Selon des experts, la Russie joue la carte du S-400 en Turquie à des fins stratégiques

Des systèmes de missiles sol-air russes S-400 Triumph à moyenne et longue défilent sur la place Rouge à l’occasion du Jour de la victoire, à Moscou, le 9 mai 2015. (Reuters)
Des systèmes de missiles sol-air russes S-400 Triumph à moyenne et longue défilent sur la place Rouge à l’occasion du Jour de la victoire, à Moscou, le 9 mai 2015. (Reuters)
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Publié le Jeudi 26 août 2021

Selon des experts, la Russie joue la carte du S-400 en Turquie à des fins stratégiques

  • L'agence de presse Interfax déclare que le Kremlin et Ankara sont sur le point de signer un contrat pour fournir à la Turquie un deuxième lot d'unités de défense aérienne S-400
  • Cette déclaration, considérée comme une mesure destinée à nuire à l'amélioration des relations de la Turquie avec l'Occident et avec l'Ukraine, coïncide avec le sommet de Crimée

ANKARA: Alors que la Turquie et le monde occidental multiplient les contacts au sujet des événements qui se sont produits en Afghanistan et de l'afflux potentiel de réfugiés, la Russie soulève la question du système de défense antimissile S-400 – une démarche que les experts interprètent comme une stratégie pour éloigner la Turquie des États-Unis et de l’Europe.

Après les propos du dirigeant de Rosoboronexport, l'exportateur d'armes russe, l'agence de presse Interfax a déclaré que le Kremlin et Ankara sont sur le point de signer un contrat pour fournir à la Turquie un deuxième lot d'unités de défense aérienne S-400 – des propos auxquels les autorités turques n'ont pas encore réagi.

Cette déclaration, considérée comme une mesure destinée à nuire à l'amélioration des relations de la Turquie avec l'Occident et avec l'Ukraine, coïncide avec le sommet de Crimée qui s’est tenu à Kiev et auquel le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a assisté, un peu plus tôt dans la semaine.

L'achat initial de S-400 par la Turquie à la Russie constituait un point de tension avec les États-Unis et les alliés de l'Otan, ce qui a valu à Ankara une série de sanctions américaines.

Washington redoute en effet que le système de défense russe ne compromette la sécurité si la Russie acquiert secrètement des informations classifiées sur les armes des États-Unis et de l'Otan.

Aussi Washington a-t-il interdit la participation de la Turquie au programme d'avions de combat F-35. En outre, le mois dernier, le président américain, Joe Biden, a déclaré qu'il maintiendrait les sanctions contre la Turquie en vertu de la loi Caatsa (Countering America's Adversaries Through Sanctions Act) dans la mesure où elle avait acheté le système russe.

De nouvelles sanctions de Washington pourraient s’avérer désastreuses pour la Turquie, dont l’économie, en pleine pandémie, est encore fragile.

L'armée turque a testé le S-400 dans la province de Sinop, sur la mer Noire, au mois d’octobre 2020. Cependant, elle n'a pas complètement activé le système de défense, ce qui est considéré comme une branche d'olivier pour la nouvelle administration américaine.

«Comme la Turquie n'a pas encore totalement activé le premier lot du système S-400, il n'est pas raisonnable pour Ankara de conclure un nouvel accord avec Moscou sur cette question», déclare à Arab News le professeur Emre Ersen, expert russe à l'université de Marmara, à Istanbul.

Ce dernier pense que les déclarations répétées des responsables russes au sujet du S-400 traduisent le malaise de la Russie à l’idée que la relation entre la Turquie et les États-Unis devienne plus étroite sous l'administration Biden, alors qu'Ankara, ces derniers mois, s’attachait à renouer ses liens avec ses alliés occidentaux.

«Les derniers développements en Afghanistan et le possible rôle de la Turquie dans ce dossier ont donné un nouvel élan aux relations stratégiques entre la Turquie et l'Occident», estime-t-il.

Mevlut Cavusoglu et son homologue russe, Sergueï Lavrov, ont discuté le 18 août dernier des derniers événements survenus en Afghanistan et ils ont insisté sur la nécessité d'y assurer la sécurité.

Pourtant, le 23 août, à Kiev, à l’occasion de la réunion de la «plate-forme de Crimée», Cavusoglu a fait une déclaration controversée: il a affirmé que la Turquie n'avait pas reconnu et ne reconnaîtrait pas l'occupation illégale de la Crimée par la Russie et qu’elle soutiendrait l'intégrité territoriale de l'Ukraine.

«Étant donné que les missiles S-400 restent le point faible des relations turco-américaines, Moscou essaie très probablement de maintenir cette question en tête de l'ordre du jour et de s’en servir comme un instrument politique pour s'assurer qu'Ankara demeure éloignée de Washington», souligne Ersen.

Dans le cadre de l'accord de 2,5 milliards de dollars (1 dollar = 0,85 euro, NDLR) signé en 2017, la Russie devait fournir à la Turquie quatre batteries de missiles sol-air S-400.

