsables militaires inspectant des drones exposés avant une opération militaire dans un endroit non divulgué au centre de l’Iran. (AFP/Bureau de l’armée iranienne)
Une photo publiée par le bureau de l’armée iranienne le 5 janvier 2021 montre des responsables militaires inspectant des drones exposés avant une opération militaire dans un endroit non divulgué au centre de l’Iran. (AFP/Bureau de l’armée iranienne)
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Publié le Jeudi 21 octobre 2021

Pourquoi l’Iran préfère la guerre des drones par procuration

  • Les cibles comprennent les aéroports civils, les principaux sites de stockage de pétrole, les expéditions commerciales et les installations militaires et diplomatiques
  • Selon les experts, l’utilisation par le Corps des gardiens de la révolution islamique de mandataires comme les Houthis et les milices chiites irakiennes pour mener des frappes par drones lui accorde la possibilité du déni plausible

WASHINGTON: Au cours des derniers mois, des attaques par missile rôdeur – un genre de drone conçu par le Corps des gardiens de la révolution islamique d’Iran – ont été lancées contre des établissements civils dans diverses parties de la péninsule Arabique.

Les Houthis, pions politiques de l’Iran au Yémen, ont acquis le savoir-faire et les éléments nécessaires pour utiliser la technologie dans le cadre d’une stratégie régionale qui a conduit à des attaques accrues de drones dans tout le Moyen-Orient.

Lors d’une attaque particulièrement dévastatrice qui a eu lieu le 14 septembre 2019, les installations pétrolières d’Abqaïq et de Khurais en Arabie saoudite ont été gravement endommagées par une combinaison de missiles et de drones, provoquant des ondes de choc sur le marché mondial du pétrole.

La fabrication des drones est relativement peu coûteuse. Ces derniers sont difficiles à contrer, en particulier les munitions vagabondes – ou drones suicides – utilisées de plus en plus par l’Iran et ses mandataires pour porter atteinte aux intérêts arabes, américains et israéliens au Moyen-Orient.

Les cibles comprennent les aéroports civils, les principaux sites de stockage de pétrole, les expéditions commerciales et les installations militaires et diplomatiques.

Les planificateurs des politiques de défense et les responsables militaires ont du mal à trouver une stratégie qui puisse contrer efficacement l’exploitation réussie par l’Iran de la guerre asymétrique pour renforcer ses capacités nationales en matière de production de drones.

Ali Bakir, chercheur adjoint au centre Ibn Khaldon pour les sciences humaines et sociales de l’Université du Qatar, affirme que Téhéran profite des frappes de drones menées par ses mandataires extrémistes pour renforcer sa position dans la région. Une réponse coordonnée des alliés régionaux est nécessaire pour éviter de nouvelles attaques, ajoute-t-il.

«Bien qu’ils ne soient pas sophistiqués, les drones de l’Iran constituent une menace croissante pour les pays voisins et compromettent la sécurité dans le Golfe», déclare M. Bakir dans un entretien à Arab News.

«Cette menace découle du fait que Téhéran utilise des drones dont la technologie est relativement primitive pour compenser le manque de munitions adéquates et de systèmes de ciblage perfectionnés. Équiper la franchise régionale du Corps des gardiens de la révolution islamique avec ces drones permet à l’Iran d’étendre sa portée et son pouvoir meurtrier.»

«Malgré les dégâts graves causés par les drones iraniens utilisés pour attaquer les installations pétrolières stratégiques de l’Arabie saoudite en 2019, il est surprenant de constater qu’aucune réponse adéquate et tactique n’a encore été mise en place pour contrer la menace des drones de Téhéran, que ce soit par les pays arabes ou les États-Unis.»

L’utilisation par le Corps des gardiens de la révolution islamique de mandataires comme les Houthis et les milices chiites irakiennes à l’image des Kataeb Hezbollah pour mener des frappes par drones lui accorde la possibilité du déni plausible. À ce jour, sa production en plein essor n’a jamais fait l’objet d’une intervention militaire.

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Un missile fabriqué en Iran est tiré par des Houthis sur l’Arabie saoudite en 2017. (AFP)

Un missile fabriqué en Iran est tiré par des Houthis sur l’Arabie saoudite en 2017. (AFP)

En conséquence, les attaques par drones se sont poursuivies, y compris la frappe de ce mois-ci contre l’aéroport du roi Abdallah dans la ville de Jazan, au sud de l’Arabie, qui a fait au moins dix blessés parmi les civils.

