La tempête de crises à l’origine de la catastrophe humanitaire en Afghanistan

La réfugiée afghane Gul Pari (2e à droite) est assise avec sa famille dans une tente à la périphérie de Jalalabad. (Photo, AFP/Archives)
La réfugiée afghane Gul Pari (2e à droite) est assise avec sa famille dans une tente à la périphérie de Jalalabad. (Photo, AFP/Archives)
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Publié le Dimanche 05 septembre 2021

La tempête de crises à l’origine de la catastrophe humanitaire en Afghanistan

  • Des personnes qui luttent pour faire face à l'impact collectif de la sécheresse, des conflits, de la Covid-19 et de l'effondrement économique
  • N'ayant pas réussi à développer ses secteurs d'extraction minière, l'Afghanistan dispose de peu de sources de revenus publics

DUBAÏ : La nouvelle selon laquelle l'administration Biden relance le financement américain des programmes d'aide en Afghanistan sera accueillie avec soulagement par les organisations internationales qui ont mis en garde contre un effondrement économique et une catastrophe humanitaire à la suite de la prise de contrôle du pays par les talibans. 

Le Wall Street Journal a rapporté samedi que la décision américaine profitera à des organisations telles que le Programme alimentaire mondial (PAM), l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) parmi d'autres groupes indépendants qui travaillent par l'intermédiaire de représentants et de personnel local basés dans le pays déchiré par la guerre.

Selon une estimation de l'Organisation internationale pour les migrations (l'OIM), jusqu'à 1,5 million de personnes pourraient fuir l'Afghanistan vers l'ouest à la recherche de sécurité et d'emplois en 2021. Ce n'est pas seulement la peur de la cruauté et de la moralité anachronique des talibans qui pousse les Afghans à fuir leurs foyers ; ils luttent contre les répercussions économiques de la prise rapide du pays par les talibans, notamment la capitale Kaboul le 15 août.

«Nous ne devons pas nous détourner. Une crise humanitaire bien plus grave ne fait que commencer », a déclaré Filippo Grandi, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, dans un communiqué la semaine dernière alors que l'impact combiné de l'inflation galopante, d'une monnaie en chute libre, de la hausse des prix des produits alimentaires et le manque de liquidités ont forcé des centaines d'Afghans à se rendre à Kaboul pour essayer de vendre leurs maigres possessions.

Au début de 2021, l'ONU a déclaré qu'un tiers de la population afghane est déjà confronté à l'insécurité alimentaire en raison d'une deuxième sécheresse en trois ans. Avec très peu d'irrigation en état de marche, l'Afghanistan dépend de la fonte des neiges dans ses montagnes pour maintenir le débit de ses rivières et arroser ses champs pendant les mois d'été. Cependant, les chutes de neige de l'hiver dernier ont été extrêmement faibles.

Les climatologues croient qu'un phénomène de La Nina et un affaiblissement du courant-jet déplaçant plus lentement les systèmes météorologiques à travers la planète pourraient être des facteurs à l'origine du temps sec en Afghanistan.

«Il est difficile de parler d'une seule crise en Afghanistan pour le moment», a déclaré à Arab News Richard Trenchard, représentant de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) en Afghanistan. «De multiples crises affectent les Afghans qui sont souvent séparés et différents et qui se croisent et se renforcent mutuellement».

«Nulle part cela n'est plus évident que dans les zones rurales d'Afghanistan. Des millions d'hommes, de femmes et d'enfants voient leurs moyens de subsistance s'effondrer, et si la situation ne peut pas être inversée dans un proche avenir, elle pourrait empirer, provoquant une forte recrudescence de la faim, un effondrement économique et des déplacements à grande échelle».

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Un enfant se tient dans un camp pour personnes déplacées à l'intérieur du pays (PDI) où de nouveaux immeubles d'habitation sont construits à Kaboul le 21 juin 2021. (Photo, AFP/Archives)

La sécurité alimentaire en Afghanistan a été gravement compromise par une augmentation des prix au cours des cinq dernières années, de 10 à 20 % selon certaines estimations, principalement à cause de la sécheresse, des impacts de la Covid-19, de l'accélération constante de l'inflation d'une année sur l'autre ainsi que des changements saisonniers. 

