BELFORT: Les groupes EDF et General Electric (GE) ont annoncé mercredi mener des "discussions exploratoires" en vue d'un éventuel rachat, par l'énergéticien français, des "activités nucléaires de GE Steam Power", un dossier suivi attentivement par l'exécutif.
Six ans après le rachat controversé de la branche énergie d'Alstom par General Electric, promu par le ministre de l'Economie de l'époque, Emmanuel Macron, les activités nucléaires du groupe américain pourraient, en cas d'accord, revenir dans le giron d'un groupe français.
"Le groupe EDF est engagé dans des discussions exploratoires avec GE relatives à une éventuelle transaction concernant les activités nucléaires de GE Steam Power", a déclaré à l'AFP un porte-parole du groupe.
Si EDF et GE ont joué la prudence, affirmant n'avoir "aucune certitude sur les conclusions de ces discussions", l'annonce a été saluée par le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, qui a accueilli "très favorablement" cette "première étape positive".
"Une telle opération permettrait de conforter la capacité d'EDF à construire l'avenir de notre système énergétique, et répondrait pleinement à notre ambition industrielle en faveur de cette filière stratégique", a déclaré le ministre à l'AFP.
Depuis plusieurs mois, l'exécutif s'était montré vigilant sur ce dossier. Après les déclarations du président Emmanuel Macron en décembre à l'usine Framatome du Creusot, où il affirmait que "notre avenir énergétique et écologique passe par le nucléaire", M. Le Maire avait annoncé au printemps rechercher "une solution française pour les turbines Arabelle", produites par GE.
"Cette solution permettra de sécuriser cet actif unique, les compétences qui vont avec et qui sont indispensables à notre avenir énergétique", avançait-il alors dans les colonnes de l'Est républicain.
« Regarder le projet industriel »
La sécurisation des compétences et des emplois figure au cœur des préoccupation des syndicats de GE, qui ont accueilli avec circonspection l'annonce de ces discussions, et s'interrogent sur le périmètre de l'éventuelle transaction.
Ce sont "2.000 personnes sur 11.000 qui ont peut-être de la chance de quitter GE", a déclaré Philippe Petitcolin, délégué CFE-CGC. "Mais il faut regarder le projet industriel", a-t-il complété, estimant que le rachat des activités nucléaires de GE Steam Power par l'un de ses clients pouvait faire perdre des contrats auprès d'autres clients, et était donc associé à un "risque de casse sociale".
"L'avenir de la filière énergétique ne se résume pas à celle des centrales nucléaires. Il y a aussi la distribution, l'hydro-électricité, le gaz...", a complété Laurent Santoire, délégué CGT, s'interrogeant sur le devenir des autres entités du groupe General Electric.
"Maintenant, il faut l'officialisation du lancement des nouveaux EPR et une politique d'investissement de l'État, principalement dans l'emploi", a-t-il ajouté.
A Belfort, où se trouve le principal site de GE Steam Power, le maire (LR) Damien Meslot s'est dit "extrêmement attentif au périmètre du rachat". Il a réclamé qu'il soit "suffisamment large pour assurer la pérennité des activités et de l'emploi" local.
Chute des effectifs de GE
Après le rachat de la branche énergie d'Alstom par GE en 2015, le groupe américain comptait 16 000 emplois industriels en France (hors GE Capital), et promettait d'en créer 1 000 supplémentaires.
Mais en cinq ans, les effectifs ont rapidement diminué, jusqu'à 13 000 selon la direction, à coups de cessions d'actifs et de restructurations. Certains syndicats avancent des chiffres encore plus bas.
En décembre dernier, GE Steam Power, spécialisée dans les turbines pour centrales nucléaires et à charbon, avait initié une nouvelle réorganisation, qui prévoyait initialement 238 suppressions d'emplois, un chiffre ramené à 144 au printemps.
La direction du groupe l'avait justifiée par sa volonté de se retirer du marché des nouvelles centrales à charbon. Mais pour les syndicats, réduire les effectifs sur le charbon revenait à "amputer les capacités sur le nucléaire", car "toutes les équipes ont la double casquette nucléaire-charbon".