Les analystes ont également mis en évidence la capacité de l’Iran à contourner les sanctions mondiales en vue d’acquérir les composants et la technologie nécessaires pour produire en masse des drones chargés d’explosifs.

Cela a permis à des groupes terroristes désignés, entraînés et équipés par la force extraterritoriale Al-Qods du Corps des gardiens de la révolution islamique d’utiliser des drones, des hauteurs du Golan au détroit d’Ormuz.

Sans une stratégie régionale globale qui adopte une attitude proactive pour dissuader et affaiblir les capacités de l’Iran en matière de drones de combat, Téhéran et son réseau transnational de groupes militants pourraient conclure que les avantages l’emportent sur le coût de l’intensification des attaques.

«Je pense que la réponse à la menace croissante de l’Iran devrait être proactive, collective et multidimensionnelle», poursuit M. Bakir.

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Une photo fournie par le ministère saoudien des Médias le 10 février 2021 montre la coque endommagée d’un avion Flyadeal Airbus A320-214 sur le tarmac de l’aéroport international d’Abha, dans la province d’Asir, au sud de l’Arabie saoudite. (AFP/Ministère saoudien des Médias)

«En d’autres termes, contrer la menace des drones de Téhéran devrait intégrer des efforts de renseignement pour bloquer les composants étrangers introduits en contrebande d’Allemagne, de France, des États-Unis et d’autres pays en Iran pour être utilisés dans son programme de drones.»

«Sur le plan militaire, il est important de mettre en place des solutions dynamiques, technologiques et rentables pour relever ce défi, mais la réponse ne devrait pas reposer uniquement sur des mesures défensives. L’acquisition de compétences pointues de même nature peut s’avérer une dissuasion crédible et établir un équilibre de menace favorable.»

«Reste à régler le problème des milices armées iraniennes qui sont plus difficiles à dissuader et ont, pour la plupart, peu à perdre. Lorsque cela est nécessaire, les expéditions de drones doivent être ciblées avant qu’elles ne parviennent aux groupes concernés. Il faudrait mener des attaques furtives contre les milices iraniennes qui utilisent ces drones pour augmenter les coûts et, si nécessaire, en faire porter la responsabilité à l’Iran.»

Lors d’une conférence récente à Chicago, le Conseil national de la résistance iranienne – une organisation rassemblant des personnalités de l’opposition iranienne en exil – tente de souligner la nécessité de reconnaître la menace croissante posée par le programme de drones iranien pour la sécurité nationale devant un large public américain.

Alireza Jafarzadeh, directeur adjoint du bureau du Conseil national de la résistance iranienne à Washington, affirme que le cerveau derrière le programme de drones de Téhéran, le général de brigade Saeed Aghajani, a personnellement orchestré les attaques de 2019 contre les installations pétrolières saoudiennes.

«Il devrait y avoir une politique globale pour réussir à contenir la menace du régime iranien en ce qui concerne ses drones et le soutien à ses mandataires», confie M. Jafarzadeh à Arab News.

«L’élément central d’une bonne politique devrait être la responsabilité. Lorsque Téhéran se livre au terrorisme, prend des personnes en otage et fait appel aux services de mandataires, il les utilise comme un outil pour obtenir des concessions de ses homologues. En l’absence de responsabilité, le terrorisme de régime n’a jusqu’à présent été que renforcé.»

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Une photo fournie par l’agence de presse saoudienne (SPA) le 27 février 2021 montre des débris sur le toit d’un immeuble à Riyad, la capitale de l’Arabie saoudite, à la suite d’une attaque par missile revendiquée par la milice houthie du Yémen. (AFP/SPA)

«Le comportement illégal et voyou du régime ne devrait pas demeurer impuni. Lorsque l’ancien commandant de la force Al-Qods, Qassem Soleimani, a été éliminé, le public iranien était très heureux. Cela a semé la peur parmi les commandants du Corps des gardiens de la révolution islamique et de la force Al-Qods, démoralisé les mandataires de l’Iran et réduit encore plus l’influence du régime dans la région.»