«Jusqu’à présent, la Turquie a acheté deux batteries et le second lot était facultatif. Cependant, Ankara et le Kremlin négocient des accords de prêt depuis quelques années. Aucun responsable n'a parlé de l'achat de la seconde unité depuis le mois de janvier 2020», fait savoir Aydin Sezer, un expert russe qui habite Ankara.

Selon ce dernier, les messages de la Russie ont pour objectif d’éloigner la Turquie de l'Occident à un moment où Ankara accorde de l'importance à ses relations transatlantiques.

«Il n'est pas réaliste de s'attendre à ce qu'Ankara procède à l'achat d'un deuxième lot de S-400 alors que, dans le même temps, elle fait des efforts de lobbying pour revenir au programme d'avions de combat américain F-35. Par conséquent, elle garde le silence et ne réagira positivement à de telles sollicitations politiques que lorsqu'une nouvelle crise émergera dans ses relations avec l'Occident», indique l’expert.

Ankara et Washington ont mené d'intenses négociations sur la responsabilité de la sécurité à l'aéroport international afghan de Kaboul après le retrait de l'Otan. La Turquie a utilisé l'offre de mission de l'aéroport comme un levier de coopération pour réhabiliter ses liens, tendus en raison de nombreux problèmes, avec les États-Unis et d'autres alliés de l'Otan.


Record de 281 travailleurs humanitaires tués dans le monde en 2024, selon l'ONU

L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database. (AFP)
L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database. (AFP)
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  • L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database
  • "Les travailleurs humanitaires sont tués à un rythme sans précédent, leur courage et leur humanité se heurtant aux balles et aux bombes", a déclaré le nouveau secrétaire général adjoint de l'ONU aux affaires humanitaires

GENEVE: Un nombre record de 281 travailleurs humanitaires ont été tués dans le monde cette année, ont alerté les Nations unies vendredi, qui demandent que les responsables soient poursuivis.

L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database.

"Les travailleurs humanitaires sont tués à un rythme sans précédent, leur courage et leur humanité se heurtant aux balles et aux bombes", a déclaré le nouveau secrétaire général adjoint de l'ONU aux affaires humanitaires et coordinateur des situations d'urgence, Tom Fletcher, dans le communiqué.

Le Britannique souligne que "cette violence est inadmissible et dévastatrice pour les opérations d'aide".

"Les États et les parties au conflit doivent protéger les humanitaires, faire respecter le droit international, poursuivre les responsables et mettre un terme à cette ère d'impunité".

L'année 2023 avait déjà connu un nombre record, avec 280 travailleurs humanitaires tués dans 33 pays.

L'ONU souligne que la guerre à Gaza "fait grimper les chiffres". Il y a eu "au moins 333 travailleurs humanitaires qui ont été tués rien que dans la bande de Gaza" depuis le début de la guerre en octobre 2023, a indiqué le porte-parole de l'agence de coordination humanitaire de l'ONU (Ocha), Jens Laerke, lors d'un point de presse à Genève.

Nombre d'entre eux ont été tués dans l'exercice de leurs fonctions alors qu'ils fournissaient de l'aide humanitaire. La plupart travaillaient pour l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), dont 243 employés ont été tués depuis la guerre à Gaza, a indiqué M. Laerke.

Parmi les autres travailleurs humanitaires tués depuis le début de la guerre à Gaza figure notamment du personnel du Croissant-Rouge palestinien, a-t-il relevé.

Mais les menaces qui pèsent sur les travailleurs humanitaires ne se limitent pas à Gaza, indique l'ONU, soulignant que des "niveaux élevés" de violence, d'enlèvements, de harcèlement et de détention arbitraire ont été signalés, entre autres, en Afghanistan, en République démocratique du Congo, au Soudan du Sud, au Soudan, en Ukraine et au Yémen.

La majorité du personnel humanitaire tué sont des employés locaux travaillant avec des ONG, des agences de l'ONU et le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.

L'ONU explique que la violence à l'encontre du personnel humanitaire s'inscrit dans "une tendance plus large d'atteintes aux civils dans les zones de conflit", avec l'an dernier "plus de 33.000 civils morts enregistrés dans 14 conflits armés, soit une augmentation de 72% par rapport à 2022".

 


Mandats d'arrêt de la CPI : réaction outrées en Israël, un nouveau «procès Dreyfus» dit Netanyahu

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JERUSALEM: L'annonce par la Cour pénale internationale (CPI) de mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ex-ministre de la Défense Yoav Gallant a suscité des réactions outrées en Israël, M. Netanyahu comparant la décision de la Cour à un nouveau "procès Dreyfus".

"La décision antisémite de la Cour pénale internationale est comparable à un procès Dreyfus d'aujourd'hui qui se terminera de la même façon", a déclaré le chef du gouvernement dans un communiqué diffusé par son bureau.

