LE CAIRE : L'ambassadeur américain en Libye a rencontré mercredi le commandant militaire libyen dans le cadre des efforts internationaux afin de sauver une feuille de route, négociée par l'ONU, pour tenir des élections dans ce pays d'Afrique du Nord, plus tard cette année.
Richard Norland a rencontré Khalifa Haftar, commandant des Forces armées arabes libyennes autoproclamées, au Caire. La réunion dans la capitale égyptienne s'inscrit dans le cadre des efforts américains pour soutenir les élections parlementaires et présidentielles en décembre, selon l'ambassade américaine.
Norland «continue de se concentrer sur l'urgence de soutenir les compromis difficiles nécessaires dans le but d’établir la base constitutionnelle et le cadre juridique requis aujourd’hui pour que les élections aient lieu le 24 décembre», indique l'ambassade sur Twitter.
«Les États-Unis soutiennent le droit du peuple libyen de choisir ses leaders dans le cadre d'un processus démocratique ouvert, et appellent les personnalités importantes à user de leur influence à ce stade critique pour faire ce qui est le mieux pour tous les Libyens», souligne-t-elle l’ambassade.
La réunion a eu lieu au milieu des tensions croissantes entre Haftar et le gouvernement de transition. Le commandant a annoncé plus tôt cette semaine les promotions d'officiers militaires, sans consulter ni obtenir l'approbation du Conseil présidentiel au pouvoir.
Le chef du conseil est le commandant suprême de l'armée divisée de la Libye.
«Votre armée ne sera soumise à aucune autorité, à l'exception de celle élue par le peuple», a affirmé Haftar à ses troupes lundi lors d'une cérémonie célébrant la création de l'armée libyenne.
La Libye est en proie au chaos depuis qu'un soulèvement soutenu par l'OTAN a renversé le dictateur de longue date, Mouammar Kadhafi, en 2011.
Dans les années qui ont suivi le soulèvement, le pays riche en pétrole s'est divisé entre un gouvernement soutenu par l'ONU dans la capitale, Tripoli, et une autorité rivale basée dans l'est du pays, chacune soutenue par des groupes armés et des gouvernements étrangers.
Haftar, un allié de l'Égypte, est aligné sur l'ancien gouvernement basé à l'Est.
En avril 2019, Haftar et ses forces ont lancé une offensive pour s’emparer de Tripoli par le biais de groupes armés vaguement alliés à un gouvernement faible mais soutenu par l'ONU.
Cependant, la campagne de quatorze mois, s'est effondrée après que la Turquie ait intensifié son soutien militaire au gouvernement basé à Tripoli avec des centaines de soldats et des milliers de mercenaires syriens. Ceci conduit au cessez-le-feu d'octobre, et à la feuille de route pour les élections adoptées à Tunis un mois plus tard, qui comprenaient un gouvernement de transition.
Le mois dernier, l'envoyé spécial de l'ONU pour la Libye, Jan Kubis, a accusé des «saboteurs» d'avoir tenté d'entraver la tenue d'élections en décembre, cruciales pour unifier la nation divisée. Il a déclaré au Conseil de sécurité de l'ONU que de nombreux acteurs clés en Libye ont réitéré leur engagement en faveur des élections, mais «je crains que beaucoup d'entre eux ne soient pas prêts à joindre le geste à la parole».
Le Conseil de sécurité a averti que tout individu ou groupe qui entrave le processus électoral pourrait faire face à des sanctions de l'ONU.
Le Forum de dialogue politique libyen, un organe de 75 membres de tous horizons, n'a jusqu'à présent pas réussi à se mettre d'accord sur un cadre juridique pour la tenue d'élections. Le forum s'est réuni en ligne mercredi pour examiner quatre propositions de base constitutionnelle pour les élections, selon la mission de soutien de l'ONU en Libye.
Le «manque de capacité du forum à parvenir à un accord (sur la base constitutionnelle) risque de priver une fois de plus le peuple libyen de son droit d'élire démocratiquement ses représentants et de restaurer la légitimité perdue depuis longtemps des institutions libyennes», affirme Kubis au forum.
Un autre obstacle majeur est la présence de milliers de forces et de mercenaires étrangers, et l'incapacité de les retirer comme l'exige l'accord de cessez-le-feu d'octobre dernier qui a mis fin aux combats dans le pays riche en pétrole.
La mission de l'ONU, quant à elle, s'est inquiétée mardi soir de l'enlèvement et de la disparition d'un responsable du gouvernement à Tripoli au début du mois.
Rida Faraj Fraitis, chef de cabinet du premier adjoint du Premier ministre, et son collègue ont été enlevés par des hommes armés après la visite de Fraitis aux bureaux du gouvernement dans la capitale le 2 août, a indiqué la mission, et l'on ignore jusqu’à présent ce qu'il est advenu d'eux.
La mission de l'ONU s'est déclarée préoccupée par le nombre de personnes supplémentaires ciblées pour leur soutien de la transition démocratique. Cette tendance «aura certainement de sérieuses conséquences pour le processus de paix et de réconciliation et pour la pleine unification des institutions nationales», soutient la mission.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com