Akli Tadjer: «Je laisse les héros officiels aux raconteurs d’histoires des ministères de la Vérité»

Akli Tadjer. (Photo fournie)
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Publié le Jeudi 12 août 2021

Akli Tadjer: «Je laisse les héros officiels aux raconteurs d’histoires des ministères de la Vérité»

  • «C’est dans les failles laissées par la grande Histoire que je m’engouffre pour raconter le destin des petites gens», explique l’écrivain franco-algérien
  • «Dans mon roman, j’ai exploré une partie de notre histoire restée dans l’ombre. J’ai découvert l’existence des frontstalags, des camps de travail réservés aux prisonniers coloniaux»

TIZI OUZOU, ALGERIE: Dans son dernier roman, D’Amour et de guerre, Akli Tadjer nous raconte la quête éperdue d'amour et de liberté d'un jeune soldat kabyle propulsé, malgré lui, dans le monde sans merci de la Seconde Guerre mondiale. En 1939, dans les montagnes de Kabylie, Adam a vingt ans, et rêve de construire une maison pour Zina, son grand amour. Mais la guerre en décidera autrement. Arraché à son village et à sa fiancée, Adam découvre l'horreur dans un camp de travail pour les soldats coloniaux dans le nord de la France, mais aussi l'amitié et la solidarité. Akli Tadjer s’est confié à Arab News en français.

La toile de fond historique de votre dernier roman, D’Amour et de Guerre, est essentiellement la Seconde Guerre mondiale et la mobilisation de jeunes Algériens qui se voient, souvent malgré eux, broyés par les tranchées d’Europe. Quelle place a la mémoire dans votre univers romanesque?

Sans passé, il n’y a pas de présent, et sans présent, il n’y a pas d’avenir possible. Je me suis longtemps interrogé sur l’histoire de mon pays. Qui sommes-nous? D’où venons-nous? C’est quoi, être Algérien? Ce sont des questionnements essentiels pour structurer la pensée d’une femme ou d’un homme de ce pays, comme ailleurs dans le monde. Je n’ai lu que des récits officiels qui m’ont semblé creux, ou des légendes invérifiables qui n’étaient pas sans me rappeler celles des livres d’histoire de mes écoles parisiennes, où le récit national imposait que chaque personnage historique soit un héros de guerre, même si cela revenait par la même à gommer massacres et autres horreurs. Je pense en particulier au général Bugeaud. Il possède une avenue à son nom à Paris, et l’essentiel des Français ignore ses ignominies et saloperies en Algérie. C’est dans ces failles laissées par la grande Histoire que je m’engouffre pour raconter le destin des petites gens. Ceux qu’on appelle les sans-voix ou les oubliés de l’Histoire.

Situer votre toile romanesque dans l’Algérie des années 1940-1950, est-ce pour vous une manière de vous prononcer sur la problématique de la mémoire, qui anime le débat de manière récurrente aussi bien en France qu’en Algérie?

Le débat sur la colonisation est toujours biaisé en France, parce que ce n’est pas l’une des pages les plus glorieuses de ce pays, qui se targue d’être la patrie des droits de l’homme. C’est une nuance importante à mes yeux, la France est le pays de la Déclaration des droits de l’homme. Certains vantent l’action civilisatrice de la France, oubliant au passage les meurtres à grande échelle commis lors de la conquête coloniale, des meurtres que l’on qualifierait aujourd’hui de crimes contre l’humanité.  D’autres n’assument pas le passé colonial de la France, plus par idéologie que par empathie pour les Algériens. Enfin, la majeure partie des Français considèrent que tout ça, c’est de l’histoire ancienne qui importe peu. Ajoutez à cela les descendants d’immigrés algériens coincés entre l’histoire de France et celle de leurs parents, et vous aurez un cocktail prêt à exploser à chaque fois que le passé colonial ressurgit.

Votre roman semble avoir une visée pédagogique. Quels pans méconnus de l’Histoire avez-vous voulu raconter à travers lui?

 Dans mon nouveau roman, j’ai exploré une partie de notre histoire restée dans l’ombre. L’histoire de nos aînés enrôlés de force par l’armée française pour défendre une liberté qui leur était confisquée dans leur pays. On est bien loin des principes de la contrée de la Déclaration des droits de l’homme. Ces hommes justement, partis pour combattre des Allemands qu’ils ne connaissaient pas dans une France, la vraie, qu’ils ne connaissaient pas, ou si peu. Ils étaient passés du purgatoire de la colonisation à l’enfer: une guerre, où ils avaient conscience de n’être que de la chair à canon. J’ai découvert au cours de mes recherches l’existence les frontstalags, qui sont encore très méconnus. Ce sont des camps de travail réservés aux prisonniers coloniaux. Les Allemands ne voulaient pas d’eux chez eux, craignant qu’ils ne leurs ramènent des maladies exotiques, alors ils les ont parqués dans le nord la France, et horreur suprême, ils les ont fait garder à des prisonniers. Ceux qui les avaient précipités dans ce chaos devenaient leurs kapos. Voilà le sort réservé à nos aînés quand ils ne mourraient pas. C’est à eux que je veux rendre hommage dans mon dernier livre.