Pour aggraver la situation, les revenus moyens ont chuté pour 75% des personnes tandis que la dette personnelle a augmenté. Selon les évaluations du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (BCAH), environ 73% des ménages ont déclaré être endettés et 74 % ont mis en cause la nourriture comme principale raison d'emprunt.

En février, le gouvernement afghan désormais déchu a prédit que la récolte de blé du pays chuterait de près de deux millions de tonnes en 2021 et que plus de trois millions de têtes de bétail risquaient de mourir en raison d'un manque de fourrage et d'eau.

À cela s'ajoutent « les effets persistants de COVID-19, en particulier en termes de réduction des envois de fonds de l'étranger, de contraintes croissantes du marché, de pouvoir d'achat réduit et de problèmes de déplacement et d'accès résultant des conflits récents, et actuellement, nous assistons à une crise de liquidité croissante à travers le pays», a souligné Trenchard.

«Tous ces éléments exercent d'énormes pressions sur des millions de moyens de subsistance dans les zones rurales. Si ces moyens de subsistance ne sont pas être protégés et renforcés, alors je crains que d'autres catastrophes ne se dessinent dans les mois à venir.

«Nous le savons tous et nous devons agir rapidement. La saison des plantations de blé d'hiver débute très bientôt, fin septembre. Les graines ne peuvent pas attendre. Les agriculteurs ne peuvent pas attendre. L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (ONUAA) a pour objectif d'aider 250 000 familles d'agriculteurs vulnérables, soit environ 1,5 million de personnes, pour la prochaine campagne de blé d'hiver.

 

EN CHIFFRES

* 500 000 -  Afghans devraient fuir vers les pays voisins. 

* 7 millions - Afghans dont les moyens de subsistance sont menacés par la sécheresse. 

* 12 millions - Afghans confrontés à l'insécurité alimentaire avant la prise de contrôle des talibans. 

* $500 millions + - Dépenses annuelles du département d'État américain jusqu'à présent.

 * $260 millions - de l'Agence des États-Unis pour le développement international à distribuer aux programmes humanitaires.

 

Trenchard a révélé que L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (ONUAA) continuerait à mettre en œuvre son plan d’action face à la sécheresse, mais que le financement reste une contrainte majeure. 

«La plantation commence fin septembre et se termine en octobre dans de nombreuses régions. Cependant, le financement actuel ne permettra à l’ONUAA de soutenir que 110 000 familles. C'est près de 800 000 personnes rurales. Nous essayons de mobiliser d'urgence des ressources supplémentaires, car cette prochaine campagne de blé d'hiver est un tournant. Si nous le manquons, la catastrophe se profile sans aucun doute.

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Des combattants talibans en haut des véhicules arborant des drapeaux talibans défilent le long d'une route pour célébrer le retrait de toutes les troupes américaines d'Afghanistan, à Kandahar le 1er septembre 2021. (Photo, AFP)

«Les besoins sont bien plus importants que les fonds disponibles», a-signalé Trenchard , surtout que les banques du pays restent fermées, ce qui rend extrêmement difficile l'obtention d'argent en Afghanistan. L’action de l’ONUAA manque de $18 millions.

Une partie du problème est le manque persistant de certitude en Afghanistan alors que les talibans, un groupe terroriste désigné par l'ONU, luttent pour former un gouvernement et que $10 milliards des actifs de la banque centrale du pays restent gelés sur des comptes à l'étranger.

«Il n'y a pas de transferts bancaires et de transfert d'argent», a déclaré à Arab News Shakib Noori, directeur des solutions durables basé aux États-Unis, chez AMS . «C’est le plus grand défi maintenant».

Un autre défi majeur est la fermeture de l'aéroport de Kaboul, qui empêche les vols d'aide d'arriver dans le pays.

Le 30 août, l'OMS a déclaré qu'elle avait établi un pont aérien lui permettant d'acheminer des équipements médicaux essentiels en Afghanistan pour la première fois depuis la prise du pouvoir par les talibans.

Cependant, Ahmed Al-Mandhari, directeur régional de l'OMS pour la Méditerranée orientale, a déclaré dans un communiqué que ces équipements ne pourraient que «reconstituer partiellement les stocks des établissements de santé en Afghanistan et garantir que les services de santé soutenus par l'OMS puissent continuer, pour l'instant». 

