KABOUL: Les talibans ont récemment décrété l'expropriation de centaines de familles hazaras dans le centre de l'Afghanistan, ont affirmé des membres de cette minorité victime de tueries de masse par les islamistes lors de leur premier passage au pouvoir, entre 1996 et 2001.
D'après Mohammad Mohaqiq, chef de la communauté hazara actuellement en exil, quelque 800 familles ont été expulsées dans le district de Gizab, qui appartient à la province de l'Oruzgan (centre) et est frontalier avec celle du Daykundi, très peuplée de Hazaras.
"Le gouverneur taliban du district (...) a mentionné que la force militaire pouvait être utilisée si nécessaire, et que si les expulsés voulaient se plaindre, ils pouvaient ensuite aller devant la justice", a-t-il écrit sur Facebook, mettant en garde contre une "catastrophe humanitaire".
Plusieurs habitants contactés par téléphone par l'AFP ont confirmé l'information, appelant les autorités à les aider. Selon eux, des Pachtounes, l’ethnie dont sont principalement issus les talibans, convoitent leurs terres et se servent des islamistes pour se les approprier.
D'après un ancien du district, les talibans sont arrivés dans des pick-ups et ont ordonné aux Hazaras de quitter des terres qu'ils occupent selon eux illégalement.
Mais ces terres étaient infertiles il y a 40 ans et elles ne sont devenues verdoyantes que grâce au travail des Hazaras, a protesté un autre villageois.
Les conflits fonciers sont très fréquents en Afghanistan. Vols de terres et expropriations avalisées par des responsables corrompus ont été un motif majeur de mécontentement sous l'ancien régime, dénoncé par tous pour sa prévarication. Les talibans se présentent à l'inverse comme les champions de la transparence.
Les Hazaras, qui représentent entre 10 et 20% des 38 millions d'Afghans, ont été marginalisés par les sunnites pour leur foi majoritairement chiite, dans un pays régulièrement en proie à des divisions religieuses et ethniques.
Des milliers d'entre eux ont été abattus par les talibans lorsque ceux-ci ont pris le contrôle du pays à la fin des années 1990.
Ces dernières années, les Hazaras ont péri par centaines lors d'attentats-suicides dans Kaboul, généralement revendiqués par le groupe djihadiste Etat islamique, qui les considère comme des hérétiques.
Nombre de Hazaras craignent de redevenir la cible des nouveaux maîtres du pays, qui ont nommé l'un des leurs au poste de ministre délégué à la Santé dans leur gouvernement intérimaire pour les rassurer.