Vous imposez-vous des frontières entre l’Histoire et la fiction dans votre univers romanesque?

Il y a la grande Histoire avec ses dates, ses repères, ses figures essentielles, les raisons des guerres, qui varient souvent d’un camp à l’autre, puis il y la fiction, où tout devient possible. Les petites gens de la petite Histoire. Je suis de ceux-là. Je laisse les héros officiels aux raconteurs d’histoires des ministères de la Vérité. Lorsque je commence un roman, j’enfile le costume de mon personnage principal, en l’occurrence Adam, qui a 20 ans et qui est amoureux de Zina, avec qui il espère faire sa vie, mais la guerre va briser ses rêves de jeunesse. Et l’on suit l’épopée de ce jeune Kabyle pendant des années de guerre. Il va de surprises en déceptions, et se rend compte que la France, qu’il pensait invincible, a capitulé très vite devant l’ennemi. Il découvre les frontstalags, Paris occupée, et tout un monde qu’il ne pouvait imaginer. La Grande Mosquée de Paris, qui sauve des dizaines de Juifs pour qu’ils échappent au destin funeste qui leur est promis par les Nazis. Tous ces chambardements feront de lui un autre homme.

Dans D’Amour et de guerre, il y a aussi la Kabylie comme toile de fond. Hormis le fait que vos parents sont originaires de Kabylie, pourquoi ce choix?

La Kabylie a toujours une place importante dans mes romans pour une raison simple, c’est que je ne connais bien que cette région. Je n’ai rien contre les autres régions du pays, mais elles me sont largement inconnues. On parle mieux de ce que l’on connaît. De plus, mis à part mes origines, mes parents y sont enterrés, ce qui fait que lorsque je pense à eux, c’est-à-dire souvent , je pense à la Kabylie, et plus précisément à Bouzoulem, ce petit village accroché à la colline.

Un autre projet de roman pour bientôt?

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Le drapeau du BIE remis à l’Expo 2030 Riyad: une nouvelle ère commence pour l'Arabie saoudite

Le drapeau du Bureau international des Expositions (BIE) a été officiellement remis à l’Expo 2030 Riyad lors de la cérémonie de clôture de l’Expo 2025 Osaka, marquant la fin de six mois d’échanges mondiaux et le début d’un nouveau chapitre pour le Royaume d’Arabie saoudite sur la scène internationale. (Photo fournie)
Le drapeau du Bureau international des Expositions (BIE) a été officiellement remis à l’Expo 2030 Riyad lors de la cérémonie de clôture de l’Expo 2025 Osaka, marquant la fin de six mois d’échanges mondiaux et le début d’un nouveau chapitre pour le Royaume d’Arabie saoudite sur la scène internationale. (Photo fournie)
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  • Recevant le drapeau des mains des organisateurs japonais, S.E. l’ingénieur Ibrahim Alsultan, Ministre d’État et Directeur général de la Commission royale pour la ville de Riyad, a symboliquement accepté le transfert des responsabilités de ville hôte
  • Ce moment solennel consacre l’entrée du Royaume dans la phase préparatoire vers l’Exposition universelle 2030, qui se tiendra à Riyad sous le thème « Imaginer l’avenir »

OSAKA: Le drapeau du Bureau international des Expositions (BIE) a été officiellement remis à l’Expo 2030 Riyad lors de la cérémonie de clôture de l’Expo 2025 Osaka, marquant la fin de six mois d’échanges mondiaux et le début d’un nouveau chapitre pour le Royaume d’Arabie saoudite sur la scène internationale.

Recevant le drapeau des mains des organisateurs japonais, S.E. l’ingénieur Ibrahim Alsultan, Ministre d’État et Directeur général de la Commission royale pour la ville de Riyad, a symboliquement accepté le transfert des responsabilités de ville hôte. Ce moment solennel consacre l’entrée du Royaume dans la phase préparatoire vers l’Exposition universelle 2030, qui se tiendra à Riyad sous le thème « Imaginer l’avenir ».