«Téhéran a menacé de se venger, mais cela ne s’est pas produit au cours des vingt-deux derniers mois. De plus, le régime a perdu plusieurs autres personnes clés sans possibilité de représailles. C’est le meilleur moyen de prouver que Téhéran est beaucoup plus faible qu’il ne le prétend.»

Cependant, il semble peu probable que Washington se lance dans une politique plus proactive qui augmenterait les enjeux pour l’Iran et ses mandataires. L’administration Biden a déjà levé les sanctions contre un certain nombre de personnalités impliquées dans le programme iranien de missiles balistiques, tout en faisant part de sa volonté de reprendre les négociations sur le plan d’action conjoint, également connu sous le nom d’accord de Vienne sur le nucléaire iranien.

Ces mesures suggèrent que la Maison Blanche n’est pas très encline à s’attaquer de front à la campagne de drones de faible intensité menée à travers le Moyen-Orient par le Corps des gardiens de la révolution islamique.

Ceux qui sont fortement en désaccord avec l’approche plus conciliante de l’administration américaine comme Alireza Jafarzadeh affirment que toute relance des négociations ne devrait pas exclure la responsabilité de l’Iran pour les attaques de drones.

«Téhéran doit payer le prix de chaque complot terroriste, de chaque missile qu’il tire, de chaque drone qu’il lance et de chaque personne qu’il tue dans la région ou en Iran», soutient M. Jafarzadeh.

Une photo publiée par le bureau de l’armée iranienne le 5 janvier 2021 montre des responsables militaires inspectant des drones exposés avant une opération militaire dans un endroit non divulgué au centre de l’Iran. (AFP/Bureau de l’armée iranienne)

«Pour les nations musulmanes et arabes, il est très important de miser sur l’expérience des quarante dernières années. Le régime iranien veut faire une démonstration de force pour obliger les pays à lui accorder des concessions, mais seule la détermination porte ses fruits.»

«Le régime est surtout très faible et vulnérable et ses ressources stratégiques et régionales sont désormais très limitées.»

Que Téhéran se sente suffisamment enhardi pour mener des attaques de drones contre des pétroliers, des aéroports internationaux et d’autres cibles civiles, malgré une série de sanctions mises en place pour les empêcher, ainsi que leurs mandataires, de développer de telles capacités, montre que cette stratégie doit être repensée, selon les analystes.

«Nous sommes convaincus que les sanctions n’aideront pas», déclare à Arab News Tal Beeri, chef du département de recherche au Centre de recherche et d’éducation d’Alma en Israël.

«Les Iraniens savent comment agir militairement sous sanctions, à la fois en termes de renforcement et d’utilisation de la force. Ce qui s’est passé au cours des dernières années confirme bien cette théorie.»

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Une photo publiée par le bureau de l’armée iranienne le 5 janvier 2021 montre des responsables militaires inspectant des drones exposés avant une opération militaire dans un endroit non divulgué au centre de l’Iran. (AFP/Bureau de l’armée iranienne)

Si les sanctions s’avèrent insuffisantes, la neutralisation de la menace stratégique posée par le réseau iranien d’attaques de drones par procuration nécessitera probablement une certaine coopération et un partage des connaissances de la part des États de la région qui se sont retrouvés dans la ligne de mire des groupes militants iraniens.

L’Iran n’est pas le seul pays de la région à disposer d’un solide programme de drones. Une plus grande coopération régionale – y compris un meilleur partage de renseignements et l’acquisition de systèmes de drones – pourrait contrer les ambitions de Téhéran à grande échelle.

Les systèmes de défense aérienne statiques peuvent maintenir le cap jusqu’à un certain point contre les tactiques et la technologie de plus en plus sophistiquées des drones entre les mains des mandataires du Corps des gardiens de la révolution islamique.

«La menace réside surtout dans le vaste déploiement et l’accessibilité du programme de drones», insiste M. Beeri.

«Le programme est maintenant accessible à tous les mandataires iraniens au Moyen-Orient. Aujourd’hui, tous les mandataires ont des drones de collecte de renseignements et des drones d’attaque, et ils savent les manier avec un professionnalisme exemplaire.»

«Le programme des drones est désormais une réalité. Nous pensons qu’il ne peut être contrecarré, mais perturbé.»

