BEYROUTH: Des dizaines de manifestants ont marqué dimanche le deuxième anniversaire d'un mouvement de contestation inédit à Beyrouth, trois jours après des affrontements meurtriers sanglants, alors que le pays est en proie à une crise économique et sociale aiguë.
Sous un ciel nuageux et pluvieux, des dizaines de personnes ont manifesté dans le centre de la capitale, selon un photographe, brandissant pancartes et banderoles hostiles à la classe dirigeante accusée de corruption, d'incompétence et d'inertie.
La journée du 17 octobre 2019 avait marqué au Liban le début d'un mouvement sans précédent à travers toutes les régions du pays, réclamant le départ de l'ensemble d'une classe politique inchangée depuis des décennies.
Mais les manifestations monstres se sont progressivement estompées sur fond d'une répression musclée, d'une crise économique sans précédent, aggravée par une pandémie et une explosion dévastatrice au port de Beyrouth l'an dernier.
« Si quelqu'un se demande pourquoi il n'y a pas beaucoup de manifestants, c'est parce que nous sommes privés d'essence, d'électricité et d'argent », a affirmé Rabih Zein, un manifestant de la première heure.
Depuis l'automne 2019, les Libanais sont soumis à des restrictions bancaires draconiennes qui empêchent les Libanais d'avoir librement accès à leur argent, tandis que la monnaie locale a perdu plus de 90% de sa valeur par rapport au dollar sur le marché noir.
Près de 80% de la population vit désormais dans la pauvreté sur fond d'une inflation galopante et de graves pénuries de médicaments, de carburant et de courant.
« Il s'agit d'un sit-in symbolique. Si Dieu le veut, nous marcherons vers le changement lors des élections législatives » prévues au printemps prochain, a ajouté M. Zein.
Le mouvement de contestation de 2019 a donné naissance à une myriade de groupes politiques embryonnaires qui se préparent à cette échéance électorale cruciale.
Selon certains manifestants, plusieurs Libanais ont préféré rester chez eux dimanche après les incidents armés sanglants ayant fait sept morts jeudi dans la capitale, en marge d'une manifestation organisée par le Hezbollah et son allié chiite Amal appelant à la récusation du juge chargé de l'enquête sur l'explosion du port.
Ce drame, survenu en août 2020, avait fait plus de 210 morts et dévasté des quartiers entiers de Beyrouth sans qu'aucun responsable ne soit encore traduit en justice.
« Il y a de la peur et de la lassitude », avoue Fatima Mehyo, une mère de deux enfants venue manifester. « Les gens sont épuisés ».