L’événement, auquel ont assisté S.E. Faisal Alibrahim, Ministre de l’Économie et de la Planification, et S.E. le Dr Ghazi Binzagr, Ambassadeur du Royaume au Japon, illustre l’unité nationale et la détermination du Royaume à faire de cette Exposition une réussite mondiale.

« La passation du drapeau du Japon à Riyad marque une étape décisive dans notre parcours vers l’accueil du monde à l’Expo 2030 », a déclaré S.E. l’ingénieur Ibrahim Alsultan. « C’est le lancement officiel du compte à rebours vers une édition sans précédent de la plus prestigieuse exposition mondiale. »

Le ministre a souligné que cette étape reflète la vision stratégique du Royaume, portée par le Serviteur des Deux Saintes Mosquées, le Roi Salman ben Abdelaziz Al Saoud, et par Son Altesse Royale le Prince héritier Mohammed ben Salman ben Abdelaziz Al Saoud, Premier Ministre, dont le leadership inspire l’ensemble du programme de transformation nationale, Vision 2030.

« Grâce au soutien indéfectible de nos dirigeants et à la mobilisation de toutes les institutions publiques et privées, nous offrirons une expérience exceptionnelle, incarnant l’excellence et le leadership du Royaume dans l’accueil d’événements mondiaux », a-t-il ajouté.

De son côté, l’ingénieur Talal AlMarri, Directeur général de l’Expo 2030 Riyadh Company, a déclaré :

« Nous entrons désormais dans la phase opérationnelle. L’Expo 2030 Riyad établira de nouveaux standards mondiaux en matière de durabilité, d’innovation et d’inclusivité. Ce ne sera pas seulement un rassemblement de nations, mais un héritage vivant et une plateforme d’action pour le Royaume et pour le monde. »

Quelques jours avant la cérémonie, le 10 octobre, l’équipe de l’Expo 2030 Riyad avait organisé à l’Expo Area Matsuri l’événement culturel « From Osaka to Riyadh », qui a attiré plus de 15 000 visiteurs. Cette initiative a illustré la capacité organisationnelle et la créativité du Royaume à l’approche de 2030.
Le pavillon saoudien à l’Expo 2025 a d’ailleurs connu un succès retentissant, accueillant plus de 3 millions de visiteurs et figurant parmi les plus fréquentés de l’exposition.

L’Expo 2030 Riyad, prévue du 1er octobre 2030 au 31 mars 2031, rassemblera 197 pays et 29 organisations internationales. Elle devrait accueillir plus de 42 millions de visites sur un site de 6 millions de mètres carrés, réparti en cinq zones thématiques.
L’exposition mettra l’accent sur des solutions concrètes pour un avenir durable, inclusif et interconnecté.

À l’issue de l’événement, le site se transformera en un Village mondial permanent, symbole de l’héritage durable laissé par l’Expo 2030 — pour Riyad, le Royaume et la communauté internationale.


La Riyadh Season 2025 débute par une parade d’ouverture éblouissante

L'événement a donné lieu à un large éventail de représentations par des groupes internationaux et locaux, y compris des ballons géants. (Photo AN d'Abdulrahman bin Shalhoub)
L'événement a donné lieu à un large éventail de représentations par des groupes internationaux et locaux, y compris des ballons géants. (Photo AN d'Abdulrahman bin Shalhoub)
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  • La Riyadh Season 2025 a débuté avec une parade spectaculaire mêlant ballons géants, musiques festives et performances internationales, attirant une foule enthousiaste à Riyad

RIYAD : D’immenses foules se sont rassemblées vendredi pour assister à la parade d’ouverture de la Riyadh Season 2025, qui s’est déroulée entre la Kingdom Arena et Boulevard World, au cœur de la capitale saoudienne.

Cette parade figure parmi les événements les plus attendus de l’année, marquant le lancement officiel d’une nouvelle saison.

Le spectacle a mis en scène une grande diversité de performances issues de groupes internationaux et locaux, avec des ballons géants et des personnages adorés du grand public, tels que Captain Tsubasa et Baby Yoda.

Avec une musique entraînante, des couleurs éclatantes et des spectacles vivants, Riyad s’est transformée en une fête rayonnante, pleine d’enthousiasme et de joie.