 

 Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Parlement ukrainien déserté par crainte de frappes russes

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  • L'Otan et l'Ukraine doivent se retrouver mardi à Bruxelles pour évoquer la situation, selon des sources diplomatiques interrogées par l'AFP
  • La tension ne retombait pas en Ukraine, où le Parlement, la Rada, a "annulé" sa séance en raison de "signaux sur un risque accru d'attaques contre le quartier gouvernemental dans les jours à venir", ont expliqué plusieurs députés à l'AFP

KIEV: Le Parlement ukrainien a annulé vendredi sa séance par crainte de frappes russes en plein coeur de Kiev, au lendemain du tir par la Russie d'un nouveau missile balistique et de menaces de Vladimir Poutine à l'adresse de l'Occident.

Après ce tir, le président russe s'était adressé à la nation jeudi soir en faisant porter la responsabilité de l'escalade du conflit sur les Occidentaux. Il a estimé que la guerre en Ukraine avait pris désormais un "caractère mondial" et menacé de frapper les pays alliés de Kiev.

Le Kremlin s'est dit confiant vendredi sur le fait que les Etats-Unis avaient "compris" le message de Vladimir Poutine.

L'Otan et l'Ukraine doivent se retrouver mardi à Bruxelles pour évoquer la situation, selon des sources diplomatiques interrogées par l'AFP.

La tension ne retombait pas en Ukraine, où le Parlement, la Rada, a "annulé" sa séance en raison de "signaux sur un risque accru d'attaques contre le quartier gouvernemental dans les jours à venir", ont expliqué plusieurs députés à l'AFP.

En plein coeur de Kiev, ce quartier où se situent également la présidence, le siège du gouvernement et la Banque centrale, a jusqu'à présent été épargné par les bombardements. L'accès y est strictement contrôlé par l'armée.

Le porte-parole du président Volodymyr Zelensky a de son côté assuré que l'administration présidentielle "travaillait comme d'habitude en respectant les normes de sécurité habituelles".

"Compris" le message 

S'adressant aux Russes à la télévision jeudi soir, Vladimir Poutine a annoncé que ses forces avaient frappé l'Ukraine avec un nouveau type de missile balistique hypersonique à portée intermédiaire (jusqu'à 5.500 km), baptisé "Orechnik", qui était dans sa "configuration dénucléarisée".

Cette frappe, qui a visé une usine militaire à Dnipro, dans le centre de l'Ukraine, est une réponse, selon M. Poutine, à deux frappes menées cette semaine par Kiev sur le sol russe avec des missiles américains ATACMS et britanniques Storm Shadow, d'une portée d'environ 300 kilomètres.

M. Poutine a ainsi estimé que la guerre en Ukraine avait pris un "caractère mondial" et annoncé que Moscou se réservait le droit de frapper les pays occidentaux car ils autorisent Kiev à utiliser leurs armes contre le sol russe.

"Le message principal est que les décisions et les actions imprudentes des pays occidentaux qui produisent des missiles, les fournissent à l'Ukraine et participent ensuite à des frappes sur le territoire russe ne peuvent pas rester sans réaction de la part de la Russie", a insisté vendredi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Il s'est dit persuadé que Washington avait "compris" ce message.

La veille, les Etats-Unis, qui avaient été informés 30 minutes à l'avance du tir russe, avaient accusé Moscou de "provoquer l'escalade". L'ONU a évoqué un "développement inquiétant" et le chancelier allemand Olaf Scholz a regretté une "terrible escalade".

La Chine, important partenaire de la Russie accusé de participer à son effort de guerre, a appelé à la "retenue". Le Kazakhstan, allié de Moscou, a renforcé ses mesures de sécurité en raison de cette "escalade en Ukraine".

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky a lui appelé la communauté internationale à "réagir", dénonçant un "voisin fou" qui utilise l'Ukraine comme un "terrain d'essai".

"Cobayes" de Poutine 

Au-delà du tir de jeudi, la Russie a modifié récemment sa doctrine nucléaire, élargissant la possibilité de recours à l'arme atomique. Un acte "irresponsable", selon les Occidentaux.

Interrogés jeudi par l'AFP sur le tir de missile russe, des habitants de Kiev étaient inquiets.