L'Afghanistan a connu une période de croissance économique rapide dans les années qui ont suivi l'arrivée des forces occidentales en 2001 grâce à un afflux d'argent de l'aide étrangère.

Selon la Banque mondiale, «la croissance annuelle de l'Afghanistan a été en moyenne de 9,4 % entre 2003 et 2012, motivée par un secteur des services en plein essor axé sur l'aide et une forte croissance agricole». 

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Des femmes afghanes rebelles ont organisé une rare manifestation le 2 septembre en déclarant qu'elles étaient prêtes à accepter la burqa si leurs filles pouvaient encore aller à l'école sous le régime des talibans. (Photo, AFP)

Néanmoins, plusieurs facteurs, notamment la reprise de l'insurrection des talibans, la réduction de l'aide au développement, la sécheresse et la corruption endémique à tous les niveaux de gouvernement, ont rapidement entraîné un ralentissement de la croissance économique de 2,5 % par an.

N'ayant pas réussi à développer ses secteurs miniers et d'extraction minière potentiellement rentables, le pays dispose de peu de sources de revenus précieuses.

Dans le cadre du dernier plan de l'administration Biden visant à relancer les flux d'aide humanitaire, le département du Trésor américain a émis une dérogation spéciale pour les programmes d'aide du gouvernement, permettant à l'Agence des États-Unis pour le développement international de distribuer les fonds vers les programmes des Nations Unies pour l'alimentation, la santé et les migrations.

Toutefois, l'Afghanistan reste confronté à la possibilité de sanctions internationales supplémentaires si les leaders talibans ne parviennent pas à mettre en place une gouvernance tolérante et inclusive ou à honorer leurs promesses en matière de lutte contre le terrorisme et de droits de l'homme. Même la Banque mondiale a suspendu son aide financière au pays à cause des inquiétudes concernant «les perspectives de développement du pays, en particulier pour les femmes», a affirmé un porte-parole le 25 août. 

Un homme peint un mur de béton le long d'une rue de Kaboul, le 4 septembre 2021. (Photo, AFP)
Un homme peint un mur de béton le long d'une rue de Kaboul, le 4 septembre 2021. (Photo, AFP)

Le Fonds monétaire international (FMI), pour sa part, signalé que l'Afghanistan ne pourra plus accéder aux ressources des prêteurs en raison d'un «manque de clarté au sein de la communauté internationale» de la part du nouveau gouvernement à Kaboul.

Les Afghans et la communauté internationale ne peuvent rien faire d'autre qu'attendre et voir quel type de régime taliban émergera à Kaboul, un régime modéré dans son traitement des femmes et des minorités, ou un régime qui répète la brutalité et la répression de son prédécesseur de 1996-2001.

«Si, ou quand, des sanctions sont mises en place, l'économie en développement de l'Afghanistan ne peut tout simplement pas soutenir une nation où plus de 50 % de la population est confrontée à la pauvreté avant la récente tournure des événements. Et il est probable que ce nombre augmentera de façon significative», a soutenu Noori de l’AMS.

«La pandémie de la Covid-19, la crise politique, la crise économique, tout cela mis ensemble, rend l'Afghanistan un pays maudit».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Ukraine: «aucun compromis» sur les territoires occupés après une rencontre Poutine-Witkoff à Moscou

"Aucun compromis" n'a été trouvé mardi sur l'épineuse question des territoires occupés par la Russie en Ukraine après une rencontre à Moscou entre le président Vladimir Poutine et l'émissaire américain Steve Witkoff, qui lui présentait le plan de Washington pour mettre fin à près de quatre ans de guerre en Ukraine. (AFP)
"Aucun compromis" n'a été trouvé mardi sur l'épineuse question des territoires occupés par la Russie en Ukraine après une rencontre à Moscou entre le président Vladimir Poutine et l'émissaire américain Steve Witkoff, qui lui présentait le plan de Washington pour mettre fin à près de quatre ans de guerre en Ukraine. (AFP)
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  • M. Witkoff, accompagné du gendre du président américain, Jared Kushner, s'est entretenu pendant près de cinq heures au Kremlin avec le dirigeant russe à propos de ce plan présenté par Washington
  • "Nous avons pu nous mettre d'accord sur certains points (...), d'autres ont suscité des critiques, mais l'essentiel est qu'une discussion constructive ait eu lieu et que les parties aient déclaré leur volonté de poursuivre leurs efforts"

