PARIS : De Toulon à Lille, la mobilisation contre l'extension du pass sanitaire dès lundi et la vaccination obligatoire pour les soignants a de nouveau progressé en France samedi, pour le quatrième week-end consécutif.
Quelque 237.000 personnes, dont 17.000 à Paris, ont défilé dans le calme, un niveau jamais atteint depuis le début de la contestation, selon les chiffres du ministère de l'Intérieur. C'est 33.000 de plus que samedi dernier. Et le nombre a plus que doublé en trois semaines, en plein coeur de l'été, par rapport aux 114.000 manifestants recensés par les autorités le 17 juillet, lors du premier week-end d'actions.
Peu d'incidents ont été constatés, avec seulement 35 interpellations et sept blessés légers parmi les forces de l'ordre, sur un total de 198 actions. A 20H00, huit personnes avaient été placées en garde à vue à Paris, dont un mineur, selon le parquet. Pompiers en tenue, soignants en blouse, "gilets jaunes" ou électeurs d'extrême droite... C'est une foule très hétérogène qui a défilé tout l'après-midi.
Les cortèges mêlaient anti-vaccins et pro-vaccins opposés à l'extension du pass. Certains battaient le pavé avec leurs enfants et, parfois, pour la toute première fois. Comme la semaine dernière, l'affluence était plus forte dans le Sud-Est, où au moins 47.000 personnes, selon la police, ont défilé. Ils étaient 19.000 à Toulon, près de 10.000 à Nice, 8.000 à Montpellier, au moins 6.000 à Marseille, selon les premiers chiffres de la police et des préfectures.
Slogans anti-Macron
Ces rassemblements ont eu lieu au lendemain d'un nouvel appel pressant lancé par Emmanuel Macron aux Français - "Faites-vous vacciner", répété trois fois - alors que 66% de la population a reçu au moins une dose de vaccin.
Les autorités font valoir que le nombre des hospitalisations en soins critiques continue d'augmenter (plus de 1.500 patients samedi) et que le Covid a causé 112.222 décès en France depuis le début de la pandémie. La situation se dégrade en particulier dans les Antilles, et notamment en Guadeloupe, confinée depuis mercredi.
"Macron, ton pass, on n'en veut pas", "Macron, ta gueule, on n'en veut plus" : des slogans hostiles au président ont notamment résonné dans un cortège parisien - 4.500 manifestants, selon les autorités - dont de nombreux gilets jaunes, très encadré par les gendarmes mobiles.
"Le problème avec le pass sanitaire, c'est qu'on nous force la main", a dit à l'AFP Alexandre Fourez, 34 ans, qui a déjà eu le Covid. Cet employé dans le marketing a "vraiment du mal à croire que son application va être provisoire".
A Paris, 11.000 manifestants, selon le ministère de l'Intérieur, ont participé à un autre rassemblement à l'appel de Florian Philippot, ancien numéro 2 du FN (devenu RN) et président des Patriotes, qui a appelé à "dégager intégralement" le gouvernement.
«Vexatoire et discriminatoire»
Une bonne part des manifestants contestent l'imposition du pass, une "obligation vaccinale déguisée", selon eux. Ils jugent la contrainte disproportionnée et s'inquiètent notamment qu'un employeur puisse suspendre le contrat de travail d’un employé dépourvu de pass en règle.
"Je ne suis pas vaccinée et ne compte pas l'être. Si on veut m’obliger, je perdrai mon travail", a assuré à l'AFP une manifestante marseillaise, Céline Polo. "J’ai des soucis de santé qui font que je ne peux pas concevoir que des personnes étrangères à ma santé puissent décider pour moi", dit cette secrétaire de direction.
A partir de lundi, il faudra présenter un certificat de vaccination, un test PCR négatif au Covid-19 ou un certificat de rétablissement de la maladie pour avoir accès aux cafés et aux restaurants, salles de spectacles ou salons professionnels, ou encore pour faire un long trajet à bord d'un avion, train ou autocar.
Une des manifestantes, Geneviève Zamponi, éducatrice spécialisée à la retraite et favorable à la vaccination, juge le pass "vexatoire et discriminatoire": "Les +prolos+ peuvent prendre le métro ou le RER sans pass, mais ils n’auront pas le droit d’aller boire un café, c’est illogique", dit cette manifestante marseillaise.
Environ 3.500 personnes selon les autorités ont manifesté à La Réunion, sous confinement partiel et couvre-feu strict depuis le 31 juillet.
A Bordeaux, Gaëlle Faure, 23 ans, infirmière au CHU et non vaccinée, protestait contre l'obligation vaccinale des soignants: "Il y a quelques mois à l'hôpital, on me disait que je pouvais venir travailler si j'étais positive et aujourd’hui on m’explique que si je ne suis pas vaccinée, je suis un danger pour les patients, je trouve ça scandaleux!".
Plus d'une centaine de personnes, dont de nombreux commerçants, ont manifesté à Cambrai (Nord). Des commerces y étaient fermés pour protester contre le contrôle du pass "compliqué et qui pourrait créer des tensions", de l'avis de Morgan Sedrue, 36 ans, gérant d'un bar, qui redoute de voir sa clientèle "divisée par deux".