"Cela fait peur. J'espère que nos militaires seront en mesure de repousser ces attaques", a déclaré Ilia Djejela, étudiant de 20 ans, tandis qu'Oksana, qui travaille dans le marketing, a appelé les Européens à "agir" et "ne pas rester silencieux".

M. Poutine "teste (ses armes) sur nous. Nous sommes ses cobayes", a affirmé Pavlo Andriouchtchenko cuisinier de 38 ans.

Sur le terrain en Ukraine, les frappes de la Russie, qui a envahi le pays il y a bientôt trois ans, se poursuivent.

A Soumy, dans le nord-est du pays, une attaque de drones a fait deux morts et 12 blessés, a indiqué le Parquet ukrainien.

Le ministre russe de la Défense, Andreï Belooussov, s'est lui rendu sur un poste de commandement de l'armée dans la région de Koursk, où les forces ukrainiennes occupent, depuis début août, des centaines de kilomètres carrés.

Il s'est félicité d'avoir "pratiquement fait échouer" la campagne militaire ukrainienne pour l'année 2025 en "détruisant les meilleures unités" de Kiev et notant que les avancées russes sur le terrain se sont "accélérées".

Cette poussée intervient alors que Kiev craint que Donald Trump, de retour à la Maison Blanche à partir de janvier prochain, ne réduise ou stoppe l'aide militaire américaine, vital pour l'armée ukrainienne.


Record de 281 travailleurs humanitaires tués dans le monde en 2024, selon l'ONU

L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database. (AFP)
L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database. (AFP)
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  • L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database
  • "Les travailleurs humanitaires sont tués à un rythme sans précédent, leur courage et leur humanité se heurtant aux balles et aux bombes", a déclaré le nouveau secrétaire général adjoint de l'ONU aux affaires humanitaires

GENEVE: Un nombre record de 281 travailleurs humanitaires ont été tués dans le monde cette année, ont alerté les Nations unies vendredi, qui demandent que les responsables soient poursuivis.

L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database.

"Les travailleurs humanitaires sont tués à un rythme sans précédent, leur courage et leur humanité se heurtant aux balles et aux bombes", a déclaré le nouveau secrétaire général adjoint de l'ONU aux affaires humanitaires et coordinateur des situations d'urgence, Tom Fletcher, dans le communiqué.

Le Britannique souligne que "cette violence est inadmissible et dévastatrice pour les opérations d'aide".

"Les États et les parties au conflit doivent protéger les humanitaires, faire respecter le droit international, poursuivre les responsables et mettre un terme à cette ère d'impunité".

L'année 2023 avait déjà connu un nombre record, avec 280 travailleurs humanitaires tués dans 33 pays.

L'ONU souligne que la guerre à Gaza "fait grimper les chiffres". Il y a eu "au moins 333 travailleurs humanitaires qui ont été tués rien que dans la bande de Gaza" depuis le début de la guerre en octobre 2023, a indiqué le porte-parole de l'agence de coordination humanitaire de l'ONU (Ocha), Jens Laerke, lors d'un point de presse à Genève.

Nombre d'entre eux ont été tués dans l'exercice de leurs fonctions alors qu'ils fournissaient de l'aide humanitaire. La plupart travaillaient pour l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), dont 243 employés ont été tués depuis la guerre à Gaza, a indiqué M. Laerke.

Parmi les autres travailleurs humanitaires tués depuis le début de la guerre à Gaza figure notamment du personnel du Croissant-Rouge palestinien, a-t-il relevé.

Mais les menaces qui pèsent sur les travailleurs humanitaires ne se limitent pas à Gaza, indique l'ONU, soulignant que des "niveaux élevés" de violence, d'enlèvements, de harcèlement et de détention arbitraire ont été signalés, entre autres, en Afghanistan, en République démocratique du Congo, au Soudan du Sud, au Soudan, en Ukraine et au Yémen.

La majorité du personnel humanitaire tué sont des employés locaux travaillant avec des ONG, des agences de l'ONU et le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.

L'ONU explique que la violence à l'encontre du personnel humanitaire s'inscrit dans "une tendance plus large d'atteintes aux civils dans les zones de conflit", avec l'an dernier "plus de 33.000 civils morts enregistrés dans 14 conflits armés, soit une augmentation de 72% par rapport à 2022".

