BEYROUTH, Liban : A la veille de la première commémoration de la double explosion dévastatrice survenue le 4 août 2020 au port de Beyrouth, le Liban est toujours sans réponse, sans justice, en proie à une crise économique qui continue à réduire le pouvoir d’achat de la population à vue d’œil. Tandis que s’organise pour la journée anniversaire un grand mouvement de protestation depuis le port et en direction du parlement, le nord du pays est ravagé par des feux de forêts, les denrées de première nécessité s’amenuisent, notamment l’essence et le fuel nécessaire à l’alimentation des groupes électrogènes, et la pandémie reprend en force alors qu’elle se trouvait à son plus bas au mois de juin.
Colère populaire
La colère populaire atteint son paroxysme contre une classe gouvernante acquise au Hezbollah et montrée du doigts pour son niveau de corruption, son incapacité à lancer des réformes ou à se renouveler à travers un gouvernement d’experts. Saad Hariri, Premier ministre désigné pour former une équipe en remplacement du cabinet démissionnaire de Hassan Diab, a jeté l’éponge, se trouvant dans l’incapacité de trouver un terrain d’entente avec le président de la république Michel Aoun sur les noms et appartenances des ministres potentiels. Il vient d’être remplacé par Nagib Mikati, homme d’affaires milliardaire originaire de Tripoli et proche du régime Assad, qui a déjà servi à la tête du gouvernement de 2011 à 2013, également à la suite de Saad Hariri.
Gel d’avoirs et interdiction de voyager
En avril 2021, l’Union européenne établissait une liste de critères qui pourraient justifier des sanctions contre des responsables politiques libanais, dont notamment : corruption, obstruction aux efforts de formation d'un gouvernement, mauvaise gestion financière et violations des droits de l'homme. A l’initiative et sous l’égide de la France, il s’agissait de mettre au pied du mur les responsables libanais en vue d’accélérer la formation d’un gouvernement alors que le pays est en chute libre depuis plusieurs mois. Le régime de sanctions envisagé consisterait en des interdictions de voyager et des gels d’avoirs. Sachant que de nombreux hauts responsables politiques libanais possèdent des biens immobiliers, des comptes bancaires et des investissements dans l’UE et que leurs enfants y fréquentent écoles et universités, de telles mesures pourraient les pousser à réagir.
Cependant, en juin dernier, les 27 États membres de l’UE étaient encore divisés sur la nature et les objectifs de ces sanctions, mais les deux principales puissances du bloc, la France et l’Allemagne, y étaient favorables, ce qui leur donne de sérieuses chances d’aboutir. La Hongrie a déjà fait déclaré qu’elle comptait s’y opposer. Un groupe plus large de nations devait encore préciser son approche, notamment concernant le Hezbollah contre qui ces sanctions auraient peu d’effet, ses leaders n’ayant pas d’intérêts en Europe.
Ce matin, certaines sources médiatiques françaises, parmi lesquelles Justine Babin (Les Echos, Mediapart) et Georges Malbrunot du Figaro, annonçaient que le régime de sanctions établi par l’UE à l’encontre des dirigeants libanais était sur le point d’être finalisé aujourd’hui, vendredi 30 juillet.