MOSCOU: La Russie, appelant à un dialogue inter-afghan, a jugé mardi que les talibans envoyaient des signaux positifs en matière de libertés et de partage du pouvoir et se comportaient de matière "civilisée" à Kaboul.
"Le fait que les talibans à Kaboul proclament et démontrent dans la pratique leur disposition à respecter les opinions des autres constitue, à mon sens, un signal positif", a déclaré le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov, en déplacement à Kaliningrad.
"Nous voyons des signaux d'espoir du côté des talibans qui expriment leur désir d'un gouvernement avec d'autres forces politiques", a-t-il encore dit un peu plus tard, citant notamment l'engagement, selon lui, de la mouvance islamiste pour respecter le droit à "l'éducation pour les filles".
La Russie soutient le lancement d'un "dialogue national" en Afghanistan "avec la participation de toutes les forces politiques, ethniques et confessionnelles" du pays, a-t-il ajouté, en référence à ce qu'il a dit être une initiative de l'ancien président afghan Hamid Karzaï.
La Russie, bien qu'elle considère les talibans comme une organisation terroriste interdite, a des relations avec eux depuis plusieurs années et a reçu ses émissaires à Moscou à de nombreuses reprises. Elle a maintenu ses représentations dans le pays, alors que les Occidentaux évacuaient dans le chaos.
L'ambassadeur russe à Kaboul s'est lui entretenu mardi avec un représentant des talibans, et a insisté à la télévision russe Rossiïa-24 sur le comportement adéquat des conquérants.
"Ils se comportent de manière responsable, civilisée", a dit Dmitri Jirnov.
Sa rencontre a elle été "positive et constructive" et axée sur des aspects pratiques, étant donné que les talibans attendent encore "à Kaboul des représentants d'un rang plus élevé, plus politique".
Selon l'ambassadeur, il n'y actuellement pas de pouvoir central en Afghanistan "juste un chef à Kaboul, de facto, un taliban". Les nouveaux maîtres de la ville s'assurent avant tout qu'elle soit sécurisée "et y parviennent".
"Avec les criminels ils sont durs, ils peuvent les fusiller", a concédé le diplomate, tout en rejetant les prédictions alarmistes de Occidentaux "d'un bain de sang".
M. Lavrov avait aussi relevé un "processus positif en cours dans les rues de Kaboul où la situation est calme et où les talibans assurent l'ordre public".
Le ministre russe a aussi vivement critiqué les vingt années de présence politico-militaire américaine dans le pays.
"Les Américains ont essayé d'y bâtir ce qu'ils appellent démocratie", a-t-il relevé, "mais croire qu'on peut imposer au peuple afghan de vivre selon les normes occidentales est naïf".
"C'était une fois de plus une tentative d'imposer au monde ses propres valeurs, en ignorant les traditions pluriséculaires d'autres pays", a encore martelé M. Lavrov.