Turki Alalshikh, président de la General Entertainment Authority, a déclaré sur son compte X :
« La parade a commencé. Tous les regards sont tournés vers les ballons géants alors que chacun vit ce moment tant attendu. #RiyadhSeason 2025 commence sur un départ inoubliable. »

Les organisateurs ont précisé : « La parade est organisée en partenariat avec Macy’s, l’un des organisateurs de parades festives les plus emblématiques de New York, qui présente — pour la première fois hors des États-Unis — une sélection de ses célèbres ballons géants, véritables symboles de ses célébrations annuelles. Ces ballons énormes et finement conçus nécessitent des centaines de participants pour être manœuvrés en parfaite synchronisation, apportant une touche internationale à cette ouverture spectaculaire de la saison. »

Yassin Nour, venu des Philippines, a été émerveillé par la parade et a confié à Arab News : « Ma partie préférée, c’était les feux d’artifice en plein jour. J’ai hâte de découvrir d’autres événements comme celui-ci. »

Mahmoud Samir, d’Égypte, a déclaré : « La parade était magnifique. Elle a dépassé nos attentes. On s’attendait à quelque chose de bien, mais c’était encore mieux que prévu. »

Samir a ajouté que les cérémonies d’ouverture de la Riyadh Season s’améliorent chaque année :
« Si Dieu le veut, nous serons les premiers visiteurs et profiterons de cette belle ambiance. »

Ali Al-Yami, originaire de Najran, a lui aussi été impressionné : « La Riyadh Season me surprend toujours avec ses spectacles d’ouverture. Les ballons étaient vraiment fantastiques et magnifiques. »

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Des racines et des recettes : l’art de se retrouver autour d’un plat

Sous les lumières vibrantes de la Green Room, « LéLa Cuisine », offre une fusion harmonieuse des traditions libanaises et latino-américaines. (Photo: fournie)
Sous les lumières vibrantes de la Green Room, « LéLa Cuisine », offre une fusion harmonieuse des traditions libanaises et latino-américaines. (Photo: fournie)
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  • « LéLa Cuisine » incarne une exploration des identités culturelles, en tissant des liens entre les traditions libanaises et latino-américaines à travers des saveurs partagées et réinventées
  • La cuisine devient ici un outil de dialogue interculturel, capable de raconter des histoires de migration, de mémoire et de rencontre, au-delà des frontières géographiques

DUBAÏ: Sous les lumières vibrantes de la Green Room, aux parfums entêtants d'épices mêlées et au rythme d'une musique aux accents du Levant et des Andes, Soul Kitchen invite au voyage. À l’occasion de son deuxième anniversaire, le restaurant a célébré bien plus qu’un simple jalon : il a révélé une philosophie culinaire audacieuse baptisée « LéLa Cuisine », fusion harmonieuse des traditions libanaises et latino-américaines.

Au cœur de cette initiative, une idée forte: la cuisine comme langage universel, capable de traverser les frontières, de raconter l’histoire des diasporas et de créer des ponts entre les cultures.

« Concevoir ces plats consiste à trouver des liens simples entre les cuisines libanaise et latino-américaine, et à créer quelque chose qui semble à la fois familier et nouveau », explique la cheffe exécutive Margarita Vaamonde, qui incarne à elle seule ce mélange d'identités culinaires.

De Caracas à Beyrouth, de Buenos Aires à Baalbek, chaque bouchée offrait une rencontre: le hummus chimichurri, le ceviche tabbouleh, ou encore les arepas à la kafta devenaient des symboles vivants de ces histoires partagées par des générations de migrants en quête d’un nouveau foyer.

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Chaque bouchée offrait une rencontre. Le ceviche tabbouleh. (Photo: fournie)

Ce projet n’est pas né du hasard. Il est l’aboutissement d’une vision portée par Factory People, groupe à l’origine de Soul Kitchen, et en particulier par les associés Tala Mortada, Wassim Bou Malham et la cheffe Vaamonde. À travers « LéLa Cuisine », ils racontent une histoire de voyage, d’exil, mais aussi d’ancrage et de réinvention.

« Il s'agit de créer des liens entre les cultures à travers la nourriture », affirme Tala Mortada. Et ces liens ne sont pas théoriques : chaque plat était une escale, chaque saveur un échange.

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La cuisine devient ici un outil de dialogue interculturel, capable de raconter des histoires de migration. "Migration birds" (Photo: fournie)

Au-delà de la gastronomie, Soul Kitchen se positionne comme un espace d’échange culturel, où la musique, les arômes et les récits personnels se croisent. Une véritable ode à la diaspora arabe en Amérique latine, qui, depuis le XIX siècle, a semé les graines d’une culture métissée et vibrante.

Deux ans après son ouverture, Soul Kitchen ne se contente plus de nourrir : il connecte, raconte, unit. Un pari réussi, dans une ville aussi cosmopolite que Dubaï, où la cuisine devient un passeport vers l’autre, et un rappel que, malgré les distances, nos racines peuvent se rejoindre dans une assiette.