MOSCOU: "Aucun compromis" n'a été trouvé mardi sur l'épineuse question des territoires occupés par la Russie en Ukraine après une rencontre à Moscou entre le président Vladimir Poutine et l'émissaire américain Steve Witkoff, qui lui présentait le plan de Washington pour mettre fin à près de quatre ans de guerre en Ukraine.

M. Witkoff, accompagné du gendre du président américain, Jared Kushner, s'est entretenu pendant près de cinq heures au Kremlin avec le dirigeant russe à propos de ce plan présenté par Washington il y a deux semaines et depuis retravaillé lors de consultations avec les Ukrainiens.

"Nous avons pu nous mettre d'accord sur certains points (...), d'autres ont suscité des critiques, mais l'essentiel est qu'une discussion constructive ait eu lieu et que les parties aient déclaré leur volonté de poursuivre leurs efforts", a indiqué le conseiller diplomatique du Kremlin, Iouri Ouchakov.

Sur la question des territoires occupés par la Russie en Ukraine, qui représentent environ 19% du pays, "aucune solution de compromis n'a encore été choisie", même si "certaines propositions américaines peuvent être discutées", a précisé M. Ouchakov.

Il a qualifié la discussion d'"utile", mais prévenu qu'il "reste encore beaucoup de travail" pour parvenir à un accord, alors que les troupes russes ont accéléré leur avancée sur le front.

"Ce que nous avons essayé de faire, et je pense que nous avons fait quelques progrès, est de déterminer ce qui pourrait convenir aux Ukrainiens et leur donner des garanties de sécurité pour l'avenir", a déclaré pour sa part le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio sur la chaîne Fox News, sans qu'il soit précisé s'il s'exprimait après la fin des pourparlers.

Après cet entretien avec les Russes à Moscou, Steve Witkoff et Jared Kushner pourraient rencontrer mercredi en Europe une délégation de Kiev, selon une source ukrainienne à l'AFP.

"Nous sommes prêts" 

Quelques heures avant sa rencontre avec les Américains, Vladimir Poutine avait menacé les Européens, les accusant de chercher à "empêcher" les efforts de Washington pour mettre fin au conflit.

"Nous n'avons pas l'intention de faire la guerre à l'Europe, mais si l'Europe le souhaite et commence, nous sommes prêts dès maintenant", a-t-il lancé aux journalistes, en marge d'un forum économique.

Des propos qui tranchent avec ceux du chef de l'Otan, Mark Rutte, qui s'est dit peu avant convaincu que les efforts américains en Ukraine "finiront par rétablir la paix en Europe".

Le président américain Donald Trump a répété mardi que le règlement du conflit en Ukraine était une question complexe. "Ce n'est pas une situation facile, croyez-moi. Quel gâchis", a-t-il dit.

De son côté, le président ukrainien Volodymyr Zelensky, sous forte pression politique et diplomatique, a accusé la Russie d'utiliser les pourparlers actuels pour tenter "d'affaiblir les sanctions" visant Moscou.

Il a appelé à la fin de la guerre et pas "seulement à une pause" dans les combats.

Les Etats-Unis ont annoncé fin octobre des sanctions contre deux géants du secteur des hydrocarbures russes, Rosneft et Lukoil, les premières sanctions d'importance prises par Donald Trump contre la Russie depuis son retour au pouvoir.

Les Européens espèrent que l'administration Trump, soupçonnée de complaisance vis-à-vis de Vladimir Poutine, ne sacrifiera pas l'Ukraine, considérée comme un rempart face à la Russie.

Accélération russe 

Ces discussions se sont déroulées alors que les forces russes ont réalisé en novembre leur plus grosse progression sur le front en Ukraine depuis un an, selon l'analyse par l'AFP des données fournies par l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW), qui travaille avec le Critical Threats Project (CTP, émanation de l'American Enterprise Institute), deux centres de réflexion américains spécialisés dans l'étude des conflits.