Condamné pour espionnage, dégradé et envoyé au bagne à la fin du XIXe siècle en France, le capitaine français de confession juive Alfred Dreyfus avait été innocenté et réhabilité quelques années plus tard. L'affaire Dreyfus a profondément divisé la société française et révélé l'antisémitisme d'une grande partie de la population.

"Israël rejette avec dégoût les actions absurdes et les accusations mensongères qui le visent de la part de la [CPI]", dont les juges "sont animés par une haine antisémite à l'égard d'Israël", ajoute M. Netanyahu.

La CPI "a perdu toute légitimité à exister et à agir" en se comportant "comme un jouet politique au service des éléments les plus extrêmes oeuvrant à saper la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient", a réagi son ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, sur X.

La CPI a émis jeudi des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant "pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis au moins à partir du 8 octobre 2023 jusqu'au 20 mai 2024", et contre Mohammed Deif, chef de la branche armée du Hamas "pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre présumés commis sur le territoire de l'Etat d'Israël et de l'Etat de Palestine depuis au moins le 7 octobre 2023", date de l'attaque sans précédent du mouvement palestinien contre Israël à partir de Gaza ayant déclenché la guerre en cours.

"Jour noir" 

"C'est un jour noir pour la justice. Un jour noir pour l'humanité", a écrit sur X le président israélien, Isaac Herzog, pour qui la "décision honteuse de la CPI [...] se moque du sacrifice de tous ceux qui se sont battus pour la justice depuis la victoire des Alliés sur le nazisme [en 1945] jusqu'à aujourd'hui".

La décision de la CPI "ne tient pas compte du fait qu'Israël a été attaqué de façon barbare et qu'il a le devoir et le droit de défendre son peuple", a ajouté M. Herzog, jugeant que les mandats d'arrêt étaient "une attaque contre le droit d'Israël à se défendre" et visent "le pays le plus attaqué et le plus menacé au monde".

Itamar Ben Gvir, ministre de la Sécurité nationale, et chantre de l'extrême droite a appelé à réagir à la décision de la CPI en annexant toute la Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, et en y étendant la colonisation juive.

"Israël défend les vies de ses citoyens contre des organisations terroristes qui ont attaqué notre peuple, tué et violé. Ces mandats d'arrêt sont une prime au terrorisme", a déclaré le chef de l'opposition, Yaïr Lapid, dans un communiqué.

"Pas surprenant" 

Rare voix discordante, l'organisation israélienne des défense des droits de l'Homme B'Tselem a estimé que la décision de la CPI montre qu'Israël a atteint "l'un des points les plus bas de son histoire".

"Malheureusement, avec tout ce que nous savons sur la conduite de la guerre qu'Israël mène dans la bande de Gaza depuis un an [...] il n'est pas surprenant que les preuves indiquent que [MM. Netanyahu et Gallant] sont responsables de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité", écrit l'ONG dans un communiqué.

Elle appelle par ailleurs "tous les Etats parties [au traité de Rome ayant institué la CPI] à respecter les décisions de la [Cour] et à exécuter ces mandats".

L'attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1.206 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur les données officielles, incluant les otages tués ou morts en captivité à Gaza.

La campagne de représailles militaires israéliennes sur la bande de Gaza a fait au moins 44.056 morts, en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du Hamas pour Gaza, jugées fiables par l'ONU.

 


Le président chinois appelle à un cessez-le-feu à Gaza

Xi s'exprimait à Brasilia, où il a été reçu mercredi par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva pour une visite d'Etat. (AFP)
Xi s'exprimait à Brasilia, où il a été reçu mercredi par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva pour une visite d'Etat. (AFP)
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  • Le président chinois Xi Jinping a appelé mercredi à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza et à "mettre fin rapidement à la guerre", a rapporté l'agence officielle Chine nouvelle
  • Les Etats-Unis ont empêché mercredi le Conseil de sécurité de l'ONU d'appeler à un cessez-le-feu "immédiat, inconditionnel et permanent" à Gaza, un nouveau veto en soutien à leur allié israélien dénoncé avec force par les Palestiniens

BRASILIA: Le président chinois Xi Jinping a appelé mercredi à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza et à "mettre fin rapidement à la guerre", a rapporté l'agence officielle Chine nouvelle.

Il s'est dit "préoccupé par l'extension continue du conflit à Gaza" et a demandé la mise en œuvre de la solution à deux Etats et "des efforts inlassables en vue d'un règlement global, juste et durable de la question palestinienne".

Xi s'exprimait à Brasilia, où il a été reçu mercredi par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva pour une visite d'Etat.

Les Etats-Unis ont empêché mercredi le Conseil de sécurité de l'ONU d'appeler à un cessez-le-feu "immédiat, inconditionnel et permanent" à Gaza, un nouveau veto en soutien à leur allié israélien dénoncé avec force par les Palestiniens.