PEKIN : La Chine est depuis des siècles victime d'inondations meurtrières, mais nombre de catastrophes sont liées au moins autant aux activités humaines qu'aux intempéries.
Barrages vieillissants, dérèglement climatique, urbanisation forcenée... Les conséquences sont dramatiques lorsqu'il tombe en trois jours la quantité de pluie reçue normalement en un an.
C'est ce qui s'est passé à Zhengzhou, métropole de 10 millions d'habitants endeuillée mardi par des inondations qui ont envahi son métro, prenant au piège des passagers en pleine heure de pointe.
Des barrages efficaces?
La Chine se repose historiquement sur un système de barrages, de digues et de lacs de retenue pour se protéger des crues, particulièrement de ses deux géants: le Fleuve jaune et le Yangtsé, le plus long fleuve d'Asie.
Le niveau du Fleuve jaune, qui passe tout près de Zhengzhou, s'élève chaque année du fait des sédiments qui se déposent dans son lit. Résultat, dans son cours inférieur, le fleuve est désormais "suspendu" entre des digues qui s'élèvent jusqu'à 20 mètres au-dessus des terres.
Mais le parc de barrages vieillit et l'armée a annoncé mardi qu'une structure menaçait de s'effondrer à tout instant sur le cours d'une rivière du Henan, la province dont Zhengzhou est la capitale. L'installation a été dynamitée mercredi pour laisser l'eau s'écouler de façon contrôlée.
Au cœur de toutes les craintes, le Barrage des Trois gorges du Yangtsé, le plus grand du monde, retient un gigantesque réservoir de 600 km de long, dans un secteur parcouru de failles géologiques.
Quel impact du changement climatique?
Le réchauffement planétaire rend l'atmosphère plus humide et accroît donc les précipitations.
L'an dernier, 53 cours d'eau ont connu des crues estivales record, notamment le Yangtsé, qui a vu passer un débit inédit au niveau du Barrage des Trois gorges depuis sa mise en service en 2003.
Les inondations "sont un signal d'alarme pour la Chine, à savoir que le changement climatique est bel et bien là", observe le climatologue Li Shuo, de Greenpeace.
Des "villes éponges" à la rescousse?
L'urbanisation effrénée de la Chine depuis 40 ans recouvre toujours plus de terres, désormais imperméables. Et les lacs naturels, qui servent de déversoirs en cas de crue, voient leur surface réduite.
Pour tenter de renverser la tendance, le pouvoir a lancé en 2014 un programme de "villes éponges", visant à remplacer les revêtements urbains par des matières poreuses, des espaces verts et des systèmes de drainage, afin que l'eau disparaisse dans le sol.
Où sont les victimes?
Pour protéger les villes, les campagnes sont parfois délibérément inondées après évacuation des habitants.
Lors des pluies des derniers jours, 75 000 hectares de cultures ont été recouverts par les eaux dans le Henan, selon les autorités locales, qui évaluent les dégâts à 542 millions de yuans (71 millions d'euros).
Le salut dans la technologie?
La Chine se tourne de plus en plus vers la technologie pour surveiller ses rivières.
Dans l'Anhui, une des provinces les plus vulnérables aux inondations, la ville d'Anqing a mis en place des caméras de surveillance. Reliées aux cours d'eau, elles transmettent des alertes en temps réel.
Le gouvernement central se félicite de sa politique de prévention: l'an dernier, il a dénombré 219 morts lors de la saison des crues estivales, soit moins de la moitié du bilan annuel enregistré lors des cinq années précédentes.
Dans le même temps, les pertes économiques ont augmenté de 15%, à 179 milliards de yuans (23 milliards d'euros).