En un mois, la Russie a pris 701 km2 aux Ukrainiens, la deuxième avancée la plus importante après celle de novembre 2024 (725 km2), en dehors des premiers mois de guerre au printemps 2022.

La Russie a revendiqué lundi la prise de la ville de Pokrovsk dans l'est de l'Ukraine, un nœud logistique clé pour Kiev, ainsi que celle de Vovtchansk, dans le nord-est. Mais l'Ukraine a affirmé mardi que les combats à Pokrovsk se poursuivaient.

En novembre, la Russie a tiré plus de missiles et de drones lors de ses attaques nocturnes sur l'Ukraine que durant le mois précédent, soit un total de 5.660 missiles et drones longue portée (+2%).

En interne, le président ukrainien est affaibli par un vaste scandale de corruption impliquant ses proches et qui a contraint son puissant chef de cabinet, Andriï Iermak, à la démission vendredi.

 


Bissau: formation d'un gouvernement, le président renversé est à Brazzaville

Mercredi, des militaires ont annoncé avoir renversé le président Embalo et suspendu les élections présidentielle et législatives du 23 novembre, dont les résultats devaient être annoncés cette semaine dans ce petit pays lusophone d'Afrique de l'Ouest à l'histoire jalonnée de coups de force et de troubles politiques. (AFP)
Mercredi, des militaires ont annoncé avoir renversé le président Embalo et suspendu les élections présidentielle et législatives du 23 novembre, dont les résultats devaient être annoncés cette semaine dans ce petit pays lusophone d'Afrique de l'Ouest à l'histoire jalonnée de coups de force et de troubles politiques. (AFP)
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  • La junte a depuis nommé le général Horta N'Tam président d'une transition censée durer un an et un Premier ministre
  • Le nouveau gouvernement compte également cinq officiers, dont le général de brigade Mamasaliu Embalo, nommé au poste de ministre de l'Intérieur, et le général Stive Lassana Manssaly qui occupe le portefeuille de la Défense nationale

BISSAU: La junte au pouvoir en Guinée-Bissau a formé samedi un nouveau gouvernement composé de 28 membres, en majorité des civils, quatre jours après avoir renversé le président Umaro Sissoco Embalo, qui est arrivé à Brazzaville.

Mercredi, des militaires ont annoncé avoir renversé le président Embalo et suspendu les élections présidentielle et législatives du 23 novembre, dont les résultats devaient être annoncés cette semaine dans ce petit pays lusophone d'Afrique de l'Ouest à l'histoire jalonnée de coups de force et de troubles politiques.

La junte a depuis nommé le général Horta N'Tam président d'une transition censée durer un an et un Premier ministre.

Le nouveau gouvernement compte également cinq officiers, dont le général de brigade Mamasaliu Embalo, nommé au poste de ministre de l'Intérieur, et le général Stive Lassana Manssaly qui occupe le portefeuille de la Défense nationale. Quatre femmes intègrent aussi le gouvernement.

M. N'Tam a exhorté le nouveau gouvernement à "lutter contre la corruption et le trafic de drogue", dans ce pays très pauvre et considéré comme une plaque tournante de ce trafic entre l'Amérique latine et l'Europe.

Brièvement arrêté par les militaires mercredi, puis parti au Sénégal jeudi dans un vol affrété par le gouvernement sénégalais, M. Embalo "est arrivé à Brazzaville pour y rester", a affirmé samedi à l'AFP une source proche de la présidence congolaise, sous couvert de l'anonymat.

Echauffourées 

M. Embalo, 53 ans, est réputé proche du président congolais Denis Sassou Nguesso, et s'est rendu à plusieurs reprises en visite au Congo.

"Le président Embalo est arrivé en fin de matinée à Brazzaville à bord d'un jet privé affrété par les autorités", a indiqué à l'AFP une source proche du pouvoir congolais, jointe depuis Bissau.

Dans la capitale bissau-guinéenne, le Parti Africain pour l'Indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), puissante et historique formation d'opposition, a dénoncé l'"envahissement" de son siège samedi matin dans la capitale et des "dégradations" par des "miliciens armés".

Selon le PAIGC, ces derniers ont "procédé à l'expulsion de toutes les personnes qui s'y trouvaient, à l’effraction des portes de bureaux et à la grave violation de l’intégrité des installations".

Le principal opposant Domingos Simoes Pereira - dirigeant du PAIGC, parti ayant mené la Guinée-Bissau à l'indépendance en 1974 - avait été écarté de la présidentielle du 23 novembre. Le parti avait ensuite soutenu le candidat d'opposition Fernando Dias, devenu le principal adversaire de M. Embalo lors du scrutin.

M. Pereira a été arrêté mercredi en Guinée-Bissau, selon des proches et un collaborateur.

Dans une déclaration jeudi à l'AFP, M. Dias affirme avoir largement remporté la présidentielle au premier tour et accuse M. Embalo d'avoir "organisé" le coup d'Etat pour empêcher son accession au pouvoir.

M. Dias affirme être "en sécurité" et se cacher dans le pays.

Par ailleurs, des échauffourées mineures ont eu lieu samedi dans la matinée dans un quartier périphérique de Bissau, non loin du siège de campagne de M. Dias, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Mercredi, les auteurs du putsch avaient expliqué vouloir garantir la "sécurité au niveau national et rétablir l'ordre", évoquant la découverte par les "renseignements généraux" d'un "plan visant à déstabiliser le pays avec l'implication des barons nationaux de la drogue".

Des opposants et des experts soupçonnent néanmoins M. Embalo, au pouvoir depuis 2020, d'avoir orchestré lui-même son renversement afin d'arrêter le processus électoral.

Coup "factice" 

La prise de pouvoir par les militaires a été largement critiquée, notamment par le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres qui a dénoncé une "violation des principes démocratiques".

La Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao) a suspendu la Guinée-Bissau de "tous ses organes décisionnels". L'Union africaine (UA) a également suspendu le pays de ses instances.

Samedi, le président du Conseil des Sages et ancien chef d'Etat du Nigeria, Goodluck Jonathan, qui faisait partie des observateurs des scrutins du 23 novembre, a à nouveau affirmé que le coup d'état était selon lui "factice".

Il répondait à un journaliste de la télévision nationale après avoir briefé le président nigérian Bola Tinubu sur la situation en Guinée-Bissau.

"C'est une cérémonie mise en scène par le chef de l'Etat (Embalo, NDLR) lui même", a-t-il accusé. "Nous sommes fatigués de tout cela en Afrique....", a-t-il fustigé.

La Guinée-Bissau, située entre le Sénégal et la Guinée (Conakry), a déjà connu quatre coups d'Etat et une kyrielle de tentatives de putsch depuis son indépendance du Portugal en 1974. La proclamation des résultats électoraux y a souvent donné lieu à des contestations.


Pourparlers sur l'Ukraine: Kiev et l'Europe voient des avancées mais encore beaucoup de travail

Le président américain avait initialement donné jusqu'au 27 novembre au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour répondre à son plan, comprenant notamment la cession de territoires ukrainiens et s'apparentant à une capitulation de Kiev. Il a ensuite précisé que ce n'était pas sa "dernière offre". (AFP)
Le président américain avait initialement donné jusqu'au 27 novembre au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour répondre à son plan, comprenant notamment la cession de territoires ukrainiens et s'apparentant à une capitulation de Kiev. Il a ensuite précisé que ce n'était pas sa "dernière offre". (AFP)
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  • Les discussions entre Ukrainiens, Américains et Européens, convoquées dimanche dans l'urgence, se sont tenues sur la base du projet de plan en 28 points de Donald Trump, considéré comme largement favorable à Moscou
  • Américains et Ukrainiens ont affirmé qu'un "futur accord" de paix devrait respecter la souveraineté de l'Ukraine

KIEV: Le chancelier allemand a insisté lundi pour que la Russie rejoigne la table des négociations sur un plan de paix pour l'Ukraine, au lendemain de pourparlers à Genève ayant donné lieu à un "nouvel élan", mais qui nécessitent encore "du travail" selon Kiev et l'UE.

Les discussions entre Ukrainiens, Américains et Européens, convoquées dimanche dans l'urgence, se sont tenues sur la base du projet de plan en 28 points de Donald Trump, considéré comme largement favorable à Moscou. Américains et Ukrainiens ont affirmé qu'un "futur accord" de paix devrait respecter la souveraineté de l'Ukraine.

