LILLE : Histoires vraies, course aux meilleurs auteurs, bulle encore grandissante et succès des productions locales: les tendances de l'univers des séries ont été dévoilées à Lille (nord) lors des huit jours du festival Séries Mania.
Explosion de la bulle des séries ?
Selon FX Networks Research (groupe Disney), 532 séries ont été produites aux Etats-Unis en 2019 pour baisser à 493 en 2020 en raison de la pandémie. Mais une nouvelle augmentation est attendue pour 2021.
"On entre dans une période où il y a regain de coproductions internationales, des quotas (de contribution à la création) imposés aux plateformes vont rajouter de nouvelles productions, sans compter les plateformes internationales qui vont essayer de conquérir de nouveaux marchés à travers le monde et donc lancer des productions locales", explique Pierre Langlais, auteur de l'ouvrage "Créer une série".
Reste à savoir "à quel point ces plateformes s'endettent pour multiplier les productions" et la rentabilité à terme de cette stratégie, questionne le spécialiste.
"Le mouvement va être limité par les moyens financiers" des téléspectateurs, prévoit Laurence Herszberg, directrice du festival, d'après qui "en Europe on ne mettra pas 80-100 euros par mois" dans des abonnements à des plateformes ou chaînes comme aux Etats-Unis.
Productions locales"Quelque chose est en train de changer dans le monde de l'adaptation, ce qui est formidable. De plus en plus de gens regardent des émissions originales dans leur langue d'origine. Je pense que bientôt, les adaptations seront superflues. C'est en train de se produire de plus en plus, même aux Etats-Unis", a estimé Hagai Levi, créateur de la série "En Thérapie".
D'autant que le public aime regarder ce qui est proche de lui. 77% des contenus audiovisuels visionnés en Europe sont des productions locales, a rappelé Jan Koeppen, président de la région EMEA (Europe Moyen-Orient Afrique) du groupe Walt Disney Company.
Une tendance bien intégrée par les plateformes mondiales et studios américains qui sont les principaux commanditaires de programmes de fiction dans le monde, selon une étude du CNC. Disney a ainsi rehaussé son objectif de productions locales en Europe à plus de 60 séries originales d'ici 2024, contre 50 initialement.
Les Français aiment frissonner devant leurs écrans et sont gourmands de programmes "crime/thriller" qui pèsent pour plus d'un tiers (35% de leur programmation), à l'instar de l'Espagne et de l'Inde (même part).
Les Britanniques et les Allemands eux aiment se plier devant des comédies (28% et 27%). A noter que la science-fiction séduit surtout en Corée du Sud, aux Etats-Unis (18% de leurs programmes) alors qu'elle représente un pourcentage beaucoup plus faible ailleurs, selon une étude du CNC basée sur des données d'Ampere Analysis, réalisée entre août 2020 et juillet 2021.
Histoires vraies, course aux auteursLes "true facts" ou histoires réelles deviennent une manne dans l'univers des séries: histoires sociales, faits divers, biographies, tout y passe et ceux qui les racontent, souvent des journalistes deviennent très prisés.
"Beaucoup de journaux américains sont financés par le fait que des articles ou des journalistes, leurs reportages ou leurs investigations deviennent des séries", expliquait Florence Aubenas dans un entretien à "20 minutes". "En France, on va vers cela, la plupart des journaux dont Le Monde sont sollicités".
Disney et Gaumont vont ainsi adapter en série la biographie "Kaiser Karl" écrite par la journaliste du Monde Raphaëlle Bacqué sur le couturier star Karl Lagerfeld.
L'éditeur So Press a rappelé travailler avec Federation entertainment sur l'adaptation en série de son enquête sur Xavier Dupont de Ligonnès, disparu en France depuis l'assassinat de sa famille.
La course aux romanciers continue également: Dominique Farrugia, patron de Shine fiction (groupe Endemol) a indiqué mercredi avoir obtenu les droits d'adaptation des romans de Pierre Lemaître ("Au revoir là-haut").