 


Mandats d'arrêt de la CPI : réaction outrées en Israël, un nouveau «procès Dreyfus» dit Netanyahu

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  • "La décision antisémite de la Cour pénale internationale est comparable à un procès Dreyfus d'aujourd'hui qui se terminera de la même façon", a déclaré le chef du gouvernement dans un communiqué diffusé par son bureau
  • "Israël rejette avec dégoût les actions absurdes et les accusations mensongères qui le visent de la part de la [CPI]", dont les juges "sont animés par une haine antisémite à l'égard d'Israël", ajoute M. Netanyahu

JERUSALEM: L'annonce par la Cour pénale internationale (CPI) de mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ex-ministre de la Défense Yoav Gallant a suscité des réactions outrées en Israël, M. Netanyahu comparant la décision de la Cour à un nouveau "procès Dreyfus".

"La décision antisémite de la Cour pénale internationale est comparable à un procès Dreyfus d'aujourd'hui qui se terminera de la même façon", a déclaré le chef du gouvernement dans un communiqué diffusé par son bureau.

Condamné pour espionnage, dégradé et envoyé au bagne à la fin du XIXe siècle en France, le capitaine français de confession juive Alfred Dreyfus avait été innocenté et réhabilité quelques années plus tard. L'affaire Dreyfus a profondément divisé la société française et révélé l'antisémitisme d'une grande partie de la population.

"Israël rejette avec dégoût les actions absurdes et les accusations mensongères qui le visent de la part de la [CPI]", dont les juges "sont animés par une haine antisémite à l'égard d'Israël", ajoute M. Netanyahu.

La CPI "a perdu toute légitimité à exister et à agir" en se comportant "comme un jouet politique au service des éléments les plus extrêmes oeuvrant à saper la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient", a réagi son ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, sur X.

La CPI a émis jeudi des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant "pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis au moins à partir du 8 octobre 2023 jusqu'au 20 mai 2024", et contre Mohammed Deif, chef de la branche armée du Hamas "pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre présumés commis sur le territoire de l'Etat d'Israël et de l'Etat de Palestine depuis au moins le 7 octobre 2023", date de l'attaque sans précédent du mouvement palestinien contre Israël à partir de Gaza ayant déclenché la guerre en cours.

"Jour noir" 

"C'est un jour noir pour la justice. Un jour noir pour l'humanité", a écrit sur X le président israélien, Isaac Herzog, pour qui la "décision honteuse de la CPI [...] se moque du sacrifice de tous ceux qui se sont battus pour la justice depuis la victoire des Alliés sur le nazisme [en 1945] jusqu'à aujourd'hui".

La décision de la CPI "ne tient pas compte du fait qu'Israël a été attaqué de façon barbare et qu'il a le devoir et le droit de défendre son peuple", a ajouté M. Herzog, jugeant que les mandats d'arrêt étaient "une attaque contre le droit d'Israël à se défendre" et visent "le pays le plus attaqué et le plus menacé au monde".

Itamar Ben Gvir, ministre de la Sécurité nationale, et chantre de l'extrême droite a appelé à réagir à la décision de la CPI en annexant toute la Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, et en y étendant la colonisation juive.

"Israël défend les vies de ses citoyens contre des organisations terroristes qui ont attaqué notre peuple, tué et violé. Ces mandats d'arrêt sont une prime au terrorisme", a déclaré le chef de l'opposition, Yaïr Lapid, dans un communiqué.

"Pas surprenant" 

Rare voix discordante, l'organisation israélienne des défense des droits de l'Homme B'Tselem a estimé que la décision de la CPI montre qu'Israël a atteint "l'un des points les plus bas de son histoire".

"Malheureusement, avec tout ce que nous savons sur la conduite de la guerre qu'Israël mène dans la bande de Gaza depuis un an [...] il n'est pas surprenant que les preuves indiquent que [MM. Netanyahu et Gallant] sont responsables de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité", écrit l'ONG dans un communiqué.

Elle appelle par ailleurs "tous les Etats parties [au traité de Rome ayant institué la CPI] à respecter les décisions de la [Cour] et à exécuter ces mandats".

L'attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1.206 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur les données officielles, incluant les otages tués ou morts en captivité à Gaza.

La campagne de représailles militaires israéliennes sur la bande de Gaza a fait au moins 44.056 morts, en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du Hamas pour Gaza, jugées fiables par l'ONU.