L'Ukraine, qui lutte depuis près de quatre ans contre l'invasion de la Russie, est de nouveau au coeur d'échanges lundi à Luanda en marge d'un sommet entre l'UE et l'Union africaine. Et la "Coalition des volontaires", qui réunit les alliés de l'Ukraine, se réunira mardi en visioconférence.

"La Russie doit être présente à la table (des négociations)", a affirmé le chancelier allemand Friedrich Merz, jugeant néanmoins improbable "une percée" diplomatique cette semaine.

Le président américain avait initialement donné jusqu'au 27 novembre au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour répondre à son plan, comprenant notamment la cession de territoires ukrainiens et s'apparentant à une capitulation de Kiev. Il a ensuite précisé que ce n'était pas sa "dernière offre".

Salué par le président russe Vladimir Poutine, le texte initial du plan Trump reprenait plusieurs exigences cruciales pour Moscou. Le Kremlin a dit lundi n'avoir aucune information à l'issue des pourparlers de Génève, mais savoir que des "modifications" avaient été apportées.

Si M. Zelensky a salué lundi des avancées, il a estimé qu'il fallait "beaucoup plus" pour parvenir à une "paix réelle" avec la Russie et mettre fin au conflit le plus meurtrier en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.

Atmosphère "constructive"

Le dirigeant ukrainien s'est néanmoins félicité de l'inclusion d'éléments "extrêmement sensibles": la libération totale des prisonniers ukrainiens selon la formule de "tous-contre-tous" et des civils, et le retour des "enfants ukrainiens enlevés par la Russie".

Un haut responsable ukrainien a indiqué à l'AFP que l'hypothèse d'une visite de Volodymyr Zelensky à Washington était "au stade de la discussion", sans date fixée.

L'atmosphère à Genève était "parfois tendue, parfois plus légère mais dans l'ensemble constructive", a-t-il décrit, évoquant une ambiance "typique des négociations extrêmement importantes".

Depuis Luanda, les alliés européens de Kiev se sont dit prudemment optimistes.

"Il reste encore du travail à faire mais il y a une base solide pour avancer", a dit la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Le président du Conseil européen, Antonio Costa, a lui salué un "nouvel élan".

Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, a aussi noté les "progrès significatifs" réalisés à Genève.

Aucune nouvelle version du texte n'a pour l'heure été publiée.

"Nous continuons tous à travailler avec nos partenaires, en particulier les États-Unis, et à rechercher des compromis qui nous renforcent et ne nous affaiblissent pas", a dit M. Zelensky lors d'une conférence virtuelle en Suède, ajoutant que son pays se trouve à un "moment critique".

Le président américain a semblé se réjouir de l'issue de la rencontre à Genève. "Est-ce vraiment possible que de grands progrès soient réalisés dans les pourparlers de paix entre la Russie et l'Ukraine??? Ne croyez que ce que vous voyez, mais quelque chose de bon pourrait bien se produire", a-t-il écrit sur son réseau Truth Social.

A Genève, son secrétaire d'Etat Marco Rubio s'était dit dimanche "très optimiste" sur la possibilité de conclure "très vite" un accord, estimant que "les points qui restent en suspens ne sont pas insurmontables".

Les Russes auront "leur mot à dire", avait-il aussi assuré.

Lors d'un entretien téléphonique lundi entre Vladimir Poutine et son homologue turc Recep Tayyip Erdogan, le dirigeant russe a réitéré son opinion selon laquelle le plan initial des États-Unis pourrait "servir de base à un règlement de paix final".

La poussée lente, mais progressive, des troupes russes accentue la pression sur Kiev.

Moscou a revendiqué lundi la prise d'un village dans la région de Zaporijjia (sud), tandis que des frappes aériennes russes ont fait au moins quatre morts à Kharkiv.

La Russie cible quasi quotidiennement le pays au moyen de drones ou de missiles. Les infrastructures énergétiques sont particulièrement visées, faisant craindre un hiver difficile en Ukraine. Kiev vise de son côté régulièrement des dépôts et raffineries de pétrole et d'